L'ancien président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker a témoigné mercredi dans une affaire d'écoutes illégales qui lui a coûté son poste de Premier ministre du Luxembourg en 2013.
La 12e chambre correctionnelle du Grand Duché juge depuis mardi trois anciens agents du Service de Renseignement de l'Etat Luxembourgeois (SREL), accusés d'avoir mis en place des écoutes illégales en 2007. L'un des accusés Marco Mille, chef du SREL de 2003 à 2010, soutient que Jean-Claude Juncker (65 ans) a donné son accord pour ces écoutes.
Le témoignage de l'ancien Premier ministre était très attendu. Jean-Claude Juncker est arrivé au tribunal avec ses gardes du corps et après avoir prêté serment, il a démenti. "Je pense que je me serais rappelé avoir autorisé une telle écoute", a-t-il déclaré. Il avait déjà nié avoir donné son aval à ces écoutes lors de son audition en 2013 devant la commission d'enquête parlementaire sur les dysfonctionnements du service de Renseignements.
La commission avait toutefois conclu que la responsabilité politique de M. Juncker était engagée. Désavoué par ses alliés socialistes qui lui avaient retiré leur soutien, Jean-Claude Juncker avait dû convoquer des élections législatives anticipées que son parti, le CSV, avait perdues.
L'ancien Premier ministre avait été élu un an plus tard à la présidence de la Commission européenne. Libéré de ses obligations à Bruxelles en décembre 2019 et de contraintes médicales - deux éléments qui avaient poussés au report du procès - M. Juncker a enfin pu être entendu.
Marco Mille et les deux autres anciens agents du SREL sont accusés d'avoir participé à des écoutes illégales en 2007 et au détournement d'un CD crypté contenant notamment l'enregistrement d'une conversation entre le Grand-Duc Henri et Jean-Claude Juncker sur une série d'attentats qui ont fait cinq blessés dans les années 1980 au Grand-Duché.
La justice devra décider si les trois prévenus ont violé la loi sur la protection de la vie privée en réalisant des enregistrements et si ceux-ci ont été autorisés par les autorités compétentes, en l'occurrence Jean-Claude Juncker, responsable du SREL de par sa fonction.
La justice a retenu les accusations de violation de la protection de la vie privée et de vol du CD crypté pour les trois prévenus. L'un de leurs avocats a critiqué mardi le fait que la commission d'enquête parlementaire ait conclu à la responsabilité de M. Juncker, mais que l'intéressé soit cité comme simple témoin. Me Pol Urbany a aussi mis en cause le report du procès à trois reprises alors que l'instruction est bouclée depuis 2016.
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