Une cagnotte de soutien à l'ancien boxeur Christophe Dettinger, soupçonné d'avoir agressé deux gendarmes samedi à Paris lors de la manifestation des "gilets jaunes", a rencontré un vif succès avant d'être close mardi devant le tollé suscité par l'initiative.
Leetchi, plateforme en ligne de collecte de dons, a annoncé en milieu de journée avoir clos cette cagnotte, moins de 48 heures après sa mise en ligne.
"Au vu du montant atteint à ce jour, la cagnotte n'accepte désormais plus de contributions", a indiqué Leetchi dans un communiqué sur son site internet.
Cette cagnotte contenait plus de 117.000 euros mardi matin vers 08H30, une somme destinée à soutenir Christophe Dettinger, qui s'est rendu à la police lundi.
Dans la matinée, le nombre de donateurs a continué à grimper (8.038 à la fermeture), mais le montant récolté n'était plus visible, le créateur de la cagnotte, un proche de M. Dettinger, ayant décidé de le masquer.
L'ancien champion de boxe est soupçonné d'avoir porté des coups à deux gendarmes sur une passerelle à Paris lors de "l'acte VIII" des "gilets jaunes".
Dans une vidéo publiée avant de se rendre, il a admis avoir "mal réagi" mais s'être "défendu" face aux violences policières.
"Leetchi s'engage à ce que les fonds collectés (...) servent uniquement à financer les frais de justice conformément à nos (conditions générales d'utilisation) et à la législation en vigueur", qui "proscrivent toute incitation à la haine ou à la violence", a écrit la plateforme. "Compte tenu des actes reprochés à Christophe Dettinger, aucune autre utilisation de la cagnotte ne saurait être acceptée", a-t-elle ajouté.
- "Cagnotte de la honte" -
Cette fermeture a rapidement été condamnée par le leader de la France Insoumise, Jean-Luc Mélenchon. "Le but de ceux qui veulent interdire cette collecte est de détruire la famille aussi. Honte à eux", a-t-il tweeté.
Dans un autre tweet, la Gendarmerie nationale a estimé que la clôture "logique" de la cagnotte n'enlevait "rien à son caractère choquant". Le succès de l'initiative avait suscité une avalanche de réactions politiques indignées, notamment dans le camp du gouvernement.
"Je ne comprends pas que l'on puisse mettre un centime d'euro pour défendre un homme qui s'est attaqué avec autant de violence et de lâcheté" aux forces de l'ordre, a ainsi estimé le ministre de l'Economie Bruno Le Maire mardi soir dans l'émission C à Vous sur France 5.
"A quel degré de haine on en est arrivé dans le débat public pour qu'il y ait des gens qui décident de financer des violences gratuites contre une personne dont la responsabilité est de maintenir l'ordre public?", s'était interrogée, la secrétaire d'Etat à l'Egalité entre les femmes et les hommes, Marlène Schiappa. La ministre des Transports Elisabeth Borne avait estimé que le succès de cette cagnotte était "choquant".
"Apparemment, ça rapporte de frapper un policier", a tweeté le secrétaire d'Etat chargé du Numérique, Mounir Mahjoubi.
- Une cagnotte légale -
Cette cagnotte est "immorale mais elle est malheureusement légale", en raison d'un "vide juridique", a indiqué à l'AFP Anthony Bem, avocat spécialisé en droit d'internet.
"La loi interdit de faire financer des dommages et intérêts, des amendes ou des frais de condamnation judiciaire, ce qui veut dire que la condamnation doit exister au préalable", a-t-il expliqué. Or, dans le cas de la cagnotte destinée à M. Dettinger, "on fait financer un procès qui va avoir lieu".
Sur Twitter, des internautes critiquant l'initiative ont interpellé Leetchi, qui a répondu qu'en tant que "plateforme", elle se devait de rester "neutre".
S'adressant à Leetchi sur Twitter, Aurore Bergé, porte-parole des députés LREM, l'a incitée à "reverser une éventuelle commission aux associations des orphelins de la police et de la gendarmerie par exemple" afin de "soutenir ceux qui nous protègent et risquent leurs vies plutôt que ceux qui les tabassent".
Plusieurs cagnottes en soutien des forces de l'ordre ont également été ouvertes, dont une sur Leetchi comptait mardi soir plus de 90.000 euros.
Leetchi est une filiale depuis 2015 du groupe Arkéa, qui rassemble les fédérations Bretagne, Sud-Ouest et Massif Central du Crédit Mutuel.
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