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Au collège de Samuel Paty, les élèves ont pu "tout lâcher" à la rentrée

 

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Des post-it pour coucher leurs angoisses, des lettres pour s'adresser à Samuel Paty et, surtout, des camarades pour partager leur douleur: les élèves du collège du Bois-d'Aulne ont pu "tout lâcher" mardi lors de leur rentrée, deux semaines après l'assassinat de Samuel Paty.

"Avant de venir, je sentais comme un malaise autour de l'école. J'avais encore moins envie de venir que d'habitude", raconte à l'AFP Maéva, une élève de 3e dont M. Paty était le professeur d'histoire-géographie.

Après leurs enseignants la veille, les 750 élèves de Conflans-Sainte-Honorine (Yvelines) ont retrouvé progressivement leurs salles de classe pour des sessions de deux heures, sous l'œil vigilant de policiers armés.

Une rentrée décalée, sous confinement sanitaire et en alerte maximale contre la menace terroriste, pour des collégiens toujours très secoués par l'attentat qui a coûté la vie à l'enseignant qui avait montré des caricatures du prophète Mahomet lors d'un cours sur la laïcité.

Mardi, chacune de leurs classes a été accompagnée par plusieurs enseignants et un psychologue. "Ils nous ont demandé d'écrire sur des post-it ce qu'on ressentait", rapporte Maéva, "moi j'ai écrit +tristesse+".

Lou, en 5e, a écrit "au bout des larmes" car "les professeurs, ça se voyait, ils étaient trop tristes".

Ilies, "très angoissé", confie n'avoir pas eu, lui non plus, "très envie de revenir" en cours. Lui dit avoir particulièrement aimé qu'on lui suggère d'écrire une lettre à son ancien enseignant, cette "bonne personne".

"Je m'y attendais pas, je pensais qu'on allait juste parler", raconte l'adolescent, 14 ans. "J'ai pris le temps pour ne pas écrire n'importe quoi", raconte-t-il, sa lettre précieusement conservée dans son sac à dos.

Ilies a aussi apprécié les temps de parole.

"Le psychologue nous a dit de surtout tout lâcher, de dire si on trouvait ça bien ou pas de montrer des caricatures", explique-t-il, soulignant que "huit à dix personnes ont dit ne pas trouver ça bien". "Il faudrait qu'on ait d'autres moments comme ça au collège, parce que beaucoup ne se rendent pas compte".

- "Un arbre florissant" -

Pour Juliette, autre élève de 3e, cette rentrée permet de se sentir "moins seule (...) dans son incompréhension", face à un acte d'une violence inouïe.

"Un professeur nous a dit qu'il ne pouvait pas comprendre ce qui s'était passé. La psychologue nous a aussi dit que c'était totalement normal de pas comprendre. Ça fait du bien d'entendre ça".

Un constat qui tranche avec ses premières inquiétudes, confiées à l'AFP pendant les vacances de la Toussaint. La jeune fille redoutait la rentrée, craignant que ses propos puissent être "mal interprétés". "Les trois quarts de ceux qui ont parlé en classe pensent la même chose que moi", a-t-elle pu constater mardi, rassurée.

Juliette se sent même assez en confiance pour vouloir "demander à la CPE de planter un arbre florissant". "Ça montrera que, même si Monsieur Paty est décédé, sa pensée est toujours là. Cet arbre, c'est le professeur".

D'autres élèves ont aussi évoqué l'idée de lâcher des ballons dans le ciel, d'ériger un mur pour accrocher des dessins et des poèmes...

Malgré ces promesses de cicatrisation, des craintes subsistent.

Comment rassurer Lou, 12 ans, qui ne veut plus rentrer chez elle sans ses copines, de peur d'être enlevée ? "Ce serait bien que les policiers soient partout, pas que devant le collège", dit-elle.

Ou comment Juliette pourra-t-elle "passer à autre chose" si elle "passe devant la salle de M. Paty tous les jours" ? "Je vais devoir faire abstraction", analyse l'adolescente, qui use de mots d'adultes face à un drame qui la dépasse.

Et si Maéva s'estime "prête à se relancer dans sa vie", elle se sent aussi "bizarre" à l'idée de suivre des cours d'histoire-géo avec un autre enseignant. "Ils nous ont dit aujourd'hui qu'ils allaient trouver le remplaçant en moins d'une semaine, mais je trouve ça trop court", confie-t-elle.

Ce n'est pas l'avis de sa mère Patricia. "Mais si ma puce, c'est bien", lui dit-elle à la sortie des cours. "Ce qui serait terrible, c'est que tu n'aies plus de cours d'histoire et c'est important que le message (de M. Paty) se perpétue".


 

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