La Wallonie refusait toujours mercredi le traité "Ceta" de libre échange UE-Canada, malgré les pressions avant un sommet des 28 censé donner le feu vert à un accord concernant plus de 500 millions d'Européens et de Canadiens.
Depuis un an, la petite région francophone du sud de la Belgique (3,6 millions d'habitants), dont l'aval est indispensable à la signature du Ceta par l'UE, a fait part de ses importantes réserves sur le texte négocié par la Commission européenne et Ottawa.
Depuis le début du mois, les pressions se sont intensifiées sur la Wallonie pour qu'elle assouplisse sa position. La Commission a donné à la Belgique jusqu'à vendredi, second jour du sommet européen de Bruxelles, pour qu'elle s'aligne sur les 27 autres pays de l'UE.
Mais rien n'y fait. Le chef du gouvernement wallon, le socialiste Paul Magnette, emboîtant le pas à son Parlement régional, refuse de céder et réclame même une "réouverture des négociations" et un délai de "plusieurs semaines, voire plusieurs mois" pour parvenir à un nouveau texte qui selon lui protégerait mieux le modèle social et environnemental européen.
Mercredi, il venu "réexpliquer" sa position à la commissaire européenne au Commerce Cecilia Malmström au siège de la Commission à Bruxelles.
"Aujourd'hui, on n'a pas eu de réponse", a-t-il déclaré à sa sortie de la réunion, qui a duré près d'une heure et demie et à laquelle a également participé le ministre belge des Affaires étrangères, le libéral francophone Didier Reynders, qui est lui favorable au Ceta.
- 'Aucun calendrier' -
Une fois de plus, Paul Magnette a réitéré ses critiques, soutenues par nombre d'ONG, de partis de gauche et de syndicats en Europe, qui voient dans le Ceta les prémices du traité TTIP (ou Tafta), encore plus controversé, que l'UE négocie très laborieusement avec les Etats-Unis.
"Nous avons encore des besoins en matières d'agriculture et en ce qui concerne le +mécanisme d'arbitrage+. Il nous faut davantage de garanties que le Ceta ne pourra pas être utilisé par des multinationales autres que canadiennes. Et nous voulons que tout cela, y compris les progrès faits ces derniers jours, figure dans un texte juridiquement contraignant", a-t-il détaillé.
Respecter le délai fixé par la Commission "me paraît très difficile", a jugé M. Magnette, tout en assurant qu'il examinerait "avec le plus grand sérieux" d'éventuelles nouvelles propositions de la Commission mais qu'il ne "s'enfermait dans aucun ultimatum, aucun calendrier".
"Je ne cherche pas à créer une crise en Europe, il se fait juste que c'est en train d'arriver", a-t-il expliqué.
Paul Magnette avait été encore plus clair en début de journée, en jugeant sur une radio belge qu'il ne serait "pas raisonnable" de croire à un feu vert de la Wallonie d'ici la fin du sommet de Bruxelles, qui doit aborder vendredi matin les questions liées à la politique commerciale de l'UE.
- La Commission défend le Ceta -
Les Européens doivent aussi dire à très bref délai au Premier ministre canadien, Justin Trudeau, si la cérémonie de signature du Ceta, prévue à Bruxelles le 27 octobre, est maintenue.
"Je pense qu'il sera raisonnable d'organiser le report sine die de ce sommet (UE-Canada du 27 octobre) parce qu'il vaut mieux éviter ce qui ressemblerait à une confrontation", a estimé M. Magnette.
Son intransigeance, qui a suris dans les chancelleries, menace de déclencher une crise avec le Canada et soulève des interrogations sur la capacité des 28 à négocier à l'avenir des traités commerciaux avec des pays comme les Etats-Unis ou le Japon.
"Il est très important de faire passer (l'accord) et nos services travaillent d'arrache-pied", a plaidé de son côté le vice-président de la Commission européenne, Jyrki Katainen.
"Si lundi matin, il n'y a pas d'accord, le Premier ministre Trudeau ne viendra pas", a confié mercredi à des journalistes un diplomate européen.
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