L'organisation de défense des consommateurs se rend au Tribunal de l'entreprise de Bruxelles. Elle déposera une requête en action collective contre la compagnie low-cost. L'objectif est d'indemniser les passagers qui ont été victimes des grèves des pilotes l'an dernier. 45.000 voyageurs pourraient y avoir droit.
Test Achats lance une action collective contre Ryanair après les multiples grèves du personnel de la compagnie aérienne à bas coûts de l'été 2018, annonce jeudi l'organisation de défense des consommateurs. Elle espère de la sorte que les dizaines de milliers de passagers concernés en Belgique par ces mouvements, qui ont touché les aéroports de Charleroi et de Zaventem, pourront être indemnisés.
"Nous demandons à Ryanair de respecter la jurisprudence européenne, qui dit qu'en cas de grève du personnel de la compagnie, on ne peut pas parler de circonstances exceptionnelles. Et donc, l'indemnisation qui est prévue en cas d'annulation de vol est bel et bien due. C'est une somme qui va de 250 à 600 euros, en fonction de la distance qui devait être parcourue. 172 vols sont concernés donc le montant total est d'environ 16 millions d'euros", a déclaré Julie Frère.
Les grèves en question, celles des 25 et 26 juillet, du 10 août et du 28 septembre, ont provoqué de nombreuses annulations et retards, touchant 45.000 passagers, d'après les estimations de Test Achats.
En vertu d'un règlement européen, ces derniers ont droit à une indemnisation, pouvant effectivement aller de 250 à 600 euros, en plus du remboursement de leur billet ou d'une nouvelle réservation. Ryanair refuse cependant de la leur payer, arguant que la grève était un cas de "force majeure", de circonstances exceptionnelles et que la règle ne s'applique dès lors pas.
Pas un cas de force majeure, ni un cas exceptionnel
Mais il ne peut être question de force majeure quand il y a une grève du personnel, encore moins quand le mouvement a été annoncé bien à l'avance, estime Test Achats, s'appuyant sur une décision de la Cour de justice de l'Union européenne allant dans ce sens. Même une grève imprévue ne constitue pas un cas de force majeure, selon la jurisprudence européenne. "Il y a une jurisprudence clair qui dit que quand c’est une grève qui touche le personnel de la compagnie aérienne (par opposition par exemple à une grève des contrôles aériens ou des bagagistes), ce ne sont pas des circonstances extraordinaires donc Ryannair est tenu d’indemniser", a déclaré Julie Frère. La compagnie irlandaise est en outre "l'un des pires élèves pour obtenir une indemnisation", constate l'organisation.
Celle-ci avait introduit une quarantaine de réclamations individuelles en justice ('small claims') à Charleroi et Zaventem, espérant qu'un jugement suivrait rapidement et inciterait la compagnie à intervenir en faveur des autres voyageurs concernés. Mais le juge s'est cependant déclaré incompétent à Zaventem, tandis que la procédure a pris du retard et est toujours en cours dans le Hainaut.
Test Achats a finalement décidé de lancer une action collective (class action) devant le tribunal francophone de l'entreprise de Bruxelles. Elle agit également de la sorte pour éviter la prescription de droit, qui serait intervenue le 25 juillet, soit un an après le premier jour de grève. "Nous ne voulons pas prendre de risques", a affirmé la porte-parole de Test-Achats.
L'action vise les passagers de tous les vols concernés au départ ou à l'arrivée de Zaventem et Charleroi. "Il ne faut pas être membre de Test-Achats pour participer à cette action collective. Il faut simplement avoir été victime de retards et annulations qui ont été la suite des grèves causées l’an passé", nous informe Julie Frère.
Il reste à présent à savoir si la procédure, qui devrait durer au moins un an, est déclarée recevable et, le cas échéant, qui pourra en faire partie. Le juge devra déterminer si tous les voyageurs touchés sont d'office inclus (opt-out) ou si ceux-ci doivent se manifester individuellement (opt-in).
Comment s'inscrire si vous êtes lésés ?
Un site internet rassemblant toutes les informations relatives à cette action collective a spécialement été mis en ligne à cette occasion: www.testachats.be/actionryanair. Il est également possible de s'y inscrire. La procédure sera gratuite, insiste-t-on chez Test Achats.
L'organisation plaide par ailleurs pour que les autorités européennes revoient le règlement européen sur les droits des passagers, en y clarifiant ce qu'incluent "les circonstances extraordinaires" que peuvent avancer les compagnies. Elle suggère aussi de mettre en place une indemnisation automatique des passagers plutôt que de leur demander de faire toutes les démarches eux-mêmes.
Après des 'class action' contre notamment Proximus, la SNCB, Facebook, VW ou Groupon, cette démarche judiciaire est déjà la huitième du genre qu'intente l'organisation de consommateurs depuis son entrée en vigueur en septembre 2014. Plusieurs des litiges se sont d'ailleurs réglés par un accord financier en cours de procédure. Ce qu'espère également Test Achats dans ce cas-ci.
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