Que faire lorsque l'on se retrouve nez-à-nez avec un serpent dans son jardin? Difficile de ne pas paniquer... Beaucoup l'ignorent, mais il existe plusieurs espèces de serpents qui vivent à l'état sauvage en Belgique, et qui se retrouvent parfois dans les jardins des particuliers. C'est le cas de la couleuvre à collier qui s'est perdue chez Steve, à Trooz.
"J’ai retrouvé ceci chez moi", nous dit Steve, qui habite à Trooz (région liégeoise), via notre page Facebook, en joignant cette vidéo. "J’étais dans la véranda et les portes étaient fermées. Le serpent était dans le jardin, il essayait d’entrer dans la véranda. J’avais ma tablette en main, donc j’ai pris la petite vidéo, puis j’ai appelé les pompiers", raconte-t-il. Les pompiers sont arrivés rapidement, avec la police. "Ils sont tout de suite venus le chercher". Steve a demandé s’il pouvait recevoir un rapport afin de savoir de quelle espèce il s’agissait, mais rien n’a suivi. Il s’est donc adressé à la rédaction de RTLinfo.be pour en savoir plus. "Selon mes recherches sur le net, il s'agit une couleuvre à collier non venimeuse", nous dit-il.
Steve a des enfants: "Ça me fait quand même peur"
Nous avons soumis la vidéo à Frédéric Gandar, vétérinaire à la clinique des NAC (Nouveaux Animaux de Compagnie) de l’Université de Liège: comme le dit Steve, il s’agit bien d’une couleuvre à collier. Un reptile que le papa de trois enfants ne s’attendait pas du tout à croiser chez lui: "C’est l’endroit où mes enfants jouent. Ils ont 6, 5 et 4 ans. Ça me fait quand même peur", explique-t-il, confiant qu’il redouble d’attention.
Oui, il y a des serpents qui vivent en Belgique
Mais comment s’est-il retrouvé dans le jardin de Steve ? Il s’agit tout simplement d’une espèce propre à nos régions: "On n’a pas d’idée exacte de leur nombre, mais parmi nos serpents, c’est celui qui est le plus commun et le plus répandu [voir l'encadré pour consulter les autres espèces, ndlr]. Et il arrive assez régulièrement de les observer jusque dans les jardins", explique Arnaud Laudelout, biologiste chez Natagora.
Où vivent les couleuvres à collier ? Surtout dans les environs de Liège: "On les retrouve surtout au sud de la vallée de la Meuse, mais dans toute la Hesbaye, il n'y en a pratiquement pas, sauf quelques populations qui ont été introduites le long du canal du Centre". De façon très locale, on peut même en retrouver à Bruxelles: "Dans le marais de Jette, le marais de Ganshoren, il y en a qui traînent", précise le biologiste qui cite également le marias du Moeraske (Evere). Ces reptiles vivent en lisière des bois, dans les friches et les marais, et parfois dans les jardins.
Jusqu’à 1m40 de long
L’animal est reconnaissable à l’espèce de collier blanc que l’on peut voir derrière sa tête. "Les couleuvres naissent dans le courant du mois d’août. Elles font 10 centimètres à la naissance. Ensuite, elles peuvent avoir une taille assez remarquable. Les serpents n’arrêtent jamais de grandir pendant leur vie et peuvent mesurer jusqu’à un 1m40 de long, parfois un peu plus", ajoute le biologiste.
Un serpent "moins dangereux qu’un hérisson"
Comme Steve l’avait lu sur internet, la couleuvre à collier n’est pas venimeuse, et donc pas dangereuse pour lui ni pour ses enfants. "Elle n’a pas de glande à venin. A la limite, si on l’attaque, elle peut mordre, mais les morsures ne sont pas très graves", détaille le vétérinaire, qui précise que ce serpent n’est pas du tout agressif, et même plutôt craintif. "Cela fait partie de la faune sauvage de Belgique. C’est vrai que c’est stressant de voir un serpent. Mais c’est à la limite plus dangereux d’avoir un hérisson. Si on compare, un hérisson ça fait des morsures qui sont bien plus profondes que cela", ajoute-t-il.
"Quand on a un doute, il faut appeler. Mais monopoliser les pompiers pour une couleuvre…"
Il arrive de temps en temps que des serpents exotiques soient retrouvés dans des habitations. Dans ce cas, il s’agit de reptiles qui appartiennent à des particuliers, et qui se sont échappés. Ne sachant pas qu’il s’agissait ici d’une espèce de chez nous, Steve a préféré appeler les pompiers. Il n’était d’ailleurs pas le seul à s’en faire : une voisine s’inquiétait également d’avoir repéré un serpent dans les bois récemment. "Quand on a un doute, il faut appeler. Mais monopoliser les pompiers pour une couleuvre… c’est vraiment un animal de chez nous. Par contre si on a un voisin qui a un vivarium, on sait qu’on doit un peu plus s’inquiéter", commente le lieutenant Vincent Bouffat, un pompier de la caserne de Liège formé à la manipulation des NAC. "Les gens connaissent de moins en moins les animaux de nos régions, et je peux dire qu’on en fait les frais", déplore-t-il.
S’il a appris à manipuler des reptiles exotiques échappés des vivariums, le lieutenant Bouffat, lorsqu’il est appelé pour une couleuvre, se charge toutefois de l’éloigner des maisons et de la remettre près d’un point d’eau: "On prend juste une pince, pour ne pas blesser l’animal, on peut aussi le faire à mains nues. Mais l’animal risque de sécréter une matière qui a une mauvaise odeur, un peu comme de l’urine très prenante. Donc on prend la pince et on le met dans un bac en plastique pour le déplacer".
Que faire si vous trouvez un serpent?
Que faire dès lors si vous trouvez un serpent ? En fonction de l’endroit où vous habitez, il devrait donc être possible de déduire s’il s’agit d’une espèce de chez nous ou non. Si vous pensez qu'il s'agit d'une espèce exotique, mieux vaut appeler un organisme spécialisé comme la Ligue royale belge pour la protection des oiseaux (LRBPO) ou les pompiers qui sont de plus en plus formés à gérer tous types d'animaux (lire: "Que faire face à un serpent en rue?").
Mais en tous les cas, le vétérinaire conseille de "ne jamais manipuler un serpent sans identifier l’espèce". Si vous êtes sûr qu’il s’agit d’une couleuvre à collier, le meilleur conseil est de la laisser là où elle est. Il est d'ailleurs interdit de déplacer ces reptiles, selon la loi sur la conservation de la nature. Si vous rencontrez des problèmes, par exemple parce des serpents viennent pondre dans votre compost, vous pouvez joindre le Département Nature et Forêts.
Enfin, sachez que si vous trouvez un reptile blessé ou en danger, il existe des centres de revalidation partout en Belgique, appelés "CREAVES", dont voici la liste.
Deborah Van Thournout
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