Le secteur de la santé mentale s'est senti en grande partie livré à lui même durant la première vague de la pandémie. Cela a eu des conséquences directes sur nombre de personnes dont la situation s'est dégradée, est-il ressorti jeudi des travaux de la commission spéciale Covid-19 du parlement bruxellois.
Les membres de cette commission parlementaire spéciale chargée d'examiner la gestion de la première vague de la pandémie de Covid-19, à Bruxelles, ont repris jeudi leurs travaux, en entendant trois représentants du secteur de la santé mentale et de la coordination des sans-abri. Ils ont entendu et longuement interrogé Sophie Vankrienge, présidente de l'association des institutions bicommunautaires de Bruxelles-Capitale travaillant en faveur des personnes handicapées, Yahyâ Hachem Samii, directeur de la ligue bruxelloise pour la santé mentale, et François Bertrand, directeur de Bruss'Help.
On a constaté sur le plan physique et relationnel une régression
Sophie Vankrienge a livré une série d'exemples concrets d'une situation qui s'est révélée "très compliquée" pour les familles. Certaines d'entre elles ont rencontré beaucoup de difficultés lors de la reprise à domicile, durant une période prolongée, pour rompre l'isolement de la personne handicapée. Les personnes n'ont souvent pas été à même de comprendre une situation très déstabilisante et angoissante pour elles en raison de la suppression des activités habituelles, de la distance à observer à table, de la suppression des visites...
Pour les personnes sourdes et les autistes, le port du masque a constitué une grande difficulté. "On a constaté sur le plan physique et relationnel une régression de la stimulation et une perte de repères dans le temps", a-t-elle résumé. Au niveau des directives, "les textes étaient très difficiles à comprendre au point que nous avons consulté des sites français", a-t-elle ajouté.
Des patients dans un "étant de délabrement important" ou qui ont "disparu des radars"
Le directeur de la Ligue bruxelloise pour la santé mentale - carrefour d'une cinquantaine d'institutions d'aide et des soins pour la santé mentale -, Yahyâ Hachem Samii, a quant à lui indiqué que les effets de la pandémie se sont davantage ressentis à la fin de l'été. Sous l'effet de la diminution du volume des consultations en présentiel, on s'est aperçu à la reprise de septembre, d'une part qu'une série de patients se trouvaient "dans un état de délabrement important" et d'autre part que d'autres (par exemple des jeunes, ou des personnes confrontées à des situation de conflits intra-familiaux) avaient "disparu des radars".
Autre leçon des premiers mois de la crise: la téléconsultation ne compense pas l'absence de l'accueil en présentiel. A ses yeux, on s'aperçoit aussi que penser la santé mentale dans l'urgence est "inopérant". Ainsi, le secteur constate que les effets de la pandémie s'ajoutent à ceux, toujours ressentis actuellement, de la crise économie de la fin de la décennie précédente.
Au nom de Bruss'help, l'organisme chargé de coordonner les dispositifs d'aide d'urgence et d'insertion aux personnes sans-abri en Région bruxelloise, François Bertrand a annoncé le maintien d'une capacité accrue d'hébergement au cours des prochains mois. Selon lui, ce sera équivalent à la capacité proposée au pic de la crise lors de la première vague (ndlr: un peu plus de 3.300 places en mai dernier). A ses yeux, les enjeux de la deuxième vague dans le secteur porteront sur le renforcement de la prévention, également dans les domaines plus large de la santé et de la santé mentale, et des équipes de rue. Il a insisté sur le fait que les communes et les CPAS seront "des acteurs essentiels pour les prochains mois".
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