La Cour de cassation a ouvert la voie vendredi à un nouvel arrêt de l'alimentation et de l'hydratation maintenant en vie Vincent Lambert, patient tétraplégique en état végétatif depuis dix ans, "point final" de cette affaire selon l'avocat de son épouse, qui se bat pour qu'il puisse mourir.
La haute juridiction a cassé la décision de la cour d'appel de Paris qui, le 20 mai, avait ordonné la reprise des traitements de cet ancien infirmier de 42 ans, victime d'un accident de la route en 2008 et devenu symbole de la fin de vie en France.
Elle a jugé que le juge judiciaire - la cour d'appel - n'était pas compétent, et prononcé cette cassation "sans renvoi" devant une autre juridiction, ce qui rend possible un nouvel arrêt des traitements par les médecins du CHU de Reims.
La Cour de cassation n'était pas saisie de la question de la fin de vie de Vincent Lambert: elle a tranché une question de droit très technique en disant que les conditions juridiques permettant à la cour d'appel de se déclarer compétente n'étaient pas réunies.
Ce type de litige relève habituellement de la justice administrative dont la plus haute juridiction, le Conseil d'Etat, avait validé en avril la décision médicale d'arrêter les traitements. La Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) lui avait donné raison.
Par conséquent, il "n'y a plus de voies de recours possibles car il n'y a plus de juges à saisir", a estimé Patrice Spinosi, l'avocat de Rachel Lambert, l'épouse du patient, favorable à l'arrêt des traitements. "C'est un point final à cette affaire", a-t-il affirmé. Les traitements "peuvent s'arrêter dès à présent. Maintenant, c'est le choix des équipes médicales."
Au sein d'une famille déchirée par des années d'une tragique bataille judiciaire, Rachel Lambert est soutenue par six frères et soeurs et un neveu de Vincent, François Lambert. Celui-ci, qui a estimé que le CHU va interrompre les traitements "très rapidement", s'est fait interpeller au cri d'"assassin !" devant les caméras par une militante opposée à la mort de Vincent Lambert.
- "Jamais de victoire" -
Les avocats des parents Lambert, de fervents catholiques qui jugent, comme un frère et une soeur, que leur fils n'est pas en fin de vie mais handicapé, ont quant à eux menacé de poursuites pour "meurtre" le médecin qui ordonnerait un arrêt des traitements. "Le combat pour Vincent continue et nous ne laisserons pas Vincent assassiné", a lancé Jérôme Triomphe devant la presse.
La mère de Vincent Lambert, arrivée au CHU de Reims peu après 16H00, en est repartie vers 17H00 sans faire de déclaration. Viviane Lambert doit s'exprimer lundi devant le Conseil des droits de l'homme à Genève.
Le CHU a indiqué à l'AFP qu'il "ne fera aucun commentaire, ni aujourd'hui, ni dans les prochains jours".
Après des années de procédures, l'équipe médicale qui s'occupe de Vincent Lambert avait débuté le 20 mai l'arrêt de l'alimentation et de l'hydratation le maintenant en vie dans un état végétatif irréversible.
Le même jour, la cour d'appel, saisie par les parents Lambert, avait ordonné contre toute attente leur reprise et l'arrêt de sa sédation profonde, comme demandé par le Comité des droits des personnes handicapées (CDPH), émanation de l'ONU, en attendant que celui-ci se prononce sur le fond du dossier.
L'Etat, les ministères de la Santé et des Affaires étrangères et le CHU de Reims s'étaient pourvus en cassation.
"Attendons que la CDPH se prononce", ont invoqué les avocats des parents Lambert. "La France ne peut pas se placer elle-même au ban des nations civilisées et risquer d'être condamnée par l'ONU à l'avenir", a estimé Me Triomphe. Le tribunal administratif avait jugé le 15 mai que ce comité ne constituait pas une juridiction.
Avant son accident, Vincent Lambert avait selon son épouse pris position contre tout acharnement thérapeutique, sans laisser toutefois de directives anticipées.
Rachel Lambert "se bat pour respecter la volonté de son mari", a expliqué Me Spinosi. "Il n'y a jamais de victoire. Jamais - quelle que soit la décision - de raison de se réjouir."
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