Au cœur de la crise sanitaire, les spécialistes du cancer ont lancé un cri d’alerte : "Retournez chez les médecins". En effet, le diagnostic précoce est primordial dans la prise en charge des patients atteints de cancer. Les traitements, eux se sont poursuivis. Des patients du Grand Hôpital de Charleroi racontent.
La crise sanitaire a provoqué une chute du nombre de diagnostics de cancer: -44% selon des chiffres de la Fondation contre le cancer. Par crainte de fréquenter le milieu hospitalier durant la pandémie de coronavirus, des patients ont préféré annuler ou reporter leur rendez-vous. Pourtant, les traitements se sont poursuivis, comme celui de Dominique. Il est atteint d'un myélome, un cancer qui débute dans la moelle osseuse, et qui affecte un type de globules blancs. Il est traité en immunothérapie au service d'hématologie, qui regroupe les maladies du sang.
"Aucun changement"
Comme chaque mois, il poursuit sa thérapie, en hôpital de jour. Outre les masques, le gel hydroalcoolique et les mesures de distanciation sociale, la routine reste exactement la même. pour lui. "Aucun changement", nous confie-t-il, "ni dans la fréquence des rendez-vous, ni dans les soins prestés… J’avais eu un entretien téléphonique avec le médecin traitement, l’oncologue. Elle était très claire, en disant, 'Je vous demande de continuer comme si de rien n’était'".
Certains traitements poursuivis à domicile...
La prise en charge a parfois été adaptée. Des patients plus âgés et donc plus à risque ont poursuivi les traitements oraux à domicile. Le suivi s’est fait à distance, par téléphone. "Au tout départ, on avait espéré que ça allait durer quinze jours", nous explique le docteur Delphine Pranger, chef du service hématologie du Grand Hôpital de Charleroi. "On a fait un tri, surtout au niveau de l’hôpital de jour, là où se font les traitements quotidiens, pour voir quels étaient les patients qui pouvaient attendre 15 jours, donc qui ne devaient pas absolument venir le lundi qui suivait. Tout au départ, on a gardé les patients chez qui il était indispensable de faire le traitement en temps et en heure. Après, on s’est rendu compte que ça n’allait pas durer 15 jours, et on a commencé à réfléchir à comment accueillir les patients qu’on avait reportés à 15 jours correctement".
... d'autres adaptés
Il s'agissait surtout d'imaginer comment administrer le traitement sans faire courir de risques aux patients. "Le risque principal de tous ces traitements, c’est au niveau immunitaire et au niveau du risque infectieux. On a trouvé une organisation. Principalement, on a adapté certains traitements, on a donc diminué par exemple la prise de cortisone, chez le patient chez qui on pouvait la diminuer, on a aussi retiré certains traitements provisoirement, pour aussi éviter que le taux de globules blancs ne soit critique à certains moments".
Diagnostiquée d'une leucémie aigüe en pleine pandémie
Nele a été diagnostiquée d’une leucémie aigüe. Les symptômes sont apparus au début des mesures sanitaires. Pour elle, c’est sans doute le contexte de la pandémie qui l’a poussée à consulter rapidement: "Si ça se trouve, j’aurais continué à me dire, je suis fatiguée, ce n’est pas grave, j’aurais continué à ne pas faire d’examen. Or là, comme on était dans un contexte de panique générale, ça m’a peut être aidée à prendre les mesures nécessaires sur le plan médical plus rapidement".
Sa chimiothérapie a débuté pendant le confinement, au moment où les visites étaient proscrites. Sa famille a ensuite pu venir la voir. "Je ne me suis jamais menacée par le covid, à l’intérieur de l’hôpital. Je pense que toutes les précautions ont été prises et je me suis vraiment sentie à l’abri de cette infection", estime-t-elle.
Des patients "fantastiques de tolérance"
Le service du docteur Pranger a été relativement épargné par le covid. Les patients, particulièrement sensibles, ont respecté les recommandations à la lettre pour éviter toute contamination. "Je trouve que tous les patients ont été assez fantastiques de tolérance et d’acceptation puisque outre les files d’attente, le fait qu’on ne pouvait plus venir accompagné, qu’ils devaient être prudents… on a eu peu de patients qui n’ont pas compris ça, vraiment".
Dans le service d'hématologie, les maladies nécessitent une prise en charge rapide. Mais en oncologie, le coronavirus aura plus facilement eu raison de certains diagnostics. Les prochains mois révéleront l’ampleur des conséquences de ces dépistages tardifs.
Le professeur Ahmad Awada, chef du service d'oncologie à l'Institut Bordet, a évoqué ce sujet ce lundi dans le RTL INFO avec VOUS:
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