En ce moment
 
 

Violences policières en Belgique: voici le profil des agents impliqués dans ce type de faits

Violences policières en Belgique:  voici le profil des agents impliqués dans ce type de faits
©Belga
 
 

RTL INFO s'est penché sur les discriminations et les violences policières alors que s'est ouvert cet après-midi le procès d'un policier poursuivi pour s'en être pris violemment à un migrant soudanais en avril dernier. Selon les derniers chiffres d'Unia, le service public qui lutte contre les discriminations, 81 dossiers mettant en cause les forces de l'ordre et la justice ont été ouverts l'année dernière. C'est 9 de plus que l'année d'avant.

Ce vendredi après-midi, un policier impliqué dans des faits de violences policières présumées à l'encontre d'un migrant soudanais, survenus le 21 avril dernier à Bruxelles, comparait devant le tribunal correctionnel de Bruxelles pour coups et blessures volontaires. Un an de prison a été requis par le procureur, la défense demande le sursis. La décision devrait tombée le 26 juin ou le 17 juillet. 

Pour rappel, le 21 avril, vers 22h15, place Anneessens, selon plusieurs témoignages, un jeune migrant soudanais a été brutalisé lors de son interpellation par une patrouille de police. 

Le jeune homme aurait reçu des coups et son GSM a été détruit. Les policiers l'auraient ensuite embarqué dans une camionnette et l'auraient fait descendre moins de 30 minutes après, à un kilomètre de là. L'homme contrôlé, qui tentait de rejoindre un hôtel mis à disposition des sans-abris pour y passer la nuit, a été retrouvé assis au sol, en larmes. Il a déclaré avoir été gazé par les policiers. Il s'est rendu aux urgences pour faire constater des lésions multiples à l'œil et sur le corps.

Dans la foulée, quatre policiers ont été interpellés. L'un des agents a été suspendu par la zone de police Bruxelles Capitale/Ixelles. Il doit désormais comparaître devant le tribunal et risque jusqu'à 3 ans de prison. Cette actualité survient chez nous alors que les manifestations se succèdent aux Etats-Unis et à travers le monde suite à la mort de Georges Floyd.

Une augmentation du nombre de dossiers

Unia, le service public qui lutte contre les discriminations, a accepté de dévoiler ses chiffres 2019 par rapport aux discriminations dont des citoyens disent avoir été victimes lors de contacts avec la police (et avec la justice). En 2019, 81 dossiers ont été ouverts par Unia dans ce domaine. C'est une augmentation de 9 dossiers (+3,5%) par rapport à 2018. Près de 78% dossiers concernent la police. Dans 8 cas sur 10, les discriminations concernent des critères dits "raciaux" ou religieux.

En terme de violences policières (qui comprennent des violences illégitimes ainsi que des coups et blessures volontaires), nous nous sommes penchés sur les chiffres du Comité P, le Comité permanent de contrôle des services de police. En moyenne, 29 décisions judiciaires sont rendues chaque année dans des affaires de violences policières. Elles sont majoritairement rendues à Bruxelles, dans le Hainaut et en Flandre orientale. Les trois quarts des audiences sont rendues en français alors que la majorité des policiers sont néerlandophones. Dans 80% des dossiers, les policiers ont été blanchis par la justice. Seuls 20% des faits étaient donc établis. Pour les faits établis, 50% des policiers ont bénéficié de la suspension du prononcé (une mesure de faveur), 30% d'une peine de prison ou amende avec sursis, 20% d'une peine de travail.

Les personnes d'origine étrangère, l'un des public-victime cible

Selon une analyse du Comité P, les personnes d'origine étrangère représentent l'un des public-victime cible. La majorité des faits de violences se produisent lors d'interventions non-planifiées, par exemple lors de contrôles. Généralement, c'est une situation tendue qui dégénère.

Dans les commissariats, le rôle du supérieur hiérarchique est aussi capital. Dans les dossiers du Comité P, il apparaît qu'un chef violent peut rapidement faire tache d'huile et entraîner des membres de son équipe dans son sillage. Lors d'un changement de poste ou de commissariat, les nouveaux chefs ne sont pas forcément au courant du passé violent d'un policier. En effet, les démarches disciplinaires sont longues et archaïques. De plus, les sanctions disciplinaires sont effacées après 2 à 5 ans. Les sanctions disciplinaires vont de l'avertissement à la révocation en passant par le blâme, la retenue sur salaire, la suspension et la rétrogradation.

Quel profil ?

Nous nous sommes aussi penchés sur le profil des policiers impliqués dans des faits de violence. Généralement, la violence ne se limite pas aux interventions sur le terrain. Une majorité des policiers violents ont aussi été dénoncés pour des faits de harcèlement ou des violences intrafamiliales. Leur impulsivité, voire leur agressivité, a plusieurs fois été détectée dès leur formation initiale, mais elle n'a pas empêché un chef de corps de les engager. Par la suite, les policiers connus pour violence apparaissent souvent aux yeux de la hiérarchie comme des personnalités fortes avec aussi, souvent, des dossiers administratifs ouverts à leur encontre. Ces personnalités fortes sont souvent acceptées parce qu'elle peuvent être utiles lors d'interventions plus risquées.

Un usage de la contrainte qui doit être proportionnel et opportun

Quelles sont les règles ? Le code de déontologie des services de police (art. 24) et la loi sur la fonction de police précisent que toute discrimination fondée, notamment, sur la race, la couleur, l'origine, la religion est interdite. Pour ce qui est de l'usage de la violence, le recours à la contrainte et l'usage de la force sont autorisés par la loi. Ils doivent cependant être proportionnels et opportuns, mais aussi être déployés s'il n'y a pas d'autre moyen (c'est le principe de subsidiarité).

A plusieurs reprises ces dernières années, la justice (à la suite d'enquêtes indépendantes) a condamné des policiers et a rappelé qu'ils devaient pouvoir être poursuivis comme n'importe qui, mais aussi avoir droit à un procès équitable. Dans une démocratie, il est en effet capital que tout citoyen puisse considérer les policiers comme n'abusant pas de leur fonction. Par les condamnations rendues, la justice entend faire prendre conscience aux policiers violents de la gravité de leurs actes.


 

Vos commentaires