Le Parquet russe s'est dit lundi favorable à l'emprisonnemecnt d'Alexeï Navalny, à la veille d'une audience au cours de laquelle l'opposant risque deux à trois ans de détention et au lendemain de la répression des nouvelles manifestations en sa faveur.
Cette répression a entraîné des condamnations occidentales, Paris appelant même Berlin à abandonner un important projet de gazoduc avec la Russie en guise de sanction.
Dans un communiqué, le Parquet a jugé "légale et justifiée" la demande des services pénitentiaires russes (FSIN) qui veulent révoquer le sursis du principal détracteur du Kremlin pour violation de son contrôle judiciaire dans le cadre d'une affaire remontant à 2014.
Cette mise au point témoigne de la détermination des autorités, malgré les manifestations organisées dimanche pour le deuxième week-end consécutif dans plus de cent villes de Russie pour réclamer sa libération.
Selon l'ONG OVD-Info, spécialisée dans le suivi des manifestations, 5.646 protestataires ont au total été arrêtés, un record, d'après cette source, dans l'histoire récente de la Russie.
Parmi eux, plus de 1.850 ont été interpellés à Moscou où les manifestants et les policiers ont joué toute la journée au chat et à la souris, la majeure partie du centre-ville ayant été bouclée, métro compris.
Plus de 1.300 arrestations ont également été recensées dans la deuxième plus grande agglomération, Saint-Pétersbourg.
- "Répression accélérée" -
"C'est une accélération des répressions politiques", a commenté auprès de l'AFP Léonid Drabkine, le coordinateur d'OVD-Info.
Le porte-parole du Kremlin Dmitri Peskov a quant à lui jugé la réponse policière justifiée et dénoncé la participation d'"un assez grand nombre de voyous et de provocateurs plus ou moins agressifs" à l'égard des forces de l'ordre.
Ennemi juré du pouvoir, Alexeï Navalny a été emprisonné à son retour en Russie le 17 janvier, après une convalescence de plusieurs mois en Allemagne pour un empoisonnement dont il impute la responsabilité au président Vladimir Poutine.
Motif de l'arrestation, la violation, selon les autorités, des conditions d'une peine de prison de trois ans et demi avec sursis prononcée en 2014 et qui pourrait être commuée en sentence ferme.
M. Navalny doit comparaître mardi et risque près de deux ans et demi de détention, car il a déjà effectué, assigné à résidence, une partie de la peine.
Ses partisans sont appelés à se rassembler devant le tribunal, une porte-parole de la justice russe, citée par des médias, ayant fait savoir qu'il est prévu que M. Navalny soit présent physiquement à l'audience.
- Gazoduc controversé -
Cet opposant de 44 ans est la cible de multiples procédures judiciaires. Vendredi, il doit comparaître pour avoir "diffamé" un ancien combattant. Il est aussi mis en cause dans une enquête pour escroquerie, ce qui le rend passible de dix ans de prison.
Parallèlement, plusieurs de ses alliés et collaborateurs ont été assignés à résidence, incarcérés ou poursuivis en justice ces dernières semaines. Certains risquent la prison pour la violation des "normes sanitaires" mises en place face à la propagation du coronavirus en organisant des manifestations.
Dans la capitale russe, les autorités ayant bouclé dimanche le centre-ville, des milliers de protestataires avaient dû se réunir plus au nord pour tenter de rejoindre la prison où M. Navalny est détenu.
La police a répliqué en interpellant à tour de bras et en usant de la force sans ménagement.
Les condamnations occidentales ont été unanimes. Le secrétaire d'Etat américain Antony Blinken a regretté des "tactiques brutales" et le chef de la diplomatie de l'UE, Josep Borrell, a "déploré les interpellations massives".
M. Borrell souhaite rencontrer Alexeï Navalny à l'occasion de sa visite prévue à Moscou du 4 au 6 février, a annoncé lundi le porte-parole du diplomate.
Le secrétaire d'Etat français aux Affaires européennes, Clément Beaune, a quant à lui laissé entendre que de nouvelles sanctions de l'UE contre Moscou pourraient être envisageables, estimant que l'Allemagne devait abandonner le projet de gazoduc Nord Stream 2 la reliant à la Russie.
La porte-parole du gouvernement allemand a pour sa part défendu lundi la réalisation de ce projet controversé, indiquant que Berlin n'avait pas modifié "sa position de base" sur le sujet.
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