Netflix et quatre autres géants du numérique ont concentré l'an dernier plus de la moitié du trafic internet français, a révélé jeudi l'Autorité de régulation des télécoms (Arcep), qui voit dans les IA génératives une "nouvelle porte d'entrée" du web.
Dans son rapport 2023 sur l'état d'internet en France, l'Arcep indique que 53% du trafic "provient de Netflix, Akamai, Facebook, Google et Amazon", poussé par la consommation de films et séries en streaming, la télévision en rattrapage et les réseaux sociaux.
Si Netflix reste l'acteur avec la part la plus élevée (15,3%), celle-ci recule par rapport à fin 2022, où elle avoisinait les 20%.
L'opérateur de serveurs Akamai, utilisé par de nombreux sites web et des plateformes comme Disney+, représente 12,3% du total, en hausse de 3% par rapport à l'an dernier, une augmentation "assez forte" qui s'explique "par la croissance de la demande de contenus vidéo", selon l'Arcep.
Google (9,8%), Amazon (8,5% en y incluant sa plateforme de vidéo en direct Twitch) et Meta (6,8%) complètent ce top 5, tous les trois en légère baisse sur un an.
Le rapport se penche également sur la montée en puissance de l'intelligence artificielle générative, décrit comme "nouvelle porte d'entrée de l'internet".
Il indique que les internautes se tournent davantage vers ces modèles, comme ChatGPT de l'américain d'OpenAI, pour accéder à du contenu, ce qui soulève des questions quant au principe d'un internet neutre.
"Les IA génératives menacent notre liberté de choix dans l'accès aux contenus en ligne", avertissait ainsi Laure de La Raudière, la présidente de l'Arcep, mardi.
Dans une tribune publiée dans le journal Le Monde, elle estimait qu'elles pourraient à terme "remplacer les traditionnels moteurs de recherche" en devenant "de nouveaux intermédiaires et de nouveaux médiateurs de l'information".
Pour Jean Cattan, secrétaire général du Conseil national du numérique, la neutralité du net pourrait être remise en question si ces IA utilisent des contenus choisis "au fil d'accords souvent exclusifs et confidentiels, qui favorisent potentiellement les numéros 1 des marchés".
Face à ce risque, l'enjeu est d'assurer "une interconnexion généralisée entre l'ensemble des contenus qui sont sur internet et ces IA génératives", a-t-il ajouté, appelant à davantage d'encadrement et de régulation.
- Réduire la consommation -
Dans son rapport, l'Arcep note également que la hausse du trafic global d'internet en France a ralenti, atteignant 46,5 térabits par seconde fin 2023, à 7,6% sur un an contre 21,5% l'année précédente.
Le gendarme des télécoms explique cette décélération par "une croissance faible de la proportion d'abonnés" aux services de flux en continu et "les efforts entrepris par certains acteurs en termes de compression et d'optimisation du trafic".
Pour réduire la consommation de données, Netflix, par exemple, s'est équipé d'infrastructures de distribution réparties dans le pays pour rapprocher les contenus des usagers.
"Nous continuons d'innover dans la compression vidéo: les débits ont été divisés par deux en cinq ans, pour la même qualité", a indiqué un porte-parole de Netflix à l'AFP.
"Nous adaptons les flux aux usages: sur mobile, le débit moyen est 8 fois plus faible que sur TV", affirme également l'entreprise.
Face aux coûts que génèrent ces usages, la Commission européenne, qui avait lancé début 2023 une consultation publique sur l'avenir des télécommunications, a finalement abandonné l'idée d'une contribution financière des géants du numérique, réclamée par les grands opérateurs européens.
Selon Bruxelles, la majorité des organisations et citoyens consultés ont exprimé leur opposition, estimant qu'un tel mécanisme découragerait l'innovation et augmenterait les prix pour les consommateurs.
Vos commentaires