Au lendemain d'une troisième journée de manifestations contre la réforme des retraites et à trois jours des vacances de Noël, Edouard Philippe a reçu mercredi les partenaires sociaux avec le nouveau "M. retraites", pour trouver une sortie à la crise, qu'Emmanuel Macron espère calmer en améliorant le projet.
Selon son entourage, le président est "disposé à améliorer" sa réforme, notamment "autour de l'âge pivot" ou "âge d'équilibre", qui braque les syndicats soutenant le principe d'un système universel à points, la CFDT en tête.
"C'est dans l'ordre des choses qu'il y ait des avancées d'ici la fin de la semaine", a relevé l’Élysée, précisant que le chef de l’État s'était fixé pour "objectif d'obtenir une pause" de la mobilisation "pendant les fêtes" de fin d'année.
Tous dans la rue mardi, les leaders syndicaux ont été reçus tour à tour à Matignon par Edouard Philippe.
Selon eux, le Premier ministre n'a pas confirmé les signaux d'ouverture qu'ils ont cru percevoir à l'Elysée.
"Il nous a dit que ce n'était pas exactement le président qui avait parlé ce matin mais son entourage", a indiqué Yves Veyrier (FO).
"On a compris que (la) détermination (du Premier ministre) était complète, la nôtre l'est aussi", a-t-il prévenu.
A l'issue de son entretien, Laurent Berger, "un peu fatigué" et "préoccupé", a affirmé être "très, très loin, encore, d'être d'accord" avec le gouvernement. Le Premier ministre "a redit qu'il tenait à cet âge d'équilibre. On lui a redit que ce n'était pas une option pour nous", a déclaré M. Berger, tout en "sentant une volonté de discussion" sur d'autres thèmes comme la pénibilité.
Laurent Escure (Unsa), prudent, a noté "des ouvertures" notamment sur "la pénibilité, les fins de carrière, le minimum de pension", mais elles "restent à confirmer".
L'âge d'équilibre que le gouvernement veut fixer à 64 ans en 2027, avec un "bonus-malus" censé inciter chacun à travailler plus longtemps, est une "mesure punitive" pour l'Unsa.
Du côté de la CGT, Philippe Martinez, a rappelé que son organisation demandait "le retrait du projet de loi" et regretté la "position idéologique" du gouvernement, qui ne fait "rien pour apaiser (le) mécontentement".
Côté employeurs, le président du Medef, Geoffroy Roux de Bézieux, a rappelé "nos deux lignes rouges: "ne pas augmenter les cotisations, ne pas puiser dans les réserves" des régimes de retraite.
M. Philippe a prévu de revoir les partenaires sociaux "ensemble lors d'une multilatérale" jeudi à 15H30.
"Je ne suis pas certain que demain il puisse y avoir des éléments de compromis", a jugé Alain Griset (U2P, artisans).
Face aux partenaires sociaux avait pris place le nouveau "M. retraites", Laurent Pietraszewski, qui a remplacé le haut-commissaire aux Retraites démissionnaire, Jean-Paul Delevoye, rattrapé par des révélations sur ses activités parallèles et mandats non déclarés.
La Haute autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) a annoncé mercredi avoir saisi la justice pour les "omissions" en "nombre" dans sa déclaration d'intérêts.
Le nouveau secrétaire d'Etat chargé des retraites a dû pour sa part s'expliquer sur les 71.872 euros d'indemnités de licenciement économique perçus en 2019 en plus de ses revenus de député.
Après les partenaires sociaux, Edouard Philippe doit recevoir jeudi les dirigeants de la RATP et de la SNCF.
La compagnie ferroviaire affirme qu'elle pourra transporter ce week-end tous les passagers ayant déjà réservé un billet TGV. Mais pour l'instant, tous les syndicats de cheminots refusent la "trêve" de Noël. Le plan de transport pour la période du 23 au 26 doit être communiqué jeudi.
En attendant, le trafic restera "très perturbé" jeudi à la SNCF, avec deux TGV sur 5 en moyenne, 4 TER sur 10 et un Transilien sur 4. Trafic également "très perturbé" à la RATP, mais avec une légère amélioration puisque 6 lignes de métro resteront complètement fermées contre 8 mercredi.
Face à ces perturbations, le gouvernement a pris un arrêté qui permet aux chauffeurs de transport routier de voyageurs de rouler 2 heures de plus par jour jusqu'au 24 décembre, une mesure qui n'a d'autre but, selon le syndicat Solidaires Transports que de "casser la grève".
- Conseil d'Etat avant Noël -
Mardi, troisième journée de mobilisation, les syndicats avaient rassemblé dans la rue 615.000 manifestants dans tout le pays, selon le ministère de l'Intérieur. La CGT a revendiqué 1,8 million de participants.
Près de six Français sur dix (57%) se disent opposés à la réforme des retraites du gouvernement, une défiance qui a progressé de 8 points en une semaine, selon un sondage Elabe pour BFMTV publié mercredi.
La CGT, FO, la CFE-CGC, Solidaires et la FSU, qui réclament le retrait pur et simple du projet, ont lancé un "ultimatum" au gouvernement à l'issue d'une intersyndicale mardi soir, en décidant de nouvelles actions locales jusqu'à la fin décembre. Des manifestations étaient prévues jeudi, dont une à Paris, de la gare de Lyon à la gare de l'Est.
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