Le président élu des Etats-Unis Donald Trump a promis dimanche d'expulser jusqu'à 3 millions d'immigrés clandestins, revenant à la ligne dure de sa campagne et rompant avec la modération affichée depuis son élection.
Ce projet d'expulsion de masse, dévoilé dans un entretien qui sera diffusé dimanche sur la chaîne CBS, concerne les "criminels", les personnes ayant des antécédents judiciaires, "qui appartiennent à des gangs, qui sont des trafiquants de drogue". Selon lui, ils représentent "sans doute 2 millions" de personnes, mais "ça peut aussi être 3 millions", qui seront renvoyées dans leur pays d'origine ou incarcérées aux Etats-Unis, a promis l'homme d'affaires.
Après avoir modéré son discours sur plusieurs dossiers majeurs depuis sa victoire mardi, notamment la réforme de l'assurance-maladie de Barack Obama (Obamacare) ou les poursuites judiciaires éventuelles contre Hillary Clinton, le magnat de l'immobilier est brutalement revenu à la ligne dure de sa campagne.
Fin août, à Phoenix (sud-ouest), il avait déjà promis d'expulser, au premier jour de sa présidence, ces deux millions de "criminels étrangers" qui se trouveraient illégalement aux Etats-Unis.
Un représentant républicain venait d'annoncer l'inverse...
L'annonce de dimanche a également créé un couac avec la majorité républicaine. Interrogé sur la chaîne CNN, le chef de file des républicains à la Chambre des représentants, Paul Ryan, a assuré que Donald Trump ne prévoyait pas de créer des équipes dédiées aux expulsions de clandestins et que la priorité restait la "sécurisation" des frontières. Ce raté a passablement plombé les efforts de Paul Ryan pour rassurer, lors de cet entretien, sur les intentions du nouveau président.
Quelques minutes plus tôt, sur la chaîne Fox, la directrice de campagne de Donald Trump, Kellyanne Conway, avait, elle aussi, rompu avec le nouveau discours accommodant du président élu en assurant que l'Obamacare serait purement et simplement "abrogé".
Autre signe d'une inflexion, elle a estimé qu'il appartenait aux démocrates, et non à Donald Trump, de s'adresser aux dizaines de milliers de manifestants qui ont encore arpenté les rues de plusieurs grandes villes samedi, pour le quatrième jour d'affilée.
Regain de tensions raciales?
Dans un tweet samedi, Donald Trump avait appelé les Américains à s'unir, quand les manifestants craignent que son élection n'exacerbe les tensions raciales dans le pays. L'organisation américaine de défense des droits civiques SPLC (Southern Poverty Law Center) a recensé sur son site internet 200 incidents à caractère raciste depuis l'élection de Trump mardi.
Des dizaines de milliers de manifestants ont encore défilé samedi, plus de 10.000 à New York et autant à Los Angeles, plusieurs milliers à Chicago. Epingle à nourrice à la poitrine, devenue symbole de soutien aux minorités attaquées par la candidat républicain pendant la campagne, ils expriment leurs craintes d'une poussée de xénophonie dans tout le pays.
Selon un sondage ABC News/Washington Post, 74% des Américains jugent cependant légitime l'élection de Donald Trump, avec des variations fortes selon les camps politiques: 99% des partisans du nouveau président reconnaissent l'élection, mais seulement 58% des partisans de sa rivale Hillary Clinton.
Retour aux thèses complotistes dans le camp Trump
Autre signe d'un retour aux antiennes de la campagne, à la ligne complotiste en l'occurrence, Kellyanne Conway a laissé entendre dimanche que beaucoup des manifestants étaient "payés" par les démocrates pour défiler.
Le président élu, lui, s'en est aussi pris aux médias, l'une de ses cibles favorites depuis plus d'un an, en l'occurrence le New York Times, visé par trois tweets cinglants dimanche, dont l'un accusait le quotidien d'être "malhonnête" dans sa couverture.
Dans l'entretien à CBS, Donald Trump explique qu'il continuera à communiquer sur le réseau social, qui l'a "aidé" à remporter l'élection, mais plus modérément que pendant la campagne.
Trump prépare son futur gouvernement
Les regards restaient tournés dimanche vers la tour Trump à New York, dans laquelle le président élu passe le week-end pour préparer son futur gouvernement. "Il reçoit beaucoup de visiteurs", a reconnu Mme Conway. Parmi ces derniers figuraient samedi Nigel Farage, président du parti europhobe et anti-immigrés Ukip, qui a soutenu le vote britannique en faveur d'une sortie du Royame-Uni de l'Union européenne (Brexit).
Kellyanne Conway a promis samedi une annonce "imminente" pour le poste de "chief of staff", le puissant secrétaire général de la Maison Blanche qui orchestrera toute l'administration du nouveau président populiste. Elle a confirmé que le président du parti républicain Reince Priebus faisait partie des candidats.
Un autre prétendant cité à cette fonction est le patron de sa campagne et chef du site d'informations Breitbart News, Stephen Bannon, avec lequel la député française d'extrême-droite Marion Maréchal-Le Pen, nièce de la présidente du Front national, a dit samedi avoir l'intention de travailler.
En marge de la transition présidentielle, Donald Trump a demandé par l'intermédiaire de ses avocats le report du procès pour des fraudes supposées de son université éponyme, qui doit normalement démarrer le 28 novembre.
Ses avocats ont expliqué que le futur président devait préparer sa prise de fonction et serait désavantagé s'il ne pouvait témoigner en personne.
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