A trois jours de la fin prévue de la COP27, pays riches et pauvres ont posé leurs pions mardi, exposant les fractures notamment sur la création d'un fonds réclamé par les pays vulnérables pour compenser les "pertes et dommages" déjà subis face aux impacts du réchauffement.
"Des progrès ont été faits mais certainement encore plus reste à faire si nous voulons parvenir à une conclusion solide qui sera un moteur pour une action climatique ambitieuse et inclusive", a résumé lundi soir le président de cette 27e conférence de l'ONU sur le climat Sameh Choukri.
La première ébauche de déclaration finale publiée dans la nuit de lundi à mardi n'est qu'une liste à puces, avec toutefois la réaffirmation en quelques mots de certains principes disputés comme "l'urgence d'agir pour que l'objectif de +1,5°C reste du domaine du possible".
L'accord de Paris de 2015 vise à limiter le réchauffement nettement en dessous de +2°C par rapport à l'ère pré-industrielle, si possible +1,5°C. Alors que chaque dixième de degré entraîne une multiplication des catastrophes climatiques, les signataires de l'accord s'étaient engagés l'an dernier à la COP26 à "maintenir en vie" l'objectif le plus ambitieux.
Mais selon des observateurs, l'Arabie saoudite et la Chine ont fait savoir leur réticence, déjà exprimée par le passé, à voir à nouveau cette référence dans le texte final, alors que le monde se dirige vers un réchauffement catastrophique de 2,8°C.
- "Mauvais côté de l'Histoire" -
Autre point crucial au coeur des négociations, la revendication des pays en développement de la création d'un mécanisme dédié pour financer les "pertes et dommages" déjà subis en raison des impacts du réchauffement.
Le groupe G77+Chine, qui représente plus de 130 pays émergents et pauvres, a présenté mardi son plan pour la création dès cette COP27 d'un "fonds pour aider les pays en développement à couvrir les coûts pour faire face aux pertes et dommages non économiques et économiques".
"Les nations riches et industrialisées, en particulier les Etats-Unis et l'UE, peuvent décider de les rejoindre ou continuer à être du mauvais côté de l'Histoire, alors que des millions de personnes souffrent", a commenté Harjeet Singh, du réseau d'ONG Climate Action Network.
Mais l'UE, réticente, a de son côté souligné sa préférence pour le "lancement d'un processus" ; tout comme les facilitateurs désignés par la présidence égyptienne de la COP, qui en reflétant les diverses positions tranchées ont évoqué un possible "processus" de poursuite des discussions, possiblement jusqu'en 2024.
Les pays du Sud assurent malgré tout être prêts au combat. "Antigua et Barbuda ne partira pas d'ici sans un fonds pour les pertes et préjudices", a martelé Conrod Hunte, négociateur de l'Etat des Caraïbes qui préside l'Alliance des petits Etats insulaires (Aosis).
Se succédant à la tribune toute la journée, les pays en développement ont également fustigé le manque d'ambition des pays développés.
- Vies "sacrifiées" -
"L'absence de leadership et d'ambition en matière d'atténuation des émissions de gaz à effet de serre est inquiétante", a lancé le ministre sénégalais de l'Environnement Alioune Ndoye, au nom du groupe des Pays les moins avancés, dénonçant trois décennies "émaillées de déception".
"Lors de combien de COP avons nous réclamé des actions climatiques urgentes ? Combien de plus seront nécessaires ? Combien de vies devrons nous sacrifier", a ajouté le ministre du changement climatique du Belize, Orlando Habet, réclamant des actes du G20 et des "autres gros pollueurs".
Nombre de participants à la COP27 à Charm el-Cheikh attendent d'ailleurs de voir la façon dont les dirigeants du G20 réunis à Bali mardi et mercredi prendront en compte la crise climatique et leur ambition à agir, espérant une bonne nouvelle qui donnerait une coup de pouce aux négociations en Egypte.
L'UE de son côté s'est engagée à réhausser ses engagements. "Ne laissez personne vous dire, ici ou ailleurs, que l'UE fait machine arrière. Ne les laissez pas vous dire que l'invasion de l'Ukraine par la Russie est en train de tuer le Pacte vert européen et que nous sommes dans une ruée vers le gaz", a déclaré le vice-président de la Commission européenne Frans Timmermans.
Il a ainsi annoncé que, grâce à l'adoption de plusieurs législations dans les dernières semaines, "l'UE est prête à mettre à jour ses engagements". Pour réduire les émissions nettes d'au moins 57% d'ici 2030 par rapport à 1990, contre au moins 55% actuellement.
Tout comme l'annonce de la Turquie d'un relèvement de ses ambitions, le discours de l'UE a été accueilli froidement par les militants pour le climat. "L'urgence climatique dans laquelle nous nous trouvons ne mérite pas des miettes de la part de l'UE", a critiqué Chiara Martinelli du Climate Action Network Europe.
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