Face à l'explosion du coût de l'énergie, les musées misent sur les économies déjà réalisées et de futurs investissements avec l'aide de l'Etat, plutôt que sur des fermetures ou la hausse du prix des billets d'entrée.
De son côté, la Fédération nationale des cinémas français (FNCF) vient d'émettre des recommandations pour tenter de réduire la consommation énergétique des salles, sans trancher la question d'une éventuelle réduction du nombre de séances.
"On est sur un coût de l'énergie multiplié par trois", dit à l'AFP Pierre-Emmanuel Lecerf, administrateur général de l'établissement public qui gère les musées d'Orsay et de l'Orangerie.
En 2022, celui-ci représentait 5% du budget de fonctionnement de l'établissement, s'élevant à 27 millions d'euros. Les prévisions pour 2023 l'évaluent à 12%, soit plus de trois millions d'euros.
Le Centre Pompidou annonce lui une dépense prévisionnelle "autour de 7,5 millions d'euros (chauffage et électricité confondus) contre 4 millions en 2022 (10% du budget de fonctionnement hors masse salariale)".
Il dit être "en discussions" avec le ministère de la Culture qui prévoit "un point sur la situation avant la fin du mois".
Quant au Louvre, qui n'annonce pas de prévisions chiffrées mais une baisse de sa consommation d'énergie de 17% en 2021 par rapport à 2018, son budget énergétique atteignait "environ 10 millions d'euros en 2021, sur un montant global des charges de fonctionnement de 216 millions d'euros".
"A ce stade, nous ne voulons surtout pas fermer les musées, ni augmenter les tarifs. C'est à nous de nous adapter", souligne M. Lecerf. C'est sans compter bien sûr sur d'éventuels "délestages massifs ou une rupture d'approvisionnement d'énergie", prend-il la précaution d'ajouter.
A l'instar d'autres grands musées qui ont modernisé dès 2019 leurs équipements techniques et réduit l'éclairage, Orsay et l'Orangerie ont engagé une "importante politique environnementale anti-gaspillage, qui a permis de réaliser une baisse de 15% de la consommation énergétique sur les huit premiers mois de l'année 2022 par rapport à 2019".
"Nous nous fixons a minima un objectif de 20% de réduction de la consommation d'énergie, voire 25%, d'ici à 2023 en misant sur des investissements supplémentaires à court terme. Cela ne permettra pas de compenser totalement l'inflation des prix de l'énergie, mais de faire une partie du chemin", ajoute ce responsable.
- Conservation des œuvres -
Dans le viseur: "la production de chaud, de froid et l'éclairage".
Une "gestion technique centralisée permet déjà d'ajuster l'éclairage et les températures au juste besoin quasiment à la seconde près. L'équipement intégral du musée en LED se poursuit, soit une réduction de 5% escomptée de la consommation énergétique globale", détaille M. Lecerf.
Ajuster les températures à la baisse pourrait être "une autre source de réduction de consommation mais cela nécessite un consensus au niveau des musées", précise-t-il.
Ce sujet concerne en effet la conservation préventive des œuvres, qui requiert une stabilité des températures et de l'hygrométrie, encadrée par des normes internationales de référence.
Autre solution, plus coûteuse mais rentable à terme: restaurer, voire remplacer, les verrières d'Orsay, "passoires thermiques en hiver et serres en été", selon M. Lecerf.
Un audit a chiffré le coût du remplacement de la principale verrière, à l'entrée du musée, à "sept millions d'euros".
- Cinéma: adapter les horaires? -
Côté cinéma, "l'énergie pour faire tourner une salle dépasse largement les 3% du chiffre d'affaires, et les 10% dans les cinémas les plus anciens", selon la FNCF.
Les 6.193 salles sont invitées à éteindre leurs enseignes en dehors des heures d'ouverture, baisser le chauffage à 19°C, réduire la climatisation, ou encore adapter les horaires d'ouverture "en fonction des flux de public"... La profession est divisée sur l'opportunité de réduire le nombre de séances.
Les salles placent aussi leur espoir sur de nouveaux projecteurs consommant environ quatre fois moins d'énergie. Un investissement massif pour lequel la ministre de la Culture Rima Abdul Malak a promis d'aider à "construire un plan de remplacement", sans avancer de montant, ni de calendrier précis.
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