Les députés ont voté: ils soutiennent le Pacte de la migration de l'ONU, au contraire de la N-VA, qui le rejette. Que vont faire les nationalistes flamands? Charles Michel ira-t-il malgré tout à Marrakech exprimer le soutien de la Belgique à ce pacte? A quel prix?
Le Pacte sur les migrations, négocié sous l'égide de l'ONU, menace de faire chuter la coalition gouvernementale. Le Premier ministre Charles Michel est mis sous pression par les nationalistes flamands de la N-VA opposés à ce texte. Charles Michel a dit ce matin sur notre antenne que "la balle est dans le camp de la N-VA", mais les nationalistes flamands ne veulent pas être le parti qui aura fait chuter le gouvernement. Alors, comment sortir de l'impasse?
Le contexte, d'abord: pour rappel, un Pacte sur les migrations a été adopté en juillet à New York par l'ONU. Il est non contraignant et réaffirme la souveraineté des États dans la conduite des politiques migratoires. Mais ce pacte fait l'objet de critiques dans plusieurs pays dont les gouvernements défendent une ligne dure en matière de politique d'asile et d'accueil des migrants. Ces pays disent notamment craindre que le pacte pour une migration "sûre, régulière et ordonnée" ne consacre un "droit à la migration". Le gouvernement belge affirme adhérer à ce pacte, mais la N-VA le refuse, menaçant donc la majorité gouvernementale belge... Pour sortir de l'impasse, le Premier ministre Charles Michel a demandé l'avis du parlement fédéral sur la question. Cet avis, dont le vote a lieu en deux temps (ce mercredi et ce jeudi ndlr), constitue la position officielle de la Belgique dans ce dossier.
A 17h00, les députés se sont prononcés: ils soutiennent ce pacte. La commission des Relations extérieures de la Chambre a approuvé la résolution sur le Pacte de la migration par une majorité de rechange sans la N-VA.
A 15h00, la N-VA, avait répété une ènième fois qu'elle ne signerait pas ce pacte. "Le chef de groupe N-VA, Peter De Roover, a pris la parole pour exposer la position de son parti sur la question, avait rapporté notre journaliste Loïc Parmentier, envoyé sur place pour RTL INFO. "Avec la N-VA dans le gouvernement, la Belgique ne va pas approuver le pacte et nous allons voter contre", a affirmé le chef de file.
En revanche, Ecolo-Groen, le sp.a et le cdH avaient déjà annoncé qu'ils approuveraient mercredi après-midi, avec le MR, l'Open Vld et le CD&V, un amendement déposé par le chef de groupe MR David Clarinval à cette résolution.
Que faut-il craindre ?
Comment va réagir la N-VA, isolée, seule à avoir rejeté ce pacte?
On craint une crise profonde suite à cette division au sein de la majorité fédérale, mais on n'en connait pas encore l'ampleur. Car pour l'instant, tout se passe en coulisse. Devant les caméras, la N-VA a calmé (un peu) le jeu avant et pendant la réunion. Aux questions de notre journaliste Loïc Parmentier, envoyé en commission Relations extérieures du parlement fédéral pour RTL INFO: "Allez-vous annoncer que la N-VA quitte le gouvernement ?", Peter De Roover a répondu "Non". Il est chef de groupe N-VA à la Chambre, et le seul à parler au nom du parti nationaliste flamand.
Si dans les circonstances actuelles, Charles Michel se rend à Marrakech, il ne sera pas couvert par le gouvernement, a cependant sous-entendu Peter De Roover. De plus en plus compliqué. Voici ce qu'en pense Dave Sinardet, politologue :
Que faut-il comprendre ?
Entre les lignes, on peut comprendre qu'il s'agit d'une guerre de communication, que la N-VA ne veut pas être le parti qui plonge le pays dans la crise. Et Charles Michel, Premier ministre, ne veut pas être celui qui dissout un gouvernement divisé, qui exclut la N-VA.
En d'autres termes, la N-VA va voter contre le pacte migratoire mais n’estime pas qu’elle doit quitter le gouvernement. Elle estime que c’est Charles Michel qui doit prendre acte de cette décision et c’est lui qui doit dire si la N-VA a encore sa place au gouvernement. On est en train d’assister à un jeu du chat et de la souris. Personne ne veut prendre la responsabilité de la fin de ce gouvernement.
"La N-VA se trouve entre l'enclume et le marteau"
La question a été posée ce matin sur Bel RTL à Pierre Vercauteren, politologue. "Faire tomber le gouvernement est un exercice très risqué pour la N-VA. Le parti se tient sur le fil du rasoir. Soit, il fait tomber le gouvernement et risque d'en payer la note sur le plan électoral, soit il reste au gouvernement malgré que Charles Michel se rende à Marrakech et dans ce cas-là, il risque de s'aliéner une partie de son électorat. Le problème fondamental de la N-VA est que depuis que le parti participe au gouvernement, il se trouve entre l'enclume et le marteau. Il participe à un niveau de pouvoir fédéral alors qu'il a dans ses statuts la fin de la Belgique. Mais d'un autre côté, ayant remporté successivement les élections, il doit aller au pouvoir. Et dans le cas actuel, il est obligé d'assumer la politique prise par le gouvernement au cours des dernières années, et qui a déjà mis en oeuvre un certain nombre de dispositions du pacte de l'ONU, mais il doit montrer aussi, pour récupérer des voix parties au Vlaams Belang, de renoncer au Pacte. La N-VA joue sur les contradictions et l'ambiguïté", a analysé Pierre Vercauteren.
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