Il a demandé "pardon" à la barre, 18 mois après l'accident qui avait couté la vie à deux fillettes, blessé un nourrisson et leur mère: deux ans de prison ferme ont été requis jeudi à Laon (Aisne) à l'encontre de ce chauffard.
"Il a tout fait pour essayer de ne pas assumer sa responsabilité", a estimé le procureur, Baptiste Porcher. "On a beau faire des campagnes de prévention, il y aura toujours une frange de conducteurs qui considèrent que la vie des autres ne les concerne pas". Il a requis 4 ans de prison dont deux ans avec sursis, avec mandat de dépôt, contre ce chef d'entreprise poursuivi pour "homicide involontaire" et "blessures involontaires". La décision a été mise en délibéré au 21 novembre.
"Je voulais dire que j'étais bouleversé par ce qui s'est passé. Tous les jours, à chaque instant, j'y pense", a déclaré le prévenu de 48 ans, très ému à l'audience. "J'ose demander pardon, mais je sais qu'on ne me pardonnera jamais".
Nadia Karmel, la mère des deux fillettes de trois ans et 26 mois et du nourrisson, a rejeté ces excuses. "Il a eu un an et demi pour les formuler", a souligné la jeune femme. "Il ne nous a même pas regardés, ni moi, ni ma famille en disant cela. Il n'a pas non plus présenté ses condoléances".
Elle a demandé aux juges "une peine exemplaire et des indemnités énormes", soit un million d'euros pour chaque enfant décédé, et 500 000 euros pour le bébé, victime de lésions axonales (forme sévère de traumatisme crânien), d'une fracture du fémur, et toujours sujet à des crises d'épilepsie.
"Il roulait trop vite"
Aux questions du tribunal sur les circonstances ayant provoqué la collision, le 3 avril 2018 sur une route départementale de l'Aisne reliant Laon à Reims, le prévenu a répondu par des phrases courtes, à peine audible. "Je ne me souviens de rien, je ne sais pas ce qui s'est passé", s'est-il contenté d'affirmer.
Le juge Laurent Favre l'a interrogé sur son véhicule, une Maserati acquise d'occasion trois jours avant le drame. "C'est quand même pas la voiture du commun des mortels, pourquoi l'avoir achetée ?". Le prévenu a répondu en mettant en avant des qualités de "confort et d'esthétisme", niant être un amateur de vitesse.
Il a plutôt évoqué une rupture de pente à l'endroit de l'accident, et rappelé les conditions météorologique le jour du drame. "L'orage était très important, il me semble que ma voiture est passée sur cette veine d'eau. C'est un phénomène qui existe et qui est connu".
Des "foutaises", a balayé Philippe Courtois, l'avocat des parties civiles. "Les décès sont liés exclusivement à la faute du prévenu, il roulait trop vite", a-t-il plaidé.
Une vitesse "impossible à déterminer"
La dernière expertise judiciaire a démontré que la Maserati roulait à 113 km/h lorsque son conducteur en a perdu le contrôle, sur une route limitée à 80 km/h, étant donnée la pluie qui tombait ce soir-là.
La défense n'a pas manqué de rappeler que d'autres expertises mesurant la vitesse du bolide avaient abouti à des résultats différents, et que celle-ci était donc "impossible à déterminer".
Il n'y a "qu'un seul fait objectif dans ce dossier", a estimé Me Gérard Chemla. "La vitesse des deux véhicules au moment du choc, 63 km/h pour la Maserati, 51 km/h pour le Renault Espace" de Mme Karmel. Il a fait part de son incompréhension face aux conséquences d'un choc à cette vitesse.
"Je ne dis pas que les enfants n'étaient pas attachés, mais toutefois, dans 80% des cas, les enfants sont mal attachés", a-t-il soutenu. Le prévenu avait déjà commis 9 infractions au code de la route, et subi deux suspensions de permis pour excès de vitesse. Au moment des faits, il disposait toutefois de tous ses points.
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