Cette journée d'actions syndicales, avec des grèves en front commun dans de très nombreux secteurs, ne ressemble pas vraiment aux précédentes. Rouges, verts et bleus marchant ensemble en scandant des slogans à Bruxelles, c'est fini. Place à la tactique "gilets jaunes" : de petits mouvements de blocage disséminés un peu partout dans le pays, avec le jaune se mêlant aux trois autres. Aucune des personnes (ou presque) rencontrées ce matin par nos journalistes sur le terrain, des grands dirigeants syndicaux aux plus petits délégués, n'ont renié les liens entre les revendications des uns et des autres.
Robert Vertenueil, le président de la FGTB, assure son soutien "total" aux gilets jaunes : "Notre intention n'est pas du tout de récupérer le mouvement des gilets jaunes. Il n'y avait pas de gilets jaunes il y a un mois et demi quand nous avons adopté notre plan d'action. Nous allons donc poursuivre et si nous nous trouvons à côté des gilets jaunes c'est tant mieux parce que nous disons la même chose. Soutien total (aux gilets jaunes) à partir du moment où on est sur ces 2 revendications qui sont un besoin d'augmentation du pouvoir d'achat et de justice fiscale dans ce pays, ils ont 100% raison. C'est ce que nous avons toujours dit. On voit bien que l'ensemble de la population est aujourd'hui complétement outré devant les situations de pauvreté et de pouvoir d'achat qui a diminué, quoi qu'on puisse en dire."
Pour Marie-Hélène Ska, la secrétaire générale de la CSC, les gilets jaunes sont nés car les syndicats n'étaient plus écoutés. "On nous répète "concertation" tout le temps mais on ne prend pas au sérieux le rôle des organisations syndicales. Avec l'effet de retour de bâton aujourd'hui, c'est que les citoyens se mobilisent tous azimuts pour dire que ce que nous disons depuis 4 ans c'est la réalité. Que les fins de mois elles sont difficiles. C'est en partie la conséquence de toutes ces années et ce ne sont pas juste les 4 dernières années. Le malaise il est profond. Il remonte à des dizaines d'années maintenant. Mais il s'est amplifié ces dernières années. Je pense que (les gilets jaunes) expriment de manière encore plus directe que nous le faisons le malaise qui est celui qu'on ressent aujourd'hui."
Sur le terrain, mêmes revendications et mêmes méthodes
Résultat : à Feluy, Seneffe, devant le ministère des finances de Charleroi, les actions de blocage et de filtrage des syndicats ont lieu ce vendredi dans des lieux communs avec ceux des gilets jaunes. Parfois, les deux mouvements ont même collaboré, comme au rond-point de Soignies ou à celui du zoning de Courcelles.
Denis Uvier, délégué CSC présent à Courcelles, va dans le sens de ses responsables syndicaux : "Il faut se mettre ensemble pour défendre les points de vue de tout le monde et pas séparer les deux."
Jean-Marc, gilet jaune de Courcelles, en est ravi car les syndicats, structurés comme ils le sont, peuvent se permettre des actions interdites aux gilets jaunes : "Ça fait du bien (le soutien syndical) parce que nous, comme c'est un soutien de longue durée, on ne fait pas de blocages, mais eux peuvent se permettre de bloquer. Tandis que nous pas. On veut que le citoyen aille travailler."
Gino, un autre gilet jaune présent, apprécie aussi cette nouvelle collaboration : "C'est agréable, on discute, on échange nos idées, et puis voilà. Puis on voit des personnes qui viennent nous rejoindre. Aujourd'hui ils sont en couleur rouge et puis d'autres jours ils sont en jaune avec nous", explique-t-il, rejoint pas un délégué FGTB : "C'est le combat de tous. Il faut bien comprendre que nous sommes citoyens avant d'être délégués."
Finalement, Gino résume : "Clairement, le combat est le même. On veut plus de pouvoir d'achat principalement et une baisse des taxes."
En effet, officiellement, les syndicats se battent ce vendredi pour une hausse du pouvoir d'achat, une hausse du salaire minimum, le retour des pensions à 65 ans, la baisse de la TVA sur l'électricité et des accises sur le diesel. Des revendications communes donc.
Et comment se faire entendre ? David Laurino, président de la délégation syndicale Setca chez ABB : "On fait notre possible dans toutes les régions en Belgique pour bloquer l'économie belge. Même stratégie que les gilets jaunes."
Seul endroit où nos équipes ont constaté une moins bonne collaboration entre syndicats et gilets jaunes : à Villers-le-Bouillet, où les syndicats ont préféré faire bande à part.
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