De plus en plus d'entrepreneurs s'intéressent aux travailleurs dans les prisons, main d'œuvre très avantageuse. Faut-il privilégier la réinsertion professionnelle ou lutter contre cette forme de dumping social ?
Il y a quelques jours, cent chefs d’entreprises devaient être reçus à Lantin et auraient pu y voir de près le savoir-faire des détenus pour le travail du bois, le conditionnement des confiseries, l’emballage ou encore la mise sous enveloppe. Ils auraient sûrement retenu un argument-choc : le coût de la main-d’œuvre en prison est de 5€/heure.
"La Chambre de commerce ne peut pas promouvoir le dumping social"
La visite organisée par la Chambre de commerce a cependant été annulée. "La Chambre de commerce ne peut pas promouvoir le dumping social et ne peut pas s’associer à une initiative qui aurait pour but de faire l’apologie du travail très bon marché", a expliqué Christophe Mausen, directeur commercial de la Chambre de commerce et d’industrie pour la zone Liège-Verviers-Namur, au micro de Vincent Jamoulle pour le RTLinfo 13H.
La colère des entreprises de travail adapté
La raison de ce revirement de la Chambre de commerce ? La colère des entreprises de travail adapté. Elles proposent le même genre de services effectués par des personnes handicapées. Le coût de la main-d’œuvre est de 12,5€/heure. Le secteur offre 11.000 emplois en Belgique francophone et craint de voir de plus en plus de clients se diriger vers les prisons. "Les personnes qui sont ici, elles n’ont pas choisi de venir ici, c’est la nature qui a fait que malheureusement elles se retrouvent ici. Le détenu quelque part à un moment donné il a eu le choix et il a fait le mauvais choix, il doit en assumer les conséquences", a fait remarquer Florence Prignon, directrice de l’entreprise de travail adapté "Village liégeois".
Derrière les barreaux, il y a plus de détenus qui veulent travailler que de travail à leur proposer
A la Régie du travail pénitentiaire, douze délégués commerciaux sont chargés de démarcher les entreprises. Derrière les barreaux, il y a plus de détenus qui veulent travailler que de travail à leur proposer. Le département refuse de se voir comme un concurrent. "Les établissements pénitentiaires vont occuper un peu plus d’un millier de détenus dans la Belgique, si on devait faire le compte de la main d’œuvre qui s’en va à l’étranger pour des gens qui sont encore payés bien moins cher que chez nous et qui travaillent dans des conditions atroces, je crois que le vrai débat doit se situer là", a indiqué Alain Dachelet, délégué commercial à la Régie du travail pénitentiaire.
Travail en prison, travail adapté, les deux secteurs pourraient s’entendre et se partager le marché. Mais entre les deux, la discussion est jusqu’ici difficile.
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