La cour d'assises de Bruxelles entamera ce lundi matin une nouvelle série d'auditions dans le procès de l'attentat au Musée juif de Belgique. Après avoir entendu certaines personnes constituées partie civile, la cour va maintenant passer aux deux juges d'instruction qui étaient en charge du dossier et pas moins de vingt-sept enquêteurs, jusqu'au mardi 29 janvier.
La cour va entendre durant 7 jours les juges d'instruction et les enquêteurs. Ceux-ci vont expliquer toute leur enquête en commençant par le déroulement des faits le 24 mai 2014 au Musée juif de Belgique. Les images de l'attaque seront à nouveau projetées à l'audience et commentées par les enquêteurs.
D'autres images seront également dévoilées, notamment une séquence vidéo sur laquelle Mehdi Nemmouche est reconnaissable le 28 mai 2014 aux bureaux de la compagnie de bus Eurolines, à la gare du Nord à Bruxelles. Il y avait acheté un billet pour le lendemain, afin de se rendre à Marseille où il a été arrêté.
Les enquêteurs feront aussi projeter des images du Musée juif datant du 23 mai 2014, la veille de l'attentat, sur lesquelles on distingue un homme ayant la même physionomie que l'auteur de la fusillade, selon eux.
Ils évoqueront l'arrestation de Mehdi Nemmouche et la découverte des armes qu'il transportait. Ils concentreront par la suite leurs analyses sur l'examen des numéros contactés ou ayant contacté ceux qui sont attribués à Mehdi Nemmouche, un examen qui les avait menés vers Mounir Attallah et Nacer Bendrer.
Les enquêteurs exposeront donc aussi les soupçons de complicité qui ont pesé sur ces deux hommes, dont un a bénéficié d'un non-lieu dans cette affaire et l'autre est accusé aux côtés de Mehdi Nemmouche, ainsi que leurs différents interrogatoires. Mehdi Nemmouche, lui, avait refusé de parler aux policiers et a également refusé de répondre aux questions de la cour.
"Les enquêteurs vont détailler les pistes qu'ils ont suivies, les portes qu'ils ont ouvertes, et celles qu'ils ont parfois refermées. Ils expliqueront aussi comment on instruit un dossier quand le principal accusé se tait depuis le début. Du côté des parties civiles, on salue le travail des enquêteurs. C'est un dossier cohérent et complet qui va être présenté. Du côté de la défense de Mehdi Nemmouche, on parle d'une enquête sabotée et ses avocats annonce qu'ils vont tenter de démonter une à une les preuves qui seront exposées. Les questions seront nombreuses pour les juges d'instruction et les enquêteurs et certains d'entre-eux risquent d'être malmenés", nous expliquait notre journaliste Antoine Schuurwegen ce matin en direct du Palais de Justice.
Pour Me Henri Laquay, avocat de Mehdi Nemmouche, "la preuve de sa culpabilité n'est pas évidente".
"C'est une étape importante. La défense va pouvoir enfin poser des questions aux juges d'instruction et aux enquêteurs. Et vous aurez remarqué que partie civile et parquet fédéral demandent encore aujourd'hui des devoirs d'enquête complémentaires. Ce qui est bien la preuve que la culpabilité de monsieur Nemmouche n'est pas évidente pour eux, elle ne l'est pas du tout pour nous (...) beaucoup de preuves ne constituent pas pour nous des preuves", a expliqué Me Henri Laquay à Antoine Schuurwegen et Denis Caudron.
Antoine Schuurwegen et Denis Caudron ont interviewé Me Adrien Masset, avocat du Musée juif de Belgique.
Les attaques répétées de la défense contre le dossier "seront contredites"
L'audition des enquêteurs et juges d'instruction sera "très instructive" et permettra de contredire les "lourdes accusations de la défense" contre le dossier de l'attentat au Musée juif de Belgique, le 24 mai 2014, a estimé l'avocat de l'institution Me Adrien Masset. "C'est le droit et le rôle de la défense d'essayer de mettre en avant quelques petites faiblesses du dossier et les enquêteurs s'en expliqueront", a commenté Me Masset avant le début de l'audience, faisant référence aux cinq preuves qui innocentent Mehdi Nemmouche selon ses avocats. "Nous ne sommes pas dans un pays où l'on falsifie les preuves pour essayer d'accabler quelqu'un qui exerce son droit au silence", a poursuivi le conseil du Musée juif.
Me Virginie Taelman, avocate du Français de 33 ans, avait notamment dénoncé une manipulation de l'image du tueur, dont le visage a été reconstitué à partir des images de vidéo-surveillance. Avant son procès, l'accusé avait annoncé qu'il réservait ses explications pour la cour. Mehdi Nemmouche s'est cependant muré dans le silence lors de son audition la semaine passée, arguant que "toutes les personnes qui auraient pu apporter une version aux antipodes de celle de l'accusation ne seront pas entendues". La cour avait refusé l'audition de certains témoins que ses avocats voulaient appeler à la barre.
"Falsifier un dossier, ce sont des termes forts", a ajouté Me Masset. "La qualité de l'enquête, menée à charge et à décharge, me paraît irréprochable. L'on verra que petit à petit les lourdes accusations de la défense sont contredites par le dossier."
L'enquête, qui tient en 37 cartons, sera exposée jusque mardi 29 janvier.
Me Gilles Vanderbeck, avocat de Nacer Bendrer, a répondu aux questions d'Antoine Schuurwegen et Denis Caudron.
Pour rappel
Mehdi Nemmouche et Nacer Bendrer, deux Français âgés de 33 et 30 ans, sont accusés devant la cour d'assises de Bruxelles d'être auteur et co-auteur de l'attaque terroriste commise le 24 mai 2014 au Musée juif de Belgique, situé rue des Minimes à Bruxelles.L'attentat avait coûté la vie à quatre personnes: Emmanuel et Miriam Riva, un couple de touristes israéliens, Dominique Sabrier, une bénévole du musée, et Alexandre Strens, un employé du musée.
Mehdi Nemmouche avait été arrêté six jours après les faits, le 30 mai 2014, à la gare routière de Marseille. Il était en possession de munitions et d'armes, dont une kalachnikov et un revolver, qui ont servi lors de l'attaque au Musée juif.
Selon l'enquête, il est celui qui a fait feu sur les quatre victimes à l'intérieur du musée, l'homme visible sur les images de caméras de vidéo-surveillance dans et autour du musée lors de l'attaque, et qui avaient fait l'objet d'un avis de recherche largement diffusé.
Mehdi Nemmouche ne conteste pas avoir possédé les armes du crime, mais il nie être le tireur.Quant à Nacer Bendrer, arrêté le 9 décembre 2014 à Marseille, il est soupçonné d'avoir fourni les armes à Mehdi Nemmouche.
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