"Mon travail, c'est (de prévoir) les scénarios du pire" : ce défi, Georges Salinas s'y attelle au quotidien à la tête de la sécurité du chef de l'Etat mais aussi sur son temps libre, comme auteur de romans policiers, au plus près du réel.
"Ça faisait longtemps que j'avais envie d'écrire. Mais je dirais que, à partir de 2015, au moment des attentats (de Paris), j'ai eu un peu cette espèce de révélation", raconte le chef du prestigieux Groupe de sécurité de la Présidence de la République (GSPR) dans un entretien à l'AFP.
"Je me suis rendu compte que finalement, écrire c'était quelque chose qui me faisait du bien. C'est un exutoire", confie-t-il à l'occasion de la sortie de son dernier roman, "Par le verbe, par le glaive" (Mareuil Editions), le troisième depuis 2019. "Ce roman, il est aussi pour bien se souvenir, ne pas oublier".
Le 13 novembre 2015, Georges Salinas, alors chef-adjoint de la BRI (Brigade de Recherche et d'Intervention), mène l'assaut avec ses hommes contre les assaillants qui se livrent à un bain de sang dans la salle de concerts du Bataclan.
"Pendant toute l'opération, j'ai enjambé les morts comme j'aurais enjambé des obstacles. Ce n'est qu'après que tout ça revient", relève le policier d'élite, aujourd'hui âgé de 64 ans.
Ce soir-là, la capitale est attaquée de toutes parts, au Stade de France, sur les terrasses de café, au Bataclan. Le bilan est terrible, 130 morts et des centaines de blessés.
- "Danger permanent" -
Forces de l'ordre, secouristes, hôpitaux, tous s'engagent dans une vaste course contre la montre pour sauver un maximum de personnes, une tension dramatique au coeur du roman, qui plonge aussi dans les coulisses du terrorisme international.
Au fil des chapitres, la réalité souvent dépasse la fiction. Le personnage principal, "je le connais assez bien", sourit le chef du GSPR, qui travaille depuis 2019 au côté d'Emmanuel Macron.
Le voilà bientôt au coeur de voyages présidentiels à Beyrouth ou Oran en Algérie, où toute ressemblance avec des faits ou des personnages existants apparaît tout sauf fortuite.
Jusqu'aux trois tentatives d'attentat contre "le président", dont le nom n'apparaît jamais ? "Je laisse le lecteur décider", répond d'un clin d'oeil Georges Salinas, tout en soulignant que la fiction est aussi au coeur de son travail d'écriture.
"Ce qui est sûr, c'est que je m'inspire de ce que j'ai vécu. A partir de là, comme mon travail c'est aussi de parfois travailler sur les scénarios du pire, je m'en sers pour après les mettre dans des écrits", dit-il.
De la gifle à l'attentat, rien ne peut jamais être exclu lors des déplacements présidentiels. Idem pour la sécurité du palais de l'Elysée et des autres résidences présidentielles, de la Lanterne au fort de Brégançon.
"Il y a un danger permanent. En tout cas, moi je ne baisse jamais la garde sur tous les déplacements", pointe le patron du GSPR. "C'est parfois dans les déplacements qui paraissent les moins dangereux ou les plus anodins qu'on peut avoir des problèmes", lâche-t-il.
- "Lignes rouges" -
Avec un petit casse-tête rituel, celui des bains de foule, une tradition présidentielle bien française, à laquelle Emmanuel Macron ne déroge pas, popularité ou pas.
"On a des dispositifs pour éviter tout danger", notamment de type armes à feu, martèle Georges Salinas, qui n'en dira pas plus.
"Après les gens ont des bras et des jambes", dit-il. "Si quelqu'un essaie de donner une gifle, l'acte est très rapide, ça peut toucher le président".
Le patron du GSPR n'est lui-même jamais très loin du chef de l'Etat, qu'Emmanuel Macron soit dans son bureau, en déplacement officiel ou dans un cadre privé.
Ses trois téléphones portables, posés délicatement sur une table pendant l'entretien, en témoignent. "Le rouge, c'est celui de mon épouse", précise-t-il. Sa femme et ses enfants, l'autre fil rouge de sa vie et de son dernier roman.
Dans cette proximité permanente avec le chef de l'Etat, "vous avez obligatoirement des sentiments amicaux qui se développent", concède-t-il. "Mais la règle principale d'un officier de sécurité, c'est la discrétion. Ensuite, on a des lignes rouges, c'est de ne pas trop entrer dans son intimité".
Ses romans restant des fictions, Georges Salinas n'a pas à demander l'autorisation de sa hiérarchie pour les publier. Il vient d'offrir le dernier au chef de l'Etat. "Je ne sais pas" s'il l'a lu, conclut-t-il.
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