Au lendemain du chavirage d'un bateau de la SNSM qui a fait trois morts au large des Sables-d'Olonne, l'émotion était considérable dans le monde du secourisme maritime, avec le récit poignant des rescapés du naufrage.
"Nos trois camarades n'ont pas eu la même étoile que nous. Nous, on a eu une putain d'étoile et eux ne l'ont pas eue...", a expliqué David, la voix submergée d'émotion lors d'une conférence de presse samedi dans la cité balnéaire vendéenne, lui qui faisait partie des sept membres d'équipage du "Jack Morisseau".
Vendredi en fin de matinée, alors que la tempête Miguel fait rage, les sauveteurs de la SNSM des Sables-d'Olonne, qui font partie des 8.000 bénévoles de cette association, reçoivent un appel du Centre régional opérationnel de secours et de sauvetage (Cross) d'Etel: un pêcheur sur son chalutier de 12 m a activé sa balise de détresse au milieu d'une mer démontée. "Ils n'ont pas eu d'états d'âme, ils ont dit 'on y va' ", a expliqué Xavier De la Gorce, président de la SNSM.
"Si ça avait été à 500 m du rivage, ça aurait été beaucoup plus grave"
Remontant l'océan plein ouest - "comme les anciens nous ont appris" -- dans une mer déchaînée, les sauveteurs connaissent une avarie gravissime: "Les carreaux ont implosé", explique David. "Il n'y a eu aucun cri dans le bateau, personne n'a parlé, il n'y avait que des professionnels".
L'eau a commencé à rentrer dans la salle des machines et le bateau est rapidement devenu impossible à manoeuvrer, dérivant et prenant de la gîte, c'est-à-dire une augmentation de son inclinaison. "On a essayé d'écoper tant bien que mal", a relaté Christophe Monnereau, également responsable de la SNSM des Sables-d'Olonne.
Face à la force des vagues, certains sauveteurs ont été projetés de la passerelle et, à 200 m du rivage, sont parvenus à nager et à échapper à la mort. "Si ça avait été à 500 m du rivage, ça aurait été beaucoup plus grave, il aurait pu y avoir sept morts", a confié M. De la Gorce.
Trois sauveteurs ont eux été "pris au piège" à l'intérieur du bateau. "Les brassières de sécurité se sont gonflées et ça les a plaqués au plafond", a expliqué Xavier De la Gorce. Les trois sauveteurs morts, âgés de 28, 51 et 55 ans, certains père de famille, seront nommés chevaliers dans l'ordre national de la Légion d'honneur à titre posthume, a annoncé Emmanuel Macron, les qualifiant de "héros". Le marin-pêcheur, que certains sauveteurs connaissaient, n'a pas été retrouvé.
"Un hommage à l'échelle de ce drame"
Alors que la polémique enfle sur la sortie du marin-pêcheur malgré la tempête, le président de la SNSM a préféré mettre en exergue "la noblesse de l'engagement des sauveteurs", dressant un parallèle avec les deux membres du commando Hubert morts au Burkina Faso en sauvant deux touristes et les pompiers qui ont éteint l'incendie ravageant la cathédrale de Paris.
"Les pompiers de Notre-Dame ne se sont pas posé de question, il fallait y aller, ils y sont allés, les sauveteurs (en mer), c'est la même chose", a dit M. De la Gorce, précisant qu'il y aurait "un hommage à l'échelle de ce drame".
Il faut en effet remonter au 7 août 1986 au large de l'Aber-Wrac'h, dans le Finistère, pour retrouver un sauvetage aussi dramatique pour la SNSM, créée en 1967. Cinq sauveteurs bénévoles étaient morts noyés après avoir porté secours à un yacht.
Samedi, si le vent soufflait fort aux Sables-d'Olonne, le gros de la tempête Miguel était passé, qui privait d'électricité moins de 15.000 foyers à 15h30 dans le Centre-ouest, en Normandie et dans le nord de l'Aquitaine. A Paris, un homme a été grièvement blessé vendredi soir par un réverbère tombé suite à la chute d'un arbre.
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