Acheter des cahiers, y écrire quelques notes, recevoir des factures, signer un contrat à la banque, commander des articles en ligne, voilà de nombreuses habitudes que l’on a au quotidien et qui ont toutes un point commun: l’utilisation du papier ou carton. A l’heure des marches pour le climat et des nombreuses prises de positions, plusieurs questions se posent. Le Belge consomme-t-il trop de papier? Fait-il des efforts? Quelle est la place du papier recyclé?
L’évidence est là, le papier fait partie de notre quotidien. Il est présent dans de nombreuses habitudes. S’il est difficile de connaître la consommation de papier exacte des Belges, on peut tenter de l’approcher, en prenant en compte la quantité de vieux papiers collectés chaque année. C’est l’organisme Fost Plus qui prend en charge cette collecte pour tout le pays.
En 2017, Fost Plus a collecté 623.921 tonnes de déchets papiers (emballages, boîtes en carton, sacs en papier, journaux, magazines et imprimés publicitaires). Un chiffre qui tend à la baisse ces dernières années, puisqu’on comptait 644.088 tonnes en 2016, et 651.462 tonnes en 2015. De même, Fost Plus estime que chaque Belge a trié 55 kg de papier et cartons en 2017 (contre 57,16 kg en 2016 et 58,12 kg en 2015).
Pour Fatima Boudjaoui, la porte-parole de Fost Plus, plusieurs raisons expliquent cette diminution. "C’est maintenant ancré dans les mœurs, estime-t-elle. Le Belge est conscient de l’importance du tri, surtout pour le papier-carton d’ailleurs, puisque tous ces emballages peuvent être déposés devant chez lui une fois par mois, lors des collectes". L’augmentation de la digitalisation y est aussi pour quelque chose, puisque cela engendre une baisse des ventes de journaux. Il y a donc moins de vieux papiers à collecter.
Il faut cependant considérer le phénomène plus largement, car la consommation des ménages n’est pas la seule dont il faut prendre en compte. "Il y a énormément de papier-cartons qui ne sont pas des emballages ou magazines, mais qui proviennent des entreprises industrielles", détaille Fatima Boudjaoui.
La part du papier recyclé au niveau belge, doit tourner autour des 50-60%
Plus d'un million de tonnes de papier recyclées en 2017
L’Indufed (Fédération de l’industrie durable) représente les secteurs du verre, du carton et du papier. Elle englobe la Cobelpa, l’association des fabricants de pâtes, papiers et cartons de Belgique. Son directeur, Firmin François, dresse un aperçu plus global de ces collectes de papiers, qui prend donc en compte la consommation des ménages et celle des entreprises. "On a collecté en 2017 environ 1.886.000 tonnes de vieux papiers. Cela a permis de recycler au total 1.201.000 tonnes". Un chiffre qui est relativement constant au fil des années.
Le recyclage du papier est donc une tendance qu’il ne faut pas négliger. Difficile là aussi de connaître la place du papier recyclé en Belgique, car il s’agit d’un marché assez global, selon Firmin François. "Mais on peut avoir un raisonnement au niveau européen, qui permet d’approcher ce qui se passe en Belgique", précise-t-il. "On considère que la moitié de ce que l’on produit en Europe est recyclé. La part du papier recyclé au niveau belge, doit donc également tourner autour des 50-60%".
Il y a beaucoup plus d’emballages en carton, parce qu’aujourd’hui, il y a le commerce en ligne
"Le plus grand défi pour le papier, c'est l'e-commerce"
Il le confirme lui aussi, la consommation de papier en tant que telle baisse. "Surtout dans les papiers graphiques. Il y a moins de journaux, de magazines, donc il y a moins de vieux papiers". A côté de cela, un autre phénomène vient également changer les équilibres. "Il y a beaucoup plus d’emballages en carton, parce qu’aujourd’hui, il y a le commerce en ligne. Beaucoup de gens commandent sur Amazon, font venir leur repas par des entreprises spécialisées. Dans le flux des déchets, on retrouve donc de plus en plus de cartons et de moins en moins de papiers graphiques".
"Le plus grand défi pour le papier, c’est l’e-commerce", confirme Jeroen Verhoeven, chargé de mission écosystème chez Greenpeace. "Et cela pousse beaucoup à la consommation, car il y a de plus en plus d’emballages en carton à usage unique". Il ne pointe cependant pas du doigt le secteur. "C’est difficile pour eux de leur demander de faire des efforts pour limiter leur consommation, puisque c’est leur business modèle".
Cependant, Jeroen Verhoeven émet quelques recommandations pour éviter de surconsommer. "La priorité c’est d’utiliser moins, puis de réutiliser les emballages, puis de penser au recyclage. Malheureusement, on remarque souvent que ces entreprises donnent la priorité au recyclage plutôt qu’à la réduction de leur consommation".
La Chine est un gros importateur de papier. Quand ils nous livrent leurs produits par bateaux, ils repartent en chargeant des matières qu’ils peuvent recycler, comme les vieux papiers
L'offre et la demande influencent le secteur
Chez nous, il existe huit usines de production de papier (Virton, Malmedy, Stembert, Lanaken, Duffel, Termonde, Gand et Huizingen). "Celles de Gand et de Termonde s’occupent du recyclage", détaille Firmin François, le directeur de l’Indufed. Deux usines produisent également du papier sanitaire, à Stembert et à Duffel. "Ces produits sont destinés à des marchés locaux. Puisque quand vous avez du papier toilette, de l'essuie-tout ou des mouchoirs en papier, vous transportez de l’air. Votre zone de transport est donc réduite".
Les lois du marché, l’offre et la demande, restent bel et bien au centre des préoccupations. Et ce sont bien elles qui vont influencer le secteur. "Le papier recyclé ne reste pas uniquement en Belgique. Une ligne de production de papier c’est 300 à 400 mille tonnes. Ces produits-là sont au moins faits pour le marché européen. Autrement, il n’y aurait pas de débouchés".
Il existe également un marché des vieux papiers. "La Chine est un gros importateur de papier. Quand ils nous livrent leurs produits par bateaux, ils repartent en chargeant des matières qu’ils peuvent recycler, comme les vieux papiers", explique Firmin François. Et cela marche dans les deux sens. "On importe aussi du papier venu de l’étranger… De la France, des Pays-Bas et de l’Angleterre. Cela permet de diversifier les sources d’approvisionnement et d’avoir suffisamment de matière à traiter dans les usines".
"On produit pas mal de carton ondulé"
La Belgique ne produit par contre pas tous les types de papiers, neufs ou recyclés. Par exemple, la classique feuille A4 blanche que nous utilisons quotidiennement n’est pas belge. "Il n’y a personne qui produit le A4 en Belgique", explique Firmin François. "Dans le monde, vous avez quelques gros joueurs qui ont des capacités de près de 1 million de tonnes, comme la firme Navigator au Portugal. Vous ne savez pas concurrencer cela".
Chez nous, on produit du papier graphique, du papier magazine ou journal, et du papier sanitaire. La plupart des cartons d’emballages sont également produits sur notre territoire. "On produit pas mal de carton ondulé, constitué de trois couches de papier. La grande majorité de ce carton est issue de vieux papiers". Exporter ces cartons serait trop coûteux, puisqu’ils contiennent beaucoup d’air, ce qui augmente le poids des matériaux, et fait grimper le prix du transport.
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