Le policier qui a tiré sur Mawda, la fillette kurde, est pointé du doigt. Les syndicats de police réagissent. Un reportage de Nathanael pauly et Eric Poncelet pour RTLinfo.
Mawda, la fillette kurde décédée par balle jeudi lors d'une course-poursuite entre forces de l'ordre et migrants, a été touchée par un tir policier. Une enquête a été confiée à la police des polices. "Le policier qui a tiré est défait et abattu. Il n'a jamais voulu, ni imaginé cela", a expliqué le procureur général de Mons Ignacio De la Serna, cité par l'agence de presse Belga, au cours d'un point presse au parquet de la ville mardi.
"C'est un évènement tragique que tout le monde regrette, y compris les policiers. Le tireur, dont l'intention était de stopper ce véhicule, a été entendu et le juge d'instruction réserve toute inculpation avant d'avoir tous les éléments de l'enquête en sa possession", a-t-il ajouté. Les conclusions de l'autopsie ont permis de lever tout doute sur l'origine de la balle qui a atteint Mawda Shawri, deux ans, à la joue.
Selon le parquet, il n'y a eu qu'un seul tir, après "une course poursuite dangereuse de 60 km" sur l'autoroute E42 en direction de Maisières, un faubourg de Mons.
Les syndicats de police réagissent
Les syndicats de police ont voulu partager l'émotion de leur collègue, sans évoquer les détails de l'enquête en cours. "Le policier ou la policière qui a fait usage de son arme, c'est un choc dans un premier temps et une blessure qui va mettre des années à s'estomper, mais qui ne disparaîtra jamais", a expliqué Vincent Gilles, président du SLFP Police, syndicat libre de la fonction publique.
Les zones d'ombre restent nombreuses après la mort de la petite fille. Le policier était-il autorisé à ouvrir le feu sur la camionnette qui transportait des migrants? A cette question, les syndicats ont répondu que "des juges ont estimé à plusieurs occasions en Belgique qu'une personne avait utilisé son véhicule comme une arme. Donc techniquement, la lecture des bases légales nous permet de dire que oui, le tir était autorisé. Maintenant il faut voir effectivement les circonstances des faits", a ajouté Vincent Gilles.
Pour les syndicats, Mawda n'a pas été la victime d'une chasse aux migrants. "C'est une intervention tout à fait courante pour les policiers de la route. Il y a un constat d'une situation où un véhicule présente une plaque qui n'est pas correcte et fait donc l'objet d'une attention particulière. Et c'est le point de départ de l'intervention. On n'est pas dans un phénomène où on est en train de chercher quelque chose en particulier", a expliqué Eddy Quaino, secrétaire permanent CGSP Police.
Pour les syndicats, il est impératif d'avoir rapidement toutes les réponses et d'en tirer les enseignements pour éviter qu'un tel drame ne se reproduise.
Rappel des faits
Jeudi, entre 2h et 3h du matin, des policiers ont pris en chasse une camionnette suspecte pendant un long moment avant de pouvoir l'arrêter. A son bord, une vingtaine de migrants kurdes, dont 4 enfant. Mawda est décédée dans l'ambulance la transportant à l'hôpital. "Il n'y avait pas d'armes dans la camionnette" et "un seul coup de feu a été tiré, par un policier", a pour sa part déclaré à l'AFP l'avocat de la famille, Olivier Stein, joint par téléphone.
"Le parquet n'aurait pas fait preuve d'autant de confusion sur la façon dont la petite fille était morte si on avait posé directement la question à mes clients, qui ont été traités plus comme des auteurs d'une infraction que comme des victimes", a-t-il ajouté. Les autorités judiciaires ont indiqué à l'avocat que la balle a été tirée en pleine course-poursuite, au moment où la camionnette roulait à 90 km/h, depuis une des voitures de police dont les plus avancées se trouvaient à hauteur de la camionnette.
Police des polices
Mardi, M. De la Serna et le procureur du roi de Mons-Tournai, Christian Henry, sont venus devant la presse fournir quelques éclaircissements à l'affaire qui a provoqué un vif émoi. Dans un premier temps, le parquet de Tournai avait indiqué que le décès n'était pas lié à une balle, en se basant sur un rapport préliminaire d'un urgentiste, avant de se rétracter mais de rester "très prudent" sur l'origine du tir mortel.
Une enquête a été confiée au "Comité P", la police des polices. "Nous attendons un rapport balistique et les auditions des autres policiers dont nous n'avons pas encore eu l'accès", a précisé M. Henry, selon des propos rapportés par Belga. Dans la nuit de jeudi à vendredi, l'attention des policiers avait été attirée par les fausses plaques de la camionnette, stationnée sur un parking d'autoroute dans les environs de Namur. Le véhicule a démarré à l'approche des forces de l'ordre, début d'une course-poursuite à vive allure pendant de longs kilomètres.
Le véhicule suspect a tenté à plusieurs reprises de provoquer un accident, selon les premières constatations, et n'a pas répondu aux injonctions des policiers. Il a finalement été intercepté après l'intervention de renforts, en s'arrêtant de lui-même. Mais le conducteur n'a pas été identifié. "C'est la loi du silence, personne ne veut dire qui conduisait ce véhicule", a souligné Christian Henry.
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