Téléphone scotché au bras, montre GPS au poignet, les sportifs courent, pédalent, transpirent désormais high-tech. Les applications coachent leurs utilisateurs, musclent leurs offres et fédèrent des communautés aux données précieuses.
"Je ne cherche pas à battre le record du monde, mais l'application m'aide à garder la forme". Mohammed reste modeste. Il prépare pourtant un semi-marathon (21km), montre GPS au poignet. Ce coureur élancé de 63 ans analyse ses quatre entraînements hebdomadaires grâce à une application dédiée au sport.
"Je peux connaître mon rythme cardiaque, ma vitesse et je programme mes entraînements. En compétition, ça me permet de savoir si je suis dans le rythme prévu, si je ne suis pas en train de me +griller+".
En 2015, 1,05 million de montres de sport connectées et de traqueurs d'activité -un bracelet qui enregistre au quotidien votre activité physique, nombre de pas, rythme cardiaque, calories brûlées- ont été vendus en France, contre 450.000 en 2014 selon les estimations de Les Echos Etudes.
L'utilisation des applications suit le mouvement. "Le marché des objets sportifs connectés et celui des applications sportives sont totalement liés", explique à l'AFP Nicolas Boulanger, directeur du cabinet L&CPG, et auteur de l'étude.
"Les données brutes ne sont pas très intéressantes. Tout l'intérêt d'une application est de transformer cette matière en information intelligible et intuitive pour comprendre la performance et proposer des programmes d'entraînement adéquats", précise l'analyste.
- Néophytes ou athlètes -
Runtastic, Runkeeper, Nike+ Running, Endomondo, Strava ou encore Garmin Connect, la concurrence est musclée. "Il y a un vrai affrontement autour des applications. C'est un marché émergent mais déjà hyper concurrentiel", développe-t-il.
Les acteurs du secteur rivalisent d'ingéniosité pour attirer le chaland. Runtastic, société autrichienne fondée en 2009, qui revendique 80 millions d'utilisateurs enregistrés, mise sur la multiplication des "apps". Outre la course à pied, elle propose de compter les pompes, en touchant du nez l'écran du téléphone, les abdos, les tractions... Et offre des plans d'entraînement personnalisés.
"Nous visons un accompagnement pour les personnes qui ne sont pas forcément sportives au départ", ajoute Laure Brouard, responsable marketing de la marque qui se place "sur le filon du sport santé" avec "coachs fitness et nutrition".
Les sportifs confirmés ne sont pas en reste. Josselin, cycliste amateur de 20 ans utilise Strava. Cette application lui permet de préparer un parcours, un passage de col par exemple, et lui permet de comparer ses temps "avec les autres cyclistes", le plus rapide étant décrété "King of Mountain".
- La "mine d'or" des données -
L'application aiguise d'autant plus l'esprit de compétition qu'elle prévient un utilisateur lorsqu'un "ami" vient de terminer un parcours, et qu'elle revendique parmi ses membres plus de 500 sportifs professionnels auxquels les amateurs peuvent se mesurer.
Et permet à Josselin d'être fier d'avoir "piqué" au cycliste français Thibaut Pinot le meilleur temps d'un parcours d'entraînement du champion.
La firme américaine veut "renforcer son positionnement en tant que réseau social des sportifs", précise Grégory Vermersch, responsable France de la marque.
Les équipementiers ne veulent pas être en reste. Adidas a racheté Runtastic en août dernier pour 220 millions d'euros, Nike propose sa propre application, Under Armour multiplie les acquisitions. L'aspect communautaire des objects connectés et des applis permet "de mieux comprendre les clients afin de proposer d'autres produits", précise Nicolas Boulanger.
Cette compréhension des clients repose notamment sur la masse des données récoltées, "une vraie mine d'or", selon l'analyste. Une manne néanmoins réglementée et donc exploitée avec prudence. Strava vend certaines données anonymes aux collectivités locales, les flux d'utilisateurs par exemple, afin de "permettre aux villes d'améliorer leurs infrastructures pour les cyclistes et les coureurs", indique Grégory Vermersch.
"5% des propositions de partenariat que nous recevons ont pour but la vente des données clients", explique Laure Brouard de Runtastic qui a fait le choix de ne pas les monnayer. "Ca aurait pu se révéler très rentable, mais nous avons refusé".
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