L'émission "C'est pas tous les jours dimanche" a accueilli sur son plateau défenseurs et détracteurs du projet de la prime kot. Un projet qui prévoit d'octroyer 1.000 euros pour les étudiants qui habitent trop loin de leur université ou de leur haute école. Mais les Wallons qui étudient à Bruxelles n'y auront pas droit. Violette en fait partie. Elle est venue exposer son problème.
La prime kot, c’est sans doute la polémique de la semaine. La Wallonie propose de donner 1.000 euros d’aide au logement à tous les étudiants qui habitent à une heure de route de leur université ou de leur haute école. Mais pas si l’établissement se trouve à Bruxelles.
Violette Decoster, étudiante en première année en ergothérapie à la haute école Léonard de Vinci de Bruxelles, habite Virton, à deux heures de route de la capitale. La distance est de 190 kilomètres. Mais il y a un problème: elle n’aura pas droit à cette prime.
"C’est assez discriminant je trouve. Ces 1.000 euros on en a besoin en tant qu’étudiants. Mon kot me coûte 350 euros par mois. Ça serait vraiment avantageux pour nous en tant qu’étudiants à Bruxelles", explique-t-elle.
"Je pense que cette prime peut vraiment aider"
Même si les kots sont chers partout, Violette estime qu’ils le sont encore plus à Bruxelles, et que c’est très difficile d’en trouver. "Comme beaucoup de gens, je pense que cette prime peut vraiment aider. Mes parents ne gagnent pas le salaire d’un ministre", rajoute Violette.
Pour elle, impossible de suivre les cours ailleurs qu’à Bruxelles. "Pour le temps que je mets, pour l’accessibilité. Je mets moins de temps d’aller à Bruxelles, que pour aller à Liège, Charleroi ou Mons, pour une école d’ergothérapie".
Valérie De Bue (MR), la ministre wallonne des Pouvoirs Locaux, du Logement et des Infrastructures Sportives, a écouté attentivement le témoignage de l’étudiante, et elle lui répond. "Le problème c’est que c’est une aide au logement, et que c’est une compétence régionale. Ce dossier n’est pas neuf. Cela fait 20 ans que ce débat surgit. Nous avons pris nos responsabilités, et nous mettons sur la table une proposition".
Pour la Ministre, c’est la Fédération Wallonie-Bruxelles, et non la Région wallonne, qui aurait dû se pencher sur la question. Pour elle, cela aurait posé moins de problèmes. "Elle était mieux outillée. Ce débat a été porté à la Fédération, et il n’y a pas eu d’écoute. Je veux bien discuter de cela avec grand plaisir avec Jean-Claude Marcourt (le ministre compétent en F.W-B, ndlr), mais on peut tout à fait développer cela sans mon aide".
La solution pourrait-elle venir de Bruxelles?
Caroline Désir, cheffe de groupe PS au Parlement bruxellois, comprend le procédé de la prime mais estime qu’il n’est pas optimal.
"A travers le cas de Violette, on voit bien que cette prime crée d’abord une discrimination entre les Wallons eux-mêmes. Cette mesure vient restreindre le choix de son université ou de sa haute école". Pour elle, les établissements sont donc eux aussi discriminés. "C’est quand même frontal. On sait que l’ULB accueille 6.000 étudiants wallons, ça n’est pas anecdotique. Et puis c’est une mesure qui est mal calibrée, qui vise les étudiants quelle que soit leur condition. On aurait aussi pu cibler les étudiants qui en ont le plus besoin".
Un but électoral?
Les régions les plus discriminées, ce sont surtout les villes en Province de Luxembourg, ou encore celles situées en Wallonie Picarde. Le cdH, membre de la majorité wallonne, est assez présent dans le sud du pays. Une question se pose alors: le parti essaie-t-il de mettre les électeurs dans sa poche en proposant de telles primes? Non, selon Dimitri Fourny, Chef groupe cdH au parlement de Wallonie.
"Ce projet répond à une injustice et à un problème matériel qui se pose. Quand vous habitez une zone rurale aussi éloignée, que ce soit du Luxembourg ou du Hainaut, et que vous devez vous rendre dans une université, vous devez louer, il n’y a rien à faire", détaille le Ministre. Mais il ne cache pas qu’il y a encore des problèmes à solutionner. "Nous en sommes à la première lecture du texte. Il va essuyer toute une série d’avis. Il y a des concertations qui vont avoir lieu, le texte va pouvoir évoluer", précise-t-il.
"Un gouvernement des périphéries de la ruralité en Wallonie"
Nicolas De Decker, journaliste pour le Vif-l’Express, a écouté attentivement le débat. Pour lui, certaines régions restent fortement désavantagées. "On a la décision typique d’un gouvernement des périphéries de la ruralité en Wallonie. La majorité des ministres viennent de communes assez éloignées, et donc ils sont directement concernés par cela. Ils ont un rapport de la distance. En fin de compte, qui en profite? Ce sont les gens comme eux. Par exemple, cette disposition-là ne va aider aucun, ou presque aucun, étudiant carolorégien. Parce que Charleroi est trop près de Louvain ou de Mons".
Alain Raviart, a ensuite clôturé le débat. Pour lui, de telles décisions sont prises uniquement dans un but électoral. "Ce qui se passe n’est pas étonnant. C’est ce qu’on appelle la politique du pied de biche. On est en campagne électorale, et donc on force des décisions. Ça peut avoir des effets vertueux. Pour l’heure le projet est encore assez mal ficelé".
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