Emmanuel Macron a souligné, mercredi, la gravité des enjeux de la rentrée en appelant le gouvernement et la majorité à "l'unité" face aux effets de la crise climatique et à "la fin de l'abondance".
Après trois semaines de vacances, le chef de l’État a fixé le cap au début du conseil des ministres de rentrée, dans une allocution exceptionnellement diffusée en direct.
Le président a de nouveau insisté sur la nécessité de prendre des décisions fortes, comme dans son allocution du 14-Juillet puis à Bormes-les-Mimosas (Var) le 17 août.
"Le moment que nous vivons peut sembler être structuré par une série de crises graves (...) et il se pourrait que d'aucuns voient notre destin comme étant perpétuellement de gérer les crises ou des urgences. Je crois, pour ma part, que ce que nous sommes en train de vivre est plutôt de l'ordre d'une grande bascule ou d'un grand bouleversement", a-t-il déclaré devant la Première ministre Élisabeth Borne et les ministres.
Citant les effets de la guerre en Ukraine, débutée il y a six mois jour pour jour, et de la crise climatique, il a mis en avant "la fin de l'abondance", que ce soit "des liquidités", "des produits de technologie", des matières premières ou de l'eau.
A cela, s'ajoutent "la fin des évidences", comme celle de la démocratie, et "la fin de l'insouciance".
Alors que, face à ce contexte troublé, "nos compatriotes peuvent réagir avec beaucoup d'anxiété", le président a appelé le gouvernement au "respect de la parole donnée et des engagements" pris, et à "réaffirmer une unité très forte" avec la majorité autour "d'un cap qui nous permettra de consolider notre souveraineté, notre indépendance française et européenne".
Cette communication marque une rupture avec la "ligne optimiste" qu'il a "toujours tenue", selon le président de l'institut Elabe Bernard Sananès. "Il y a une forme d’anticipation politique: si vraiment les temps deviennent difficiles (...) le président doit l'avoir dit avant, pour ne pas donner l'impression qu’il aurait été surpris par les événements", analyse-t-il auprès de l'AFP.
C’est "une manière de préparer l’opinion", juge aussi pour l'AFP Jean-Daniel Lévy, directeur délégué d'Harris Interactive France, et "un changement de braquet. Parce qu’on ne peut plus du tout être sur un discours optimiste. L’état d’esprit français est très différent".
Pour le président du MoDem François Bayrou, Emmanuel Macron "n'éludera aucune des questions cruciales de notre avenir". "Il se situe d'avantage dans la question du moyen et du long terme que dans la gestion de l'immédiat".
- "sobriété énergétique" -
Les déclarations du chef de l’État ont été fraîchement accueillies à gauche et par le secrétaire général de la CGT Philippe Martinez.
"C'est un message décalé. Quand on parle de fin de l'abondance, je pense aux millions de chômeurs, aux millions de précaires", a réagi M. Martinez sur BFMTV.
"Non mais on rêve ! Comme si les Français avaient manqué de soucis et s'étaient trop gavés", s'est indigné le secrétaire général du PCF Fabien Roussel sur Twitter, accusant "l'insouciance du Président Macron et la prédation des riches".
"Quand vous êtes dans un pays où il y a neuf millions de pauvre (...), entendre un truc pareil, c'est incroyable", a renchéri le leader insoumis Jean-Luc Mélenchon à Chateauneuf-sur-Isère, où se tiennent à partir de jeudi les journées d'été de LFI. "Il n'y a jamais eu de l'abondance M. Macron, il y a toujours eu de l'irresponsabilité".
"Il faudrait surtout que ce soit la fin du déni, la fin de l’inaction et aussi la fin d’une forme d’impuissance face aux lobbys", a réagi l'ex-candidat écologiste Yannick Jadot sur Twitter.
M. Macron a aussi énuméré les grandes étapes de la rentrée avec un séminaire gouvernemental la semaine prochaine, en bonne partie consacré à l'écologie, et le lancement, la semaine suivante, du Conseil national de la refondation.
La période estivale a été marquée par une succession de drames climatiques, de la sécheresse aux incendies jusqu'aux orages meurtriers en Corse.
Alors que le bilan écologique du premier quinquennat est dénoncé comme insuffisant par les associations écologiques, l'heure est donc à "la mobilisation générale", selon l'entourage du président, avec un mot d'ordre, "la sobriété énergétique", qui devra faire l'objet d'un projet de loi d'accélération des énergies renouvelables.
D'autres chantiers compliqués attendent le gouvernement, comme un texte sur l'assurance chômage qui doit prolonger le durcissement d'accès aux indemnités et qui suscite l'hostilité de la gauche et de syndicats.
Parallèlement, l'agenda de M. Macron va rester largement occupé par les dossiers internationaux, à commencer par la guerre en Ukraine. Jeudi, il sera en Algérie pour une visite de trois jours avant de détailler ses priorités diplomatiques devant les ambassadeurs le 1er septembre.
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