La victime, c'est la note de la dette argentine sur les marchés. L'agence de notation Standard and Poor's a déclaré mercredi l'Argentine en "défaut sélectif", alors que le pays mène des tractations de dernière minute pour éviter un défaut de paiement caractérisé qui lui serait encore plus préjudiciable. En cause: la pression exercée sur l’Etat par des fonds spéculatifs dits "vautours", très critiqués de par le monde, via un juge américain.
En pleines tractations avec ses créanciers à New York, l'Argentine espérait encore trouver une solution rapidement. Elle doit régler cette somme (pourtant minime pour un Etat) de 539 millions de dollars à des créanciers ayant consenti une remise de dette de 70% après la crise économique de 2001. Mais le juge américain Thomas Griesa bloque ce paiement parce qu'il a ordonné à l'Etat argentin de payer d'abord 1,3 milliard de dollars à NML et Aurelius, deux fonds "vautours" spécialisés dans le rachat de dette à risque et détenteurs de moins de 1% de la dette concernée. Mais si Buenos Aires remboursait ces deux fonds, elle se mettrait à dos les autres créanciers qui, eux, détiennent 93% de la dette. Ces derniers ont en effet accepté de ne récupérer que 30% de leur investissement initial.
"On remboursera, mais sans tentative d'extorsion"
L'Argentine et ces fonds spéculatifs qui ont parié sur son échec ne sont pas parvenus à se mettre d'accord. Les fonds spéculatifs "ont essayé de nous imposer quelque chose d'illégal", a expliqué le ministre argentin de l'Economie Axel Kicillof. "L'Argentine est prête à dialoguer, à trouver un consensus. Nous allons chercher une solution juste, équilibrée et légale pour 100% de nos créanciers", a dit M. Kiciloff. Buenos Aires "va rembourser" les porteurs de bons issus de la dette restructurée, mais "à des conditions raisonnables, sans tentative d'extorsion, sans pression, sans menace", a-t-il ajouté.
Le risque?
Faute de solution, l'Argentine risque mécaniquement un défaut de paiement portant sur un montant minime pour un Etat, 539 millions de dollars. Elle avait obtenu un délai de 30 jours qui expirait mercredi pour régler cette somme à des créanciers ayant consenti une remise de dette de 70% après la crise économique de 2001.
Les banques privées d'Argentine pourraient rembourser et devenir les nouveaux créanciers du pays
La solution pourrait cependant venir du privé. "Il y a un accord entre banques et vautours, le défaut sera éphémère. Les banques vont racheter la totalité de la dette pour 1,6 milliard de dollars", affirme le quotidien économique argentin Ambito Financiero, qui prévoit une annonce de Wall Street dans la soirée. L'économiste Aldo Pignanelli est sur la même ligne. "Désormais, assure-t-il, s'ouvre la possibilité d'un accord entre privés. Les banques ont présenté un document au juge Griesa dans lequel elles manifestaient la volonté de racheter la totalité de la dette pour entamer une négociation avec les avocats des fonds vautours". D'après lui, un compromis pourrait être annoncé ce jeudi.
Premier dommage: une note qui baisse, donc encore plus de difficultés de se financer sur les marchés internationaux
En attendant, ce défaut de paiement d’une partie de ses dettes à ses créanciers vaut à l’Argentine de voir la note de sa dette encore rétrogradée par l’agence de notation Standard & Poors. Cette note, qui était de CCC-, dans la catégorie spéculative considérée comme très risquée pour les investisseurs, est portée à SD (selective default), a indiqué l'agence dans un communiqué.
Selon l'agence, un pays est placé en "défaut sélectif" quand "l'emprunteur n'a pas honoré une certaine partie de ses obligations ou une émission spécifique mais qu'il continue de payer ses autres types d'emprunts dans les temps". L'agence de notation rappelle que l'Argentine a manqué d'honorer un paiement de 539 millions d'euros sur les intérêts de ses obligations, alors qu'elle avait un délai de 30 jours qui expirait mercredi soir."Notre interprétation d'un émetteur qui honore ses échéances financières est celle d'investisseurs qui sont payés à temps et totalement", ajoute S&P.
L'agence indique que "si l'Argentine trouve une solution à son défaut de paiement" sur les bons en question, elle "réévaluera la note de la dette souveraine, pour, en toute probabilité, la relever à celle de triple C ou B inférieur".
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