Déconfinement, mode d'emploi: le gouvernement présente mardi son plan pour faire redémarrer le pays par étapes à partir du 11 mai, alors que l'épidémie continue de ralentir et qu'un médicament semble prometteur contre les formes graves du nouveau coronavirus.
> CORONAVIRUS en Belgique: les dernières infos
C'est à 15 heures que le Premier ministre, Edouard Philippe, présentera devant l'Assemblée les grandes règles à appliquer dans six domaines-clés: écoles, commerces, entreprises, tests et isolement des malades, masques et rassemblements.
Quinze jours ont passé depuis le discours du président Emmanuel Macron: le délai demandé est tenu. A deux semaines du Jour J, les arbitrages de cette stratégie tant attendue ont fait l'objet de six heures de réunion non stop à l'Elysée lundi.
Un discours suivi d'un débat et d'un vote
Autour d'Emmanuel Macron, le Premier ministre, le pilote du plan Jean Castex, les ministres Olivier Véran (Santé) et Jean-Michel Blanquer (Education) ont passé en revue les critères sanitaires, les objectifs et les règles dans tous les secteurs.
Quelques grands principes sont déjà connus, comme le retour des élèves à l'école sur la base du volontariat, l'adaptation locale sous la houlette des maires, la réouverture des commerces sauf les cafés-restaurants et le masque obligatoire dans les transports en commun.
Le plan présenté mardi portera d'abord sur les trois prochaines semaines de mai, avec une clause de revoyure début juin, dans un esprit "ultra-pragmatique", précise un proche de l'exécutif. Avec trois grands principes: "progressivité, réversibilité et adaptabilité". "Le chef de l'Etat et le gouvernement ont un objectif clair: protéger les Francais dans un contexte où nous devons vivre avec le virus. D'où des contraintes proportionnées et choisies, et des règles allant du 11 mai à la fin du mois, suivies d'une nouvelle période à partir de début juin", détaille cette source.
23.293 décès en France
Après le discours d'Edouard Philippe, le plan fera l'objet d'un débat de 2h30 avec les députés, dont 75 pourront être physiquement présents, puis sera soumis au vote - une procédure qui n'était pas obligatoire.
Un vote qui sera "probablement l'une des décisions les plus lourdes qu'un parlementaire aura eues à prendre depuis la Seconde guerre mondiale", a observé lundi soir le dirigeant PS, Olivier Faure, regrettant le peu de temps laissé aux députés pour débattre et juger.
Tout l'enjeu est de faire repartir l'économie sans déclencher une deuxième flambée de l'épidémie, ralentie mais pas stoppée par 42 jours de confinement.
Lundi soir, le bilan du coronavirus en France atteignait 23.293 décès, soit 437 de plus en 24 heures, dont 295 dans les hôpitaux. Le nombre de personnes en réanimation continue de décroître lentement, avec 74 malades de moins. Contrairement aux espoirs d'Emmanuel Macron d'en faire un "plan de toute la nation", la majorité présidentielle risque d'être seule à voter le plan, fustigé d'avance par les oppositions de droite comme de gauche.
Un point de litige: le traçage des malades
D'abord par principe: les partis d'opposition, qui découvriront les mesures prévues en même temps que le reste des Français, ont réclamé en vain 24 heures de réflexion supplémentaires pour examiner ce texte majeur.
"C'est une brutalité de plus", a dénoncé sur Twitter Jean-Luc Mélenchon (LFI). Les communistes comme le PS ont appelé à "déconfiner notre démocratie" et dénoncé un "vote sous pression" quand le patron des députés LR, Damien Abad, a regretté "un déni de démocratie". Même quelques députés LREM comme Martine Wonner ont regretté un délai jugé trop court.
Sur le fond, LR, LFI et le PS critiquent notamment le retour des élèves à l'école sur la base du volontariat. Et s'interrogent sur la logistique: y aura-t-il assez de masques le 11 mai? De tests? Comment seront isolés les malades?
Des syndicats d'enseignants et des maires jugent aussi le délai trop court pour appliquer aux écoles les règles très contraignantes préconisées par le Conseil scientifique.
Autre point litigieux, le projet d'application de traçage des contacts des porteurs du virus, "StopCovid", contestée jusque dans les rangs de la majorité. Elle risque surtout de ne jamais être prête à temps, selon des parlementaires LREM.
26 millions de masques grand public
Le tout dans un climat de défiance persistant chez les Français, dont une majorité ne fait pas confiance à l'exécutif pour piloter le déconfinement.
Grâce à sa confortable majorité, le vote ne devrait être pour le gouvernement qu'une formalité. Dès mercredi, le Premier ministre a d'ailleurs prévu de présenter son plan aux élus locaux et aux préfets, puis aux partenaires sociaux probablement jeudi.>- Masques en tissu -
Pour préparer le 11 mai, le gouvernement est passé à la vitesse supérieure pour fournir les Français en masques.
La France disposera de plus de 26 millions de masques grand public par semaine dès la fin avril, dont près la moitié produits dans le pays, a promis Bercy lundi. Pharmacies et buralistes seront autorisés à les vendre. Bercy a même autorisé vendredi les magasins de tissu à rouvrir, pour encourager les couturiers amateurs.
Un nouvel élément pourrait cependant changer la donne sanitaire: un médicament, l'immuno-modulateur tocilizumab, a montré son efficacité pour prévenir les formes graves de pneumonies du Covid-19, selon une étude française non encore publiée.
En revanche, le confinement qui dure depuis 43 jours poursuit ses ravages sur l'économie. Ainsi, le taux de chômage est remonté de 7% en mars, retrouvant son niveau de 2017.
Au point que le gouvernement compte "adapter rapidement" les règles d'assurance chômage, qu'il avait durcies dans une récente réforme.
Vos commentaires