Les enfants sont les premières victimes de la lenteur judiciaire. Les tribunaux des familles manquent de magistrats et à cause de cela, le traitement des dossiers s'allonge. On enregistre jusqu'à 5 ans de retard pour le jugement d'une affaire en appel à Bruxelles, et jusqu'à un an à Liège. Pendant ce temps, les enfants peuvent se trouver au cœur d'un conflit qui s'éternise.
Dans un monde idéal, un dossier pour un divorce ou autre conflit familial devrait prendre 6 mois pour être traité. Mais la réalité est toute autre : à Bruxelles, aujourd'hui, le jugement d'une affaire en appel section famille peut prendre jusqu'à 5 ans de retard. A la cour d'appel de Liège, il peut prendre entre 10 mois et 1 an de retard. La raison? Le manque de magistrats.
"Ils sont otages de ces conflits entre leurs parents"
Ce délai inquiète le délégué aux droits de l'enfance. Sur son bureau, Bernard Devos a plusieurs dizaines de dossiers concernant des enfants victimes du divorce de leurs parents. "C'est clair que pour des enfants, le fait que cette justice prenne du temps, beaucoup trop de temps, ça les laisse au milieu de conflits conjugaux, mais qui ont des répercussions sur la vie familiale. Ils sont otages, finalement, de ces conflits entre leurs parents, ils sont vraiment instrumentalisés parfois par l'un ou l'autre. Ils sont au centre de conflits de loyauté qui les dépassent et sur lesquels ils n'ont pas de pouvoir. La lenteur, le fait que les enfants n'aient pas rapidement l'occasion de donner leur point de vue, alors qu'ils ont le droit de s'exprimer, même avant 12 ans, ils ne sont malheureusement pas suffisamment informés, mais il n'empêche qu'ils n'ont pas la possibilité de s'exprimer, ils restent avec beaucoup de ressenti négatif au sein d'un conflit familial qui est assez compliqué à vivre pour eux".
"La situation pour les enfants, c'est absolument dramatique"
Pour maître Stéphanie Maure, administratrice chez avocats.be en charge du droit de la famille, les conséquences de ces délais peuvent être désastreuses: "La situation pour les enfants, c'est absolument dramatique, dans la mesure où on ne peut pas avoir des décisions excessivement rapides, d'une part parce qu'il faut étudier le dossier, il faut pouvoir faire des analyses complémentaires, ça se justifie également, si on peut appeler ça une justification, parce qu'on est dans un manque réel de magistrats et d'audiences. Les enfants vont se retrouver dans un système contraint, qui n'est pas celui qu'ils souhaitent, tant qu'une décision ne sera pas prise. Si cette décision-là est négative, et qu'on est obligé de se pourvoir en appel, cette situation contrainte va encore devoir perdurer. Et quelques mois plus tard devant la cour d'appel, le magistrat va dire, mais enfin, le mineur est resté dans cette situation, pourquoi faudrait-il l'en changer?"
Plusieurs avocats envisagent d'attaquer l'Etat belge en justice pour défaut de cadre légal de magistrats, c'est-à-dire pour manque de magistrats désignés par l'exécutif.
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