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Delphine Boël peut poursuivre son action en justice contre Albert II: "Je suis très émue"

Delphine Boël peut poursuivre son action en justice contre Albert II: "Je suis très émue"
 
 

Delphine Boël a obtenu gain de cause, la Cour constitutionnelle l'autorise à poursuivre son action contre Albert II. Selon l'arrêt, les articles du Code civil qui auraient pu l'en empêcher sont contraires à la Constitution. Elle va maintenant pouvoir contester la paternité de Jacques Boël et mener une action de reconnaissance en paternité de l'ancien souverain.

Dans un arrêt rendu mercredi, la Cour constitutionnelle vient de donner raison à Delphine Boël dans sa démarche de reconnaissance en paternité visant le roi Albert II. La juridiction avait été saisie en novembre 2014 de deux questions préjudicielles par le tribunal civil de Bruxelles. Elle estime que les articles du Code civil qui auraient pu empêcher Mme Boël d'entamer une procédure en ce sens violent la Constitution. "C’est une très belle nouvelle, je suis très émue (…) Je dois vous avouer que j’avais peur d’être déçue, mais j’ai travaillé un petit peu sur ce côté-là et j’ai essayé de voir le côté positif de la chose. Je suis vraiment très heureuse parce que ceci va aider aussi les autres enfants dans une situation pareille, enfin pareille parce je suis une situation particulière. Et ça pour moi, c’est vraiment une jouissance énorme", a-t-elle confié à notre journaliste Vanessa Costanzo.


Le droit de Delphine Boël est plus important que la paix au sein de la famille royale

La Cour constitutionnelle juge qu'une personne qui a été traitée comme l'enfant du mari de sa mère (ce qu'on appelle la "possession d'état") peut contester la paternité de cet homme. Il en va de même lorsque l'enfant a laissé perdurer la possession d'état après avoir appris que l'époux de sa mère n'était pas son père biologique. La juridiction estime dès lors que les articles du Code civil qui voudraient que la contestation de paternité soit déclarée irrecevable pour de tels motifs, sont contraires à la Constitution. S'agissant du délai dans lequel la paternité peut être contestée, la Cour a jugé qu'un enfant âgé de plus de 22 ans peut encore introduire l'action en ce sens plus d'un an après avoir découvert que le mari de sa mère n'est pas son père biologique.

Dans le cas contraire, l'enfant serait également empêché d'introduire une action en recherche de paternité contre le père prétendu, alors que le droit de chacun à l'établissement de sa filiation doit en principe l'emporter sur l'intérêt de la paix des familles et de la sécurité juridique des liens familiaux, explique la Cour. Dans ce cas-ci, cela signifie que le droit de Delphine Boël est plus important que la paix au sein de la famille royale. Le délai de prescription repris dans l'article 318 du Code civil est donc également contraire à la Constitution dans le cas d'espèce, selon elle. Celui-ci viole également l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme. "Même s'il existe ou s'il a existé des liens familiaux, l'article 318, § 2, du Code civil porte une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée de l'enfant, en raison du court délai de prescription qui pourrait le priver de la possibilité de saisir un juge susceptible de tenir compte des faits établis ainsi que de l'intérêt de toutes les parties concernées", justifie la Cour.


Entamer une action en reconnaissance en paternité contre Albert II

La Haute Cour ajoute que si l'enfant était né hors mariage et que quelqu'un en avait reconnu la paternité, il aurait pu contester cette reconnaissance bien au-delà de l'âge de 22 ans, en application des articles 330 et 331ter du Code civil. L'enfant né dans le mariage serait traité de manière moins favorable que l'enfant né hors mariage et serait donc discriminé par rapport à lui. Delphine Boël, aujourd'hui âgée de 48 ans, peut désormais contester la paternité de Jacques Boël et entamer une action en reconnaissance en paternité contre Albert II, qui est un justiciable comme les autres et ne bénéficie plus de l'inviolabilité de la personne du Roi. Elle "poursuivra la procédure", a assuré son avocat, Me Marc Uyttendaele, ajoutant que sa cliente observait "que la recherche de paternité n'est soumise à aucune autre condition que la preuve de l'existence d'un lien biologique entre une fille et son père". L'avocat d'Albert II, Me Alain Berenboom, note lui que le tribunal de 1ère instance de Bruxelles va à présent devoir décider si la demande de la requérante, qui est donc recevable, est bel et bien fondée. Il constate en outre que cette décision pose un problème de sécurité juridique et qu'en conséquence l'article 318 du Code civil devra à nouveau être revu.


 

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