Au lieu de laisser place au soulagement, l'annonce d'absence de viol sur une fillette de 4 ans à Schaerbeek a excacerbé les suspicions de certains parents d'élèves et personnes extérieures à l'école n°1 à Schaerbeek. Des manifestations ont eu lieu devant l'établissement scolaire, causant des dommages. Deux personnes ont été arrêtées, l'une judiciairement, l'autre, administrativement. Comment expliquer ce profond émoi et cette méfiance envers les résultats de l'enquête, voire envers les institutions telles que la justice, la police et l'école?
Au départ, il y a des parents bienveillants, qui, ne sachant expliquer la présence de sang sur les sous-vêtements de leur fillette de 4 ans, craignent le pire: leur enfant a peut-être subi une agression sexuelle dans l'enceinte de son école (école n°1 à Schaerbeek). Mais lorsque la justice annonce l'absence de viol sur la fillette au terme d'une enquête policière et d'examens médicaux, certains crient au mensonge. Depuis le début, cette affaire suscite une vive émotion, amplifiée par la rumeur, les fausses croyances, les réseaux sociaux et la méfiance envers les institutions. Sans oublier le contexte historique sensible de la Belgique lié à l'affaire Dutroux.
Face aux taches de sang, une maman craint le pire
Le jeudi 25 avril, une mère récupère son enfant à l'école primaire n°1 à Schaerbeek. Elle observe que l'enfant a du sang sur sa petite culotte. Très inquiète, elle craint que son enfant ait pu subir une agression sexuelle et retourne à l'école vers 16 heures afin de signaler les faits. La direction reçoit la mère de famille, l'écoute et avertit l'infirmière ainsi que l'administration communale. La petite fille est immédiatement emmenée à l'hôpital pour y être soignée. Comme le veut la procédure dans de tels cas, les médecins informent la police de la situation. Un expert est désigné pour procéder à la prise des échantillons médico-légaux sur la petite fille.
L'information circule dans la précipitation et laisse place à la confusion
Selon nos informations exclusives émanant d'une source proche de l'enquête, l'interprétation d'une petite phrase prononcée par la fillette serait à l'origine de l'amplification de l'affaire. En effet, lors de l'examen médical, la fillette gigotait et pour effectuer efficacement l'examen de ses parties intimes, les médecins ont procédé à une très légère anesthésie. À son réveil, la petite fille était un peu confuse. Les membres de sa famille auraient à nouveau abordé avec elle le déroulement des faits à l'école, lui demandant notamment si quelqu'un lui avait touché les parties intimes. Selon notre source, la petite fille aurait répondu "C'est un monsieur grand comme toi papa". Parlait-elle du médecin qui l'a anesthésiée? D'un membre de l'équipe médicale qui l'a déshabillée pour procéder à l'examen? Il n'en a pas fallu davantage, aux yeux de certains, pour encourager leur croyance et confirmer leur thèse du viol.
Dès cet instant, et alors qu'aucune enquête n'a pu aboutir, la rumeur circule, sous forme d'une affirmation pure et simple: "Une fillette a été violée à Schaerbeek". À la rédaction de RTLINFO, nous commençons à recevoir de nombreuses captures d'écran de messages qui se répandent à toute vitesse sur Facebook et WhatsApp. L'émoi est tel que personne ne les vérifie ni ne les contredit.
La presse tente de faire son travail d'investigation. Mais elle a pu participer malgré elle à une certaine confusion: les différents sites d'information parlent de "soupçons de viol", de "viol suspecté", semant involontairement le trouble dans l'esprit de certains lecteurs.
Les taches de sang ne sont pas dues à un viol, mais à une infection génitale
Les messages circulant sur les réseaux sociaux ne sont, eux, pas écrits au conditionnel: ils affirment que les médecins confirment qu'un viol s'est produit. Or, cette information est fausse. En effet, les médecins font état d'une infection dont souffre la fillette et qui provoque des saignements. Certaines sources ont également évoqué une "blessure", une possible excision subie dans son jeune âge ou une malformation. Mais toutes ces hypothèses ont été écartées: la fillette souffre d'une maladie rare provoquant des saignements. Les enquêteurs ne la détaillent pas auprès de la presse en raison du secret médical.
Selon notre source proche de l'enquête, outre son infection, la petite fille "va très bien". Elle présente un comportement jugé "normal" et "rassurant".
Mais certains n'y croient pas. Des appels à la manifestation sont lancés. 250 personnes, dont la plupart sont extérieures à l'école n°1, sont en colère et l'expriment. Des débordements ont lieu, des dommages sont causés. Une jeune femme de 30 ans est arrêtée judiciairement, un homme l'est administrativement et le bourgmestre décidera par la suite de fermer l'école jusqu'à la fin de la semaine et de porter plainte.
La justice annonce l'absence de viol et certains crient au mensonge
Lundi 29 avril, une audition vidéo-filmée de l’enfant est réalisée par des enquêteurs spécialisés avec l’assistance d’un interprète, afin que la fillette puisse une nouvelle fois expliquer le déroulement de faits. Sur base de cette audition, de celle de toutes les personnes intervenues dans ce dossier, des éléments recueillis par les enquêteurs et enquêtrices spécialisés ainsi que des examens médicaux, la justice annonce le résultat de l'enquête: la fillette n'a pas été violée.
Problème: les rumeurs ayant circulé sur les réseaux sociaux depuis le début de l'affaire ont laissé des traces. La graine a été plantée et l'idée d'un viol, qui a germé dans l'esprit de plusieurs parents d'élèves ainsi que de personnes extérieures à l'école, s'est petit à petit transformée en croyance. Ces personnes ont-elles commencé à douter de l'honnêteté de la police et de la justice ou s'en méfiaient-elles déjà auparavant? Face aux faits avancés par le procureur du roi, l'émotion s'est exacerbée au lieu de laisser place au soulagement.
A l'heure où nous écrivons ces lignes, et alors que l'absence de faits de viol devrait avoir rassuré et apaisé toutes les personnes inquiètes, certaines d'entre elles crient au mensonge, révélant une grande suspicion envers les institutions telles que la justice, la police, voire l'école. Une méfiance peut-être liée à un parcours parfois difficile en Belgique ou à des relations non sereines avec de telles institutions.
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