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Antarctique: la calotte qui s'écroule va redessiner les littoraux du monde

Antarctique: la calotte qui s'écroule va redessiner les littoraux du monde
L'avenir des régions côtières et de leurs millions d'habitants dépend de la masse de glace recouvrant l'Antarctique occidental qui va faire monter le niveau des océans d'au moins 3 mètresEITAN ABRAMOVICH
 
 

L'avenir des régions côtières et de leurs millions d'habitants dépend de la masse de glace recouvrant l'Antarctique occidental qui va faire monter le niveau des océans d'au moins 3 mètres.

A la veille de la publication d'un rapport des experts de l'ONU sur les océans et les zones glacées, Anders Levermann, expert de l'Antarctique au Potsdam Institute of Climate, décrit à l'AFP l'impact du réchauffement climatique sur la région la plus froide du globe.

Q: Est-ce que le réchauffement agit sur les calottes du Groenland et de l'Antarctique de la même manière ?

R: Non. En Antarctique, 99% de la perte de volume se produit lorsque la glace avance vers l'océan. Il n'y a pratiquement aucune fonte de glace à la surface, il fait tout simplement trop froid. Au Groenland, la moitié de la perte de volume vient de l'eau de fonte qui coule jusqu'à l'océan.

En Antarctique ou au Groeland, quand la glace s'écoule vers l'océan, et devient une plate-forme glaciaire (prolongement de glace au-dessus de la mer, qui reste attaché au continent, ndlr), elle entre en contact avec la surface de l'eau. Même un dixième de degré d'écart de température peut entraîner un déséquilibre de la plate-forme.

La calotte du Groenland est beaucoup plus petite que celle de l'Antarctique - l'équivalent de 7 mètres d'élévation du niveau de la mer, contre 55 mètres - mais perd plus de glace. C'est parce qu'en Antarctique, il fait beaucoup plus froid.

Q: Concernant la hausse du niveau des océans, que savons-nous de nouveau sur le rôle de l'Antarctique ?

R: Il y a dix ans, les modèles sur l'Antarctique ne prévoyaient pas de perte importante de glace pendant ce siècle. Il y avait même des débats sur l'éventualité que le volume de glace augmente.

Aujourd'hui, tous les modèles montrent des pertes de glace à un rythme important. La calotte du continent a perdu 150 millions de tonnes de glace chaque année depuis 2015, quasiment la totalité en Antarctique occidental. Et ça s'accélère.

Il n'y a plus de doute. Les études existantes montrent que l'Antarctique occidental a dépassé un point de basculement. Il est instable et va relâcher sa glace la plus fragile - l'équivalent de plus de 3 mètres d'élévation du niveau de la mer - dans l'océan. Point barre.

Quant à la contribution de l'Antarctique à la hausse du niveau des océans d'ici la fin du siècle, une étude que j'ai faite avec de nombreux collègues en 2014 prévoyait une augmentation de 50 cm d'ici 2100, ce qui est énorme. La dernière évaluation des experts climat de l'ONU (GIEC) disait 16 cm au maximum.

En 2016, une étude importante dans la revue Nature envisageait une contribution beaucoup plus importante, jusqu'à plus d'un mètre. Elle a été très critiquée, et ses conclusions pourraient être révisées.

Si l'accord de Paris est respecté (en dessous de +2°C par rapport à l'ère pré-industrielle, ndlr), la hausse du niveau de la mer va ralentir mais ne va pas s'arrêter. S'il ne l'est pas, la hausse va s'accélérer à la fin du siècle.

Q: En combien de temps la calotte de l'Antarctique occidental va-t-elle disparaître ?

R: Je pense que nous sous-estimons le rythme. Mais il faudra malgré tout des siècles pour libérer toute la glace, même si cela ne s'arrêtera pas.

Personne ne devrait avoir peur d'être tué par la hausse du niveau des océans. Mais si New York se retrouve 5 mètres sous le niveau de la mer, derrière des digues, je ne sais pas si les gens voudront encore y vivre.

Le vrai impact sera dans ce que l'on va perdre. Hong Kong est aujourd'hui un phare de la démocratie en Chine, la Nouvelle Orléans est un bastion culturel, New York une place forte de la culture et des affaires. Hambourg, Calcutta et Shanghaï... Nous allons toutes les perdre face au changement climatique si nous ne réduisons pas les émissions de CO2.


 

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