Le Centre pour la cybersécurité Belgique (CCB) réfléchit à la possibilité de bannir Huawei en Belgique, à l'instar de plusieurs dont les Etats-Unis, rapportent des journaux belges ce vendredi. La filiale du géant chinois des télécoms dans notre pays a réagi: "Nous travaillons parfaitement selon les réglementations", a dit son porte-parole. Retour sur une affaire aux parfums politiques, économiques et diplomatiques...
De plus en plus de pays se montrent critiques envers Huawei, géant chinois des réseaux et de la téléphonie mobile, dont l'infrastructure est soupçonnée d'être une porte ouverte pour l'espionnage de la part de l'État chinois et de son armée.
Tout a commencé avec les Etats-Unis, qui interdisent depuis toujours l'utilisation de matériel (antennes GSM, smartphones, etc) du fabricant Huawei. Officiellement, ils soupçonnent des risques pour leur cybersécurité. En réalité, il est plus que probable qu'il s'agisse d'une guerre économique et diplomatique: les USA ne veulent pas laisser leur réseau mobile aux mains d'acteurs chinois. La guerre commerciale et protectionniste que se livrent la Chine et les Etats-Unis depuis l'arrivée de Donald Trump n'arrange évidemment rien à la situation.
Cette crainte américaine est revenue sur le devant de la scène depuis l'arrestation d'une haute-responsable du groupe Huawei, au Canada. Il s'agit de Meng Wanzhou, la fille du fondateur et actuelle directrice financière (entre autres responsabilités). Washington l'accuse de ne pas avoir respecté un embargo par rapport à l'Iran. Derrière, il y a des enjeux et politiques et diplomatiques (le fondateur de Huawei a eu des liens avec l'armée chinoise). Washington tente sans doute de faire pression et de rallier d'autres pays dans sa "guerre" contre le géant chinois des télécoms. Pour l'instant, les USA sont imités par l'Australie, la Nouvelle-Zélande et le Japon, qui vient d'annoncer que Huawei et ZTE (un concurrent chinois de Huawei) ne pourraient plus être présents au niveau du matériel de l'administration.
Enfin, pour envenimer encore la situation, il y a la 5G qui débarque l'an prochain. Les standards de cette technologie mobile qui va révolutionner nos connexions à internet ne sont pas encore établis, et il y a donc une autre guerre en cours à ce niveau, que se livrent l'Est et l'Ouest.
Ceci étant dit, les faits sont là: il n'y a aucune preuve d'espionnage de la Chine via les réseaux de Huawei pour l'instant.
En Belgique, on "envisage" d'interdire Huawei
En Belgique, le Centre pour la cybersécurité envisage d'interdire toute activité au fournisseur de Proximus et Orange Belgium (Telenet/Base utilise le matériel d'un autre chinois, ZTE). "Nous avons récemment demandé, via des canaux nationaux et internationaux, des études objectives qui démontrent que l'utilisation de la technologie d'Huawei comporte des risques", explique Miguel De Bruycker, patron du CCB, dans l'Echo. "Nous avons pris des contacts au niveau académique, civil et officiel".
Le but est de mener une analyse propre et objective des risques. "Afin de d'émettre pour notre pays un avis étayé à propos d'Huawei", conclut Miguel De Bruycker.
En France, comme l'explique le média spécialisé Les Echos, Huawei a du respecter certaines règles dictées par les autorités, mais il peut y opérer en toute transparence. L'entreprise chinoise y est d'ailleurs très active sur les réseaux de SFR et Bouygues.
"Rien à craindre"
Huawei est-il en train d'espionner la terre entière (sauf les Etats-Unis) avec son matériel télécoms ? Pour l'instant, il n'y a aucune preuve, or l'entreprise chinoise collabore avec des opérateurs du monde entier depuis de nombreuses années. Difficile de croire que cet espionnage aurait lieu sans que personne ne s'en aperçoive.
De plus, les enjeux financiers sont colossaux pour Huawei, symbole du capitalisme chinois. Pourquoi l'entreprise prendrait-elle le risque de voir s'écrouler son empire, en mettant ses infrastructures au service de l'espionnage?
Mais restons prudents: la Chine reste un pays à part, avec un parti unique (et "communiste") à sa tête, et ne fait pas partie des nations les ouvertes au monde, les plus transparentes sur ses politiques intérieures et extérieures...
"Nous n'avons rien à craindre. Nous travaillons parfaitement selon les réglementations, qui sont particulièrement strictes concernant les infrastructures de réseaux", déclare un porte-parole de la filiale belge de Huawei.
"En soi, nous ne pouvons rien avoir contre une telle enquête (celle du CCB, NDLR). Il n'y a pas encore la moindre preuve que nous ayons fait quelque faute que ce soit. Nous sommes actifs dans plus de 170 pays et nous nous soumettons aux réglementations locales".
L'entreprise dénonce elle aussi un jeu politique.
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