Les pays émergents et en développement ont haussé le ton sur la question clé des financements mercredi à la conférence de Paris sur le climat où les négociations piétinent, suscitant frustration et impatience.
La conférence de Paris "doit clarifier le niveau des soutiens financiers qui seront fournis par les pays développés aux pays en voie de développement après 2020", date d'entrée en vigueur du futur accord, a averti le plus grand groupe de pays négociant à la COP21, le "G77 + la Chine", qui représente 134 pays émergents et en voie de développement.
Dans une déclaration lors d'une séance plénière en présence du président de la conférence Laurent Fabius, le groupe a notamment réclamé "une augmentation substantielle" de l'enveloppe de 100 milliards de dollars annuels promise par les pays du Nord à ceux du Sud.
A deux reprises dans la journée, Laurent Fabius a publiquement appelé les délégués à "accélérer" le rythme de leurs pourparlers. "Les progrès sont trop lents", a-t-il dit alors que les négociations entre les délégations des 195 pays sur l'accord tant espéré dans dix jours piétinent sur nombre de points.
"Mon message est tout à fait clair: il faut accélérer le processus parce qu'il nous reste beaucoup de travail", a déclaré à la presse le chef de la diplomatie française, dressant un premier bilan des tractations entrées dans le vif du sujet mardi.
"Des formules de compromis doivent être dégagées le plus rapidement possible, les chefs d'Etat et de gouvernement nous ont donné lundi un mandat sans ambiguïté, nous devons réussir", a encore dit M. Fabius au Bourget (nord de Paris).
Après les grands discours d'un sommet sans précédent de 150 chefs d'Etat pour l'ouverture de la COP21, les délégations tentent de s'entendre sur un projet d'accord qui permettra de limiter le réchauffement à 2°C par rapport à l'ère pré-industrielle, afin de préserver l'humanité des pires conséquences du dérèglement climatique.
Pour l'heure, le texte sur la table comporte 55 pages, et une multitude d'options sur chaque chapitre.
"Sur aucun point, nous ne faisons les progrès qui seraient nécessaires", a regretté l'Américain Daniel Reifsnyder, l'un des deux présidents du groupe de travail sur le projet d'accord. Selon un négociateur européen, "la frustration monte".
- "Des hauts et des bas" -
Le calendrier est pourtant serré. "J'ai demandé (...) de me remettre un projet d'accord samedi à midi", a précisé Laurent Fabius. "L'objectif est que beaucoup d'options aient été tranchées d'ici la fin de cette semaine", avant que les ministres des divers pays prennent le relais des négociations lundi.
Philosophe et forte de l'expérience de nombreuses COP, la responsable climat de l'ONU Christiana Figueres a cherché à dédramatiser. Le texte "va connaître des hauts et des bas, il y aura de nombreuses virgules qui vont être ajoutées, d'autres qui vont être retirées (...). Le produit final n'interviendra pas avant la fin de la semaine prochaine", a-t-elle averti.
La rare bonne nouvelle de la journée a semblé venir de Pékin, le plus grand pollueur au monde, qui a indiqué son intention de moderniser d'ici 2020 ses centrales à charbon afin de diminuer leurs émissions polluantes de 60%. Mais pour l'expert de Greenpeace sur la politique chinoise, Li Shou, "ceci n'est pas nouveau".
Mercredi, 185 pays sur 195, couvrant quelque 95% des émissions de gaz à effet de serre, avaient annoncé des mesures pour limiter, voire réduire, les émissions polluantes à l'horizon 2025 ou 2030, selon M. Fabius.
Elles devraient néanmoins progresser de 22% entre 2010 et 2030, ce qui met la planète sur la trajectoire d'un réchauffement entre 2,7°C et 3,5°C par rapport à l'ère pré-industrielle.
Le but de la COP21 est de s'entendre sur un mécanisme garantissant une révision à la hausse des objectifs, en faisant le point régulièrement - tous les cinq ans est le plus probable - sur les efforts fournis et ceux restant à faire.
Les discussions sur le mécanisme de révision "avancent mais lentement", selon la Fondation Hulot, l'Inde ayant donné son accord à un bilan "tous les 5 ans mais pas avant 2020", alors que certains pays souhaitent que la première révision ait lieu d'ici 2020.
La question de la part que doivent prendre les grands pays émergents dans l'effort commun pour réduire les gaz à effet de serre est l'un des sujets les plus épineux, ces pays mettant en avant leur droit au développement et la "responsabilité historique" des pays riches dans le réchauffement.
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