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Glyphosate: Bayer douché par le revers judiciaire de Monsanto

 
 

Violemment attaqué en Bourse lundi, l'allemand Bayer souffre de la condamnation infligée aux Etats-Unis au géant des semences Monsanto, que le groupe pharmaceutique vient d'acquérir au prix fort au risque d'une cascade d'ennuis judiciaires.

Le titre Bayer dégringolait à la mi-journée de plus de 12% à la Bourse de Francfort, à 81,79 euros, et voyait plus de 11 milliards d'euros de sa capitalisation partir en fumée.

Un tribunal de San Francisco a condamné vendredi Monsanto à payer 289 millions de dollars d'indemnités pour ne pas avoir informé de la dangerosité de son herbicide au glyphosate, à l'origine du cancer de Dewayne Johnson, un jardinier américain.

Le groupe américain a immédiatement annoncé son intention de faire appel et Bayer, qui a bouclé début juin le rachat de Monsanto pour 63 milliards de dollars, a défendu samedi l'innocuité du glyphosate, estimant que d'autres tribunaux pourraient "aboutir à des conclusions différentes".

Mais cette déclaration n'a nullement rassuré les investisseurs, inquiets de l'impact sur les comptes de Bayer des milliers de procédures visant Monsanto aux Etats-Unis, à des degrés divers d'avancement.

"Si chaque procès perdu coûte un quart de milliard de dollars, il n'en faut pas beaucoup pour que ça devienne assez cher", souligne auprès de l'AFP Michael Leacock, analyste chez MainFirst.

- Cinq à dix milliards ? -

Selon lui, la facture "pourrait facilement atteindre 10 milliards de dollars" pour le nouveau mastodonte de l'agrochimie, en intégrant de possibles accords à l'amiable avec un grand nombre de requérants.

La banque Berenberg parvient elle à un chiffre inférieur de moitié, soit 5 milliards de dollars, sur la foi de litiges passés impliquant le laboratoire Merck, pour son anti-inflammatoire Vioxx, et même Bayer, attaqué pour son anticholestérol Baycol.

Outre le risque juridique direct, le nouvel ensemble doit affronter l'incertitude sur l'avenir commercial de ce produit vedette, vendu depuis 1976 sous la marque Roundup.

"Si les consommateurs le considèrent comme dangereux, il y a un risque pour les ventes à long terme", estime M. Leacock.

Herbicide le plus utilisé au monde, depuis que le brevet détenu par Monsanto est tombé dans le domaine public en 2000, le RoundUp est aussi accusé d'être néfaste pour l'environnement et de contribuer à la disparition des abeilles, ou encore d'être un perturbateur endocrinien.

Bayer a certes annoncé au printemps la disparition du nom sulfureux de Monsanto, déformé en "Monsatan" ou "Mutanto" par ses détracteurs, dès qu'il aura formellement intégré la firme de Saint-Louis.

Mais cette annonce de pure forme, puisque Bayer commercialisera à l'identique les semences et produits phytosanitaires de sa cible, ne solde en rien le passif judiciaire de Monsanto ni les controverses qui l'entourent.

- Pari sur l'agriculture -

Dans ce contexte, selon Michael Leacock, il est "fort probable" que les investisseurs gardent une vision "très sombre" du mariage Bayer-Monsanto et infligent au titre du groupe allemand "une décote substantielle par rapport à ses pairs".

Bayer, qui a poursuivi Monsanto de ses assiduités au point de relever trois fois son offre, mise sur la nécessité de produire plus sur des surfaces restreintes, donc sur une agriculture toujours plus intensive.

Mais ce pari à long terme ne pourra s'imposer dans l'esprit des opérateurs que "lorsque l'ensemble des litiges seront réglés", avertit l'analyste de MainFirst.

Dans l'immédiat, Bayer n'a pas voulu préciser s'il avait commencé à provisionner pour affronter les ennuis judiciaires de Monsanto, lui qui avait déjà mis de côté au 31 mars 884 millions d'euros pour ses propres procédures concernant plusieurs médicaments phares.

De son côté, la firme de Saint-Louis affichait fin août 2017 277 millions de dollars de provisions pour ses frais judiciaires - une somme plus qu'engloutie par la seule décision californienne.


 

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