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De plus en plus de mamans sont sans logement en sortant de la maternité en France: "Déjà quand j'étais enceinte, je venais dormir aux urgences"

De plus en plus de mamans sont sans logement en sortant de la maternité en France: "Déjà quand j'étais enceinte, je venais dormir aux urgences"
 
 

"On veut juste un petit coin", dit Bintou, 28 ans, sa petite fille d'à peine quelques semaines blottie contre son sein. Sans nulle part où aller à la sortie de la maternité, elle a été accueillie dans un des premiers centres d'hébergement d'urgence à Paris dédié aux jeunes mères sans-abris, dont le nombre explose.


Des dizaines de mamans ou futures mamans concernées à Paris

"On a vu un afflux important, le centre s'est rempli en à peine une semaine", explique Alice Monchambert de la Croix-Rouge, qui gère ce centre situé près des Invalides. Ouvert le 17 décembre et pour trois mois dans les anciens locaux de la région Ile-de-France, le lieu accueille 22 mères et leurs bébés âgés de quelques jours à un mois.

Fin novembre en Ile-de-France, quinze femmes sortant d'une maternité étaient en attente d'hébergement et 62 femmes enceintes sans-abris avec un terme proche étaient identifiées pour une demande d'hébergement, détaille le ministère du Logement à l'AFP.

De plus en plus régulièrement des cas de mères en situation de précarité

Installée dans l'ancien bureau n°20 transformé en chambre avec un lit une place et un petit lit à barreaux, Bintou a rangé soigneusement ses quelques affaires dans une armoire à classeurs. Sa fille Malika avait tout juste une semaine lorsque le 115 (numéro d'urgence) les a orientées vers ce centre.

"Ici, on nous donne le lait et les couches. Pour le reste, il faut jouer avec la chance", dit-elle en regardant le ciel. Victime de violences dont elle porte encore les marques sur le corps, elle préfère tenter le tout pour le tout, plutôt que de retourner auprès du père de son enfant.

Les maternités sont confrontées "de plus en plus régulièrement à des cas de mères en situation de précarité qui accouchent et n'ont aucun lieu d'hébergement à la sortie de la maternité", alertent les Hôpitaux publics de Paris (AP-HP).

Selon l'Agence régionale de santé (ARS), le phénomène touche en particulier douze établissements en France, qui signalent au moins un cas par semaine. Parmi ces maternités, onze sont en Ile-de-France (IDF).

Dans la région, au moins 2.400 femmes se sont retrouvées dans cette situation en 2017. Un chiffre en hausse par rapport aux années précédentes (2.000 en 2016) et ne sont que des estimations partielles, souligne l'ARS.

Déjà quand j'étais enceinte, je venais dormir aux urgences pour ne pas rester dehors

Face au besoin, l'hébergement d'urgence s'organise. Avant le nouveau centre de la Croix-Rouge, une expérimentation avait été lancée par l'AP-HP à l'Hôtel-Dieu. Également dédié aux femmes sortant de maternité, cet accueil géré par l'association Aurore et qui va être pérennisé, a reçu 181 femmes et 188 bébés depuis mars 2017.

À Paris, l'État assure 196 places d'hébergement dédiées aux femmes enceintes ou sortant de maternité, selon le ministère du Logement. Mais les places manquent encore et souvent après la naissance, c'est le système D. "Il peut arriver que des mères prises en charge dans les maternités de l'AP-HP restent quelques jours supplémentaires, le temps de trouver une solution d'hébergement", expliquent les Hôpitaux de Paris.

La durée moyenne d'hospitalisation pour ces femmes dans les maternités publiques parisiennes est de quatorze jours, contre deux ou trois jours normalement.

"Déjà quand j'étais enceinte, je venais dormir aux urgences pour ne pas rester dehors", raconte Bintou. "Ils nous laissent dormir sur les brancards quand il n'y a pas trop de malades".


Des cas de "bébés papiers"

Comme elle, certaines se sont retrouvées à la rue après avoir dévoilé une grossesse hors mariage ou avec un homme d'une autre confession religieuse. D'autres ont fui des violences, un mariage forcé ou ont été victimes d'un viol. Beaucoup sont sans-papiers: selon l'AP-HP, la majorité de ces femmes sont des migrantes originaires d'Afrique subsaharienne ou du Maghreb.

"J'ai fait une demande d'asile, elle a été rejetée. Mais je vais refaire une demande: j'attends que le bébé ouvre bien les yeux pour pouvoir faire une photo pour sa carte d'identité", explique Pamela, originaire du Congo-Brazzaville et maman d'un petit garçon de dix jours.

Pour certaines, une fois sur le territoire français, avoir un enfant d'un père français est un pass pour obtenir un droit de séjour. "Il y a des cas de 'bébés-papiers'. C'est une question de survie pour ces femmes, elles n'ont pas le choix", explique Béatrice Bilde, directrice de la résidence maternelle Les Lilas à Paris, un centre d'accueil mère-enfant ouvert toute l'année et géré par l'Armée du Salut. "Généralement, le père reconnaît l'enfant et peut subvenir financièrement à ses besoins, mais il ne s'en occupe pas", dit-elle.

Il existe dix centres maternels comme celui-ci à Paris. Ceux-ci n'agissent pas dans l'urgence pour mettre à l'abri des personnes à la rue mais proposent un accompagnement long, possible jusqu'aux trois ans de l'enfant, dans le cadre de l'Aide sociale à l'enfance. Un des objectifs est notamment de trouver une alternative à un placement de l'enfant.

"Les bébés arrivent dans un état de santé plutôt bon, mais certains sont hypertendus et ont besoin d'être rassurés: il y a du travail à faire sur la parentalité et le lien mère-enfant", explique la directrice adjointe Françoise Bousquet.

En cas de doute concernant un "bébé-papier", les mères risquent un placement en centre de rétention et un renvoi vers leur pays d'origine. "Il est rarissime qu'on sépare la mère de l'enfant. De manière générale, il n'y a pas de placement parce que la mère n'est pas en capacité financière de s'en occuper, mais plutôt parce qu'il y a de la maltraitance psychologique et parfois physique", explique Mme Bilde.


 

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