Le duel des Premiers ministres organisé a donné lieu à des échanges crispés entre le président du PS Elio Di Rupo et son successeur à la tête du gouvernement fédéral, le président du MR Charles Michel. En dépit des divergences qui les opposent, les deux chefs de file n'ont émis aucune exclusive l'un vis-à-vis de l'autre, soucieux de participer, chacun en ce qui le concerne, à un gouvernement au service du dynamisme économique, de la protection sociale et du défi climatique.
Le Premier ministre sortant, Charles Michel, a redit sa disposition à "assumer (à nouveau) des responsabilités" si un projet s'avère possible avec l'objectif d'assurer le développement et le dynamisme économique du pays et rendre les citoyens plus libres, moins inquiets pour leur emploi et la protection sociale. Son prédécesseur, Elio Di Rupo, a plaidé en faveur d'un gouvernement doté d'un "programme le plus progressiste possible", soulignant que les gens avaient "assez souffert". Il a précisé qu'"aucune exclusive" ne serait prononcée par lui, laissant cela à la N-VA. Pour Elio Di Rupo également, la protection sociale, le développement économique, le défi climatique et des libertés individuelles accrues doivent motiver l'action de la future équipe.
Ces plaidoyers relativement consensuels ont conclu une petite heure de débat plutôt crispé entre les deux chefs de file qui se sont lancé à la tête leurs bilans respectifs et ont opposé l'un à l'autre des programmes souvent divergents.
Il a beaucoup été question de pouvoir d'achat, Charles Michel dénonçant l'"illusion de la gratuité" proposée par le parti socialiste dans les transports et en matière de santé pour revaloriser le pouvoir d'achat, qui selon les réformateurs mettrait à mal l'économie. Il a aussi fustigé les conséquences pour l'emploi de la proposition socialiste d'instaurer un salaire minimum brut à 14 euros de l'heure. "La gratuité que nous proposons coûterait 500 millions d'euros, c'est vingt fois moins que votre quotité exemptée" qui caractérise la réforme fiscale du Mouvement réformateur budgétée à 10 milliards d'euros, a répliqué Elio Di Rupo. "Cela signifie que nous voulons vingt fois plus que vous une réforme fiscale", a rétorqué M. Michel. "Ce que nous proposons, c'est de revaloriser le pouvoir d'achat des citoyens, vous, c'est offrir des cadeaux aux entreprises", a conclu sur ce thème M. Di Rupo, regrettant que son homologue parle de "charges" plutôt que de "cotisations" sociales.
En matière de pensions, les deux chefs de file ont admis qu'il importait de trouver un système dérogatoire à l'allongement des carrières pour les métiers pénibles. Soucieux de ramener l'âge légal de la pension à 65 ans, Elio Di Rupo s'est inquiété de voir le président de la N-VA Bart De Wever indexer cet âge après 67 ans alors qu'il est par ailleurs en faveur de la suppression de l'indexation des salaires. "Et vous avez dit vouloir reconduire cette majorité avec la N-VA", s'est-il inquiété auprès de Charles Michel. "Ce que j'ai dit, c'est que je souhaitais un projet où on mettait le communautaire de côté. Je veux un débat social, économique, voir comment on finance notre protection sociale demain et après-demain", a-t-il précisé annonçant d'autres réformes en faveur de l'allongement des carrières.
Enfin, l'échange entre les deux hommes a été assez vif en matière de migration, Charles Michel assumant la politique menée avec le secrétaire d'Etat Theo Francken (N-VA), au service du contrôle des frontières, et loin du "racolage électoral" de "certains partis de gauche", une allusion à un tract à visée communautaire distribué mercredi par Ecolo. Elio Di Rupo a dénoncé la "très mauvaise gestion des flux migratoires au parc Maximilen et à la gare du Nord", suspectant Theo Francken d'avoir "volontairement mal géré, en limitant l'examen, pour créer davantage de difficultés". Il a également dénoncé l'enfermement en centres fermés de familles avec enfants. Charles Michel a répliqué en invoquant la difficulté d'une part de gérer des transmigrants qui refusent de demander l'asile, et d'autre part en rappelant que le gouvernement Di Rupo avait lui-même débloqué des budgets pour des unités familiales en centres fermés.
Le débat a été brièvement interrompu par une action de quelques gilets jaunes venus se faire entendre sur le plateau.
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