Dans la chaleur des flammes et les épaisses fumées étouffantes, les soldats du feu livraient lundi pour le 7e jour consécutif une bataille acharnée contre le brasier de l'île d'Eubée, à 200 km à l'est d'Athènes, le plus destructeur des incendies qui touchent encore la Grèce et la Turquie.
La Grèce et la Turquie traversent depuis le 28 juillet dernier une vague d'incendies violents, favorisés par la sécheresse et des températures caniculaires, qui ont fait dix morts en tout et des dizaines de blessés hospitalisés. Les incendies continuent de dévorer des milliers d'hectares de forêts en Grèce, battant un record en surfaces brûlées au 11e jour de cet "été cauchemardesque", selon le Premier ministre grec, alors que la situation semble se stabiliser en Turquie voisine, grâce à l'arrivée de la pluie.
"C'est une catastrophe abominable. J'ai bien peur que seuls mes arrière-petits-enfants aient la chance de marcher à nouveau sur ces terres. C'est un désastre énorme", a lâché, dans un sanglot, Tasos Tsilivakos, un retraité interrogé par l'AFP à Pefkofyto, au nord d'Athènes. En 10 jours, 56.000 hectares sont partis en fumée en Grèce. 100.000 en Turquie...
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Bilan des incendies en Grèce et en Turquie
Dans la région turque de Mugla, deux ouvriers forestiers ont été blessés par la chute d'un arbre en feu à Mentese et transportés à l'hôpital, a rapporté lundi la télévision d'Etat TRT. Les flammes ont détruit plusieurs secteurs de la province de Mugla, où les pompiers turcs continuaient de lutter pour arrêter la course folle du feu de forêt.
Aux portes d'Athènes, le sinistre qui a détruit des dizaines d'habitations et d'entreprises était en rémission depuis dimanche mais "le danger de résurgence est élevé", a prévenu M. Hardalias. De nombreuses forces terrestres continuaient lundi matin de lutter contre les flammèches au pied du mont Parnès, en particulier les unités venues d'Israël mais aussi de Chypre et de France dans le cadre du dispositif européen d'aide aux incendies, selon les pompiers.
Situation toujours préoccupante sur l'île d'Eubée en Grèce
Un incendie a été maîtrisé en Crète, tandis que la situation était stabilisée dans le Péloponnèse où quelque 300 pompiers restaient mobilisés lundi matin, selon les autorités. Si la plupart des feux en cours depuis près de deux semaines étaient stabilisés ou en rémission lundi en Grèce et en Turquie, le nord d'Eubée, la deuxième plus grande île de Grèce, présentait toujours un panorama apocalyptique.
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Evacuation sur l'île d'Eubée, 650 pompiers toujours mobilisés
Le village côtier de Pefki, dans le nord de l'île d'Eubée, s'est réveillé dans un épais nuage de fumée âcre, a constaté une équipe de l'AFP. Quelque 300 personnes évacuées de villages alentours ont passé la nuit dans un ferry amarré sur la longue plage. Au large, un bateau militaire attend tel un vaisseau fantôme sur un horizon imperceptible. Le ferry "était le seul endroit où les gens pouvaient trouver un peu de calme et de sécurité", a expliqué à l'AFP un responsable militaire en faction, Panagiotis Charalambos.
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Comme beaucoup de localités proches, Pefki "n'avait plus d'électricité ni d'eau", a précisé le capitaine de port adjoint. Ces derniers jours, dans le nord d'Eubée, "les gardes-côtes ont effectué des dizaines d'opérations de sauvetage. 2.600 personnes ont été évacuées depuis le début de l'incendie", dit-il, les yeux embués par l'atmosphère asphyxiante. Sur le front de l'incendie, les villages de Kamatriades et Galatsades devaient être les priorités des pompiers lundi. Car "si le feu passe par là, il se trouvera dans une forêt épaisse et difficile à éteindre", selon les pompiers cités par l'agence grecque de presse ANA.
Parmi les quelque 650 soldats du feu opérant lundi sur l'île, figurent quelque 250 pompiers venus d'Ukraine, de Serbie et de Roumanie, renforcés par 11 avions et hélicoptères bombardiers d'eau, a précisé la protection civile.
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Les habitants constatent les impressionnants dégâts: "Il ne reste plus rien"
Un à un, des dizaines de villages assiégés par le feu ont été entièrement vidés de leurs populations, au grand désespoir des locaux, dont les biens et les terres ont été réduits en cendres. "Ici, les gens vivaient de la forêt, des récoltes, des olives et du tourisme. Il ne reste plus rien de tout ça", a déclaré Louisa, une retraitée rencontrée à Pefki par l'AFP.
Le feu a ravagé des forêts entières © Belga
Le ministre grec des Finances Christos Staikouras a annoncé sur la chaîne publique ERT TV que des aides d'un maximum de 6.000 euros par foyer seraient allouées aux habitants dont les maisons ont subi des dégâts, ainsi qu'une somme de 4.500 euros pour les blessés.
Les habitants, des maires et gouverneurs dénoncent des "moyens insuffisants"
Dans la ville d'Aidipsos, des collectes de produits de première nécessité s'organisaient pour les villageois qui ont tout perdu dans l'incendie. "Vous avez vu l'Etat nous offrir de l'eau? Des goûters aux enfants? Personne. Ils laissent les commerçants et les individus donner de l'eau aux gens", a déclaré, furieux, Giorgos, interrogé par l'AFP à Pefki.
La polémique a enflé ces derniers jours sur le manque de moyens alloués par la Grèce à la lutte contre les incendies, en particulier à Eubée. Le vice-gouverneur d'Eubée Giorgos Kelaïtzidis, de même que de nombreux maires et habitants, ont dénoncé des forces "insuffisantes" alors que la situation était "critique" sur l'île.
Les moyens aériens rencontrent de "sérieuses difficultés" à cause des turbulences, des fumées et d'une visibilité limitée, avait rétorqué dimanche le vice-ministre de la protection civile Nikos Hardalias. Le ministre des Finances a ajouté lundi que le budget de la protection civile serait boosté d'1,76 milliard d'euros et que 224 millions d'euros seraient alloués à la reforestation.
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