Fille d'un généticien anti-avortement, épouse d'un ancien ministre controversé et mère de neuf enfants, Clara Gaymard, qui quitte lundi la présidence de GE France a exercé un rôle influent notamment dans sa carrière administrative tout en cherchant à "faire entendre la voix des femmes". Un parcours plutôt atypique.
"Je pense très sincèrement qu'aucun groupe français ne m'aurait donné la responsabilité qu'un groupe américain me donne", confiait il y a quelques mois Mme Gaymard, à la tête de GE France depuis 2006.
En février 2014, lors d'une visite de François Hollande à Washington, elle fait part au ministre de l'Economie de l'époque Arnaud Montebourg de l'intérêt possible de GE pour la reprise du pôle énergie d'Alstom convoitée alors par l'allemand Siemens.
D'origine danoise par sa mère, cette blonde menue au teint de porcelaine a toujours minimisé son rôle dans le dénouement de l'opération: le patron de GE, "Jeff Immelt (qui) a conduit le deal. Moi, j'ai travaillé, étroitement, avec les pouvoirs publics".
La sphère publique, cette diplômée de Science-Po et de l'ENA (promotion Diderot), la connaît parfaitement. Elle a été attachée au cabinet de Jacques Chirac à la mairie de Paris puis directrice de cabinet de Colette Codaccioni, ministre de la Solidarité entre les générations du premier gouvernement d'Alain Juppé.
Mais surtout, elle a dirigé pendant trois ans l'Agence Française pour les Investissements Internationaux (AFII) entre 2003 et 2006.
Une mission d'ambassadrice qui lui a permis de beaucoup voyager pour vanter les mérites des entreprises tricolores et se constituer des réseaux solides et éclectiques dans le monde international des affaires.
- Pour un management ouvert -
Clara Gaymard, qui maîtrise parfaitement l'anglais, a présidé la chambre de commerce américaine en France jusqu'à mi-2015. De quoi encore enrichir le carnet d'adresses bien rempli de l'épouse de l'ancien ministre de l'Economie Hervé Gaymard, démissionnaire à la suite d'une affaire d'appartement de fonction à la taille et au loyer pharaoniques.
Son départ du conglomérat américain officialisé lundi, intervient au moment où l'américain vient d'annoncer 6.500 suppressions de postes dont 765 en France, dans la branche énergie d'Alstom que le groupe a rachetée en novembre avec l'engagement confirmé de créer 1.000 emplois nets dans l'Hexagone.
A 56 ans, Clara Gaymard, présidente du fonds de dotation Raise, qui accompagne les entreprises françaises en phase de développement, quitte GE pour se consacrer à "une nouvelle opportunité professionnelle", jusqu'à présent gardée secrète.
En plus de sa participation depuis mars au conseil d'administration de Veolia, elle est pressentie pour intégrer celui de Bouygues.
Cette ambitieuse parisienne férue de travail considère l'absence de dirigeantes au sein des grandes entreprises comme "une forme de scandale, une anomalie de la société française" et juge les quotas dans les conseils d'administration insuffisants.
Partisane d'un "management ouvert" et de la parité hommes-femmes dans l'entreprise, elle estime que ne pas avoir cet équilibre, "c'est tout simplement une erreur stratégique".
Quand elle est interrogée sur sa capacité à jongler entre sa vie de famille nombreuse et toutes ses activités professionnelles, elle déplore le machisme dans la société française.
"Les compétences quand on est chef de famille, sont dans tous les manuels de leadership", expliquait l'an dernier Mme Gaymard, présidente du Forum des femmes pour l'économie et la société et auteur de trois livres, dont un sur son père, découvreur du chromosome de la trisomie 21, et militant anti-avortement.
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