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BNP Paribas Fortis vire un millier de travailleurs mais verse 2 milliards d'euros à sa maison-mère française: "L'Etat belge ne peut rien faire"

BNP Paribas Fortis vire un millier de travailleurs mais verse 2 milliards d'euros à sa maison-mère française: "L'Etat belge ne peut rien faire"
 
 

Un généreux versement de deux milliards aux actionnaires a été annoncé, alors que le plan "Vision 2020" de la banque belge prévoit la suppression de plus de 1000 postes en trois ans. Le parti d'opposition Ecolo appelle le gouvernement fédéral, qui détient 10% de la banque française BNP Paribas, à ne pas laisser faire. Mais selon l'économiste Bruno Wattenbergh, l'Etat belge ne pourra pas influencer le conseil d'administration. Explications.

BNP Paribas Fortis versera un dividende exceptionnel de deux milliards d'euros aux actionnaires de sa maison mère (BNP Paribas) avant la fin de l'année, rapportait mardi matin les journaux économiques L'Echo et De Tijd. La décision devra encore être approuvée lors d'une assemblée générale extraordinaire convoquée pour le 23 décembre, mais il s'agirait d'une simple formalité. Le dividende exceptionnel s'élèvera à 4,15 euros par action. L'opération, préparée depuis l'été, a déjà été approuvée par les autorités de contrôle, la Banque Nationale Belge (BNB) et la Banque Centrale Européenne (BCE). "La distribution de ce dividende, qui est autorisée par l'autorité de contrôle, s'explique par une gestion saine des actifs et n'influencera pas la capacité de BNP Paribas Fortis d'investir dans la croissance de ses activités et de continuer à jouer un rôle majeur dans le financement de l'économie belge", se justifie BNP Paribas Fortis sur le site internet du magazine économique Trends tendances.

"Une opération pleinement justifiée économiquement parlant"

Pourquoi un tel versement de dividendes? "Cette opération doit permettre au groupe français de gonfler un peu plus son matelas financier, grâce à la laine retirée du matelas belge", a expliqué le magazine Trends Tendances. La situation financière de BNP Paribas n’est pas florissante. D’abord, à cause d'une fameuse amende de 8,9 milliards de dollars infligée en 2014 par les autorités américaines pour viol d’embargo. Ensuite, à cause des contraintes imposées par les régulateurs européens aux grandes banques. D’un côté, il y a des charges exceptionnelles, l’amende, de l’autre des pressions pour renforcer les fonds propres. Vous rajoutez à cela un contexte de marché difficile, avec des taux d’intérêt bas, voire négatifs, les restrictions de trading pour compte propre, une nouvelle concurrence,...

"BNP Paribas ne roule pas sur l’or et va gratter à gauche et à droite ce qu’elle peut gratter. L’opération, économiquement parlant, est donc pleinement justifiée", a estimé l'économiste Bruno Wattenbergh.

Des dividendes chaque année plus élevés depuis que l'Etat belge a vendu ses parts

"L'Etat belge a revendu sa participation dans BNP Paribas Fortis, donc la branche belge de BNP Paribas, à la maison-mère. Théoriquement, l'Etat belge ne va donc pas pouvoir directement bénéficier de ce dividende exceptionnel qui va être payé aux actionnaires de la filiale belge", a précisé Bruno Wattenbergh. Cependant, il faut nuancer, ajoute-t-il, car l’état belge bénéficie de dividendes de la maison-mère et dans ce cas-ci c’est pour aider cette maison-mère que l'argent liquide remonte de la filiale belge vers elle. "Donc je ne vois pas où est le problème. La pilule est beaucoup plus amère pour les syndicats", conclut-il.

Entre 2010 et 2013, alors que la Belgique détenait encore un quart de BNP Paribas Fortis, la banque a versé des dividendes de 200 à 400 millions d'euros. En 2013, il s'agissait de 387 millions, soit 60% des bénéfices. En 2014, 1,25 milliard d'euros sont remontés vers Paris pour un bénéfice de 1,34 milliard.

Les actionnaires sourient, les travailleurs font grise mine

Les négociations sociales en cours ont été bloquées suite à l'annonce de ce généreux versement de dividende et une réunion extraordinaire avec le directeur général, Max Jadot, est prévue jeudi matin. C’est assez compréhensible. Imaginez la position des syndicats. Ils s’assoient autour de la table pour se faire présenter un plan stratégique, baptisé Vision 2020, qui prévoit la suppression de 1050 postes en trois ans. Les représentants des employeurs expliquent qu’il faut se serrer la ceinture, faire des efforts … et dans la foulée, les syndicats apprennent qu’une partie non négligeable des bénéfices mis en réserve va servir à compenser les erreurs, ici les malversations, de la maison mère.

Ecolo et le PTB demandent au gouvernement fédéral d'intervenir

Le parti Ecolo a réagi en rappelant que l'Etat belge était le premier actionnaire de BNP Paribas (environ 10% du capital de la banque française, voir ce graphique) et que dès lors, le gouvernement fédéral devait appeler la direction de la banque française à un "meilleur respect des intérêts économiques et sociaux de notre pays".

Mais pour l'économiste Bruno Wattenbergh, l'Etat belge ne sera pas en mesure d'influencer la décision du conseil d'administration. "Non. En plus, on est dans une configuration dans laquelle la maison-mère a absolument besoin de ce gros dividende parce qu'elle est prise en tenaille entre l'amende importante qu'elle doit payer aux Etats-Unis, et dans un même temps, des exigences de fonds propres relativement élevés. Donc elle va ponctionner un petit peu plus d'argent dans sa filiale belge de manière à rapatrier cette somme vers la maison-mère française. Cela leur permet de faire un transfert de cash de la filiale vers la maison-mère", a-t-il conclu.


 

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