L'acte V des "gilets jaunes" sera-t-il maintenu samedi? Au lendemain de l'attaque de Strasbourg, le mouvement semblait décidé mercredi à poursuivre sa mobilisation malgré les appels du gouvernement à la "responsabilité".
De Tours à Marseille en passant par Calais, de nombreux "gilets jaunes" expriment leur solidarité avec les victimes de Strasbourg mais restent déterminés à faire entendre leur colère, dans la rue ou autour de ronds-points, après les mesures annoncées lundi soir par le chef de l'Etat.
Dans les Bouches-du-Rhône, le mouvement est "parti pour un acte V, en plus important même", affirme Thierry Marre, coordinateur des "gilets jaunes" à Istres, qui continue de réclamer comme d'autres "la démission" d'Emmanuel Macron.
Même détermination à Marseille même si l'on reconnaît que le drame strasbourgeois ne peut être ignoré. "Nous verrons ce qui se passe (...). Mais en l'état actuel des choses, nous sommes toujours partis pour un acte V", assure une coordinatrice locale, réclamant notamment la dissolution de l'Assemblée nationale.
"On ne se sent pas concernés, par ça, les attentats. C'est pour nous faire peur. On ne changera rien", lâche également "Mamyray", une retraitée de 65 ans rencontrée par l'AFP sur un rond-point à Rennes.
"Eux pensent que c'est une raison pour nous faire arrêter. Pour moi, cela (l'attentat et les +gilets jaunes+) n'a aucun rapport", estime à ses côtés, Paul, brocanteur de 24 ans.
Les annonces présidentielles, notamment l'augmentation de 100 euros des salaires au niveau du Smic, n'ont semble-t-il pas suffi à éteindre la colère des "gilets jaunes", pas plus que les appels du gouvernement à observer une pause après l'attaque terroriste sur le marché de Noël de Strasbourg, qui a fait au moins 2 morts.
Mercredi matin, le secrétaire d'État à l'Intérieur Laurent Nuñez en a appelé à la "responsabilité générale" en disant "espérer qu'il y aura moins de manifestations" de "gilets jaunes" samedi.
Malgré l'activation de "l'urgence attentat" --plus haut niveau du plan Vigipirate--, les manifestations ne devraient pas être interdites ce week-end, a-t-il précisé.
Compte tenu de l'"événement dramatique" de Strasbourg et des "réponses apportées par le président" aux revendications des "gilets jaunes", la ministre de la Justice Belloubet a de son côté considéré que "le mouvement (devait) cesser".
"Je ne vais pas dire aux +gilets jaunes+: +Rentrez chez vous+" , a répondu le secrétaire national du PCF Fabien Roussel, assurant que la mobilisation devait "se poursuivre".
- Tiraillements -
Après l'attaque du marché de Noël, de légers tiraillements traversent toutefois ce mouvement lancé le 17 novembre contre la hausse des prix du carburant avant de s'étendre à une dénonciation plus générale de la politique gouvernementale.
A Strasbourg, "Il faut que tout le monde stoppe au vu des événements", reconnaît Patrick, un "gilet jaune" local, appelant à faire "profil bas jusqu'à ce week-end".
Le mouvement sans leader ni idéologie doit aussi faire face à la propagation par certains de ses membres de thèses complotistes selon lesquelles l'attaque de Strasbourg serait un "coup monté" destiné à éclipser la mobilisation.
"Un mec a sans doute dégénéré (...) dans les rues de Strasbourg et le gouvernement fait passer ça pour un attentat", écrit un internaute sur une page Facebook appelant à un acte V.
En réaction, le groupe Facebook La France en colère, qui compte parmi ses membres certains initiateurs du mouvement, a suspendu mardi soir ses commentaires en évoquant une "situation particulière".
Patrick, le "gilet jaune" strasbourgeois, ne peut lui-même réprimer quelques doutes. "C'est un coup monté. On avait prévu de bloquer le Parlement européen (...) et comme par hasard ça a pété" mardi soir, dit-il.
Dénoncées par le gouvernement, ces thèses conspirationnistes sont également combattues par des "gilets jaunes" qui craignent d'être discrédités. "C'est une pensée marginale dans le mouvement", assure Claude Rambour, 42 ans, membre des "Gaulois de Calais".
"Depuis l'attentat de Strasbourg, on entend n'importe quoi. C'est malheureux ça va trop loin. On ne peut pas mettre le gouvernement en tort pour une telle tragédie", soutient Florence Lavenu, une femme de ménage très investie dans le mouvement à Saint-Beauzire, près de Clermont-Ferrand. "Des gens ont perdu des membres de leur famille".
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