Les soupçons à l'encontre de Michel Fourniret se sont renforcés vendredi dans l'affaire Estelle Mouzin, après une nouvelle audition de son ex-épouse, qui a assuré que l'"Ogre des Ardennes" avait selon elle bien tué la fillette, disparue en 2003.
Entendue pendant six heures par la juge Sabine Khéris, qui a récupéré en 2019 l'enquête sur la disparition d'Estelle Mouzin, Monique Olivier a réitéré les accusations portées contre son ex-mari, allant jusqu'à évoquer de possibles "repérages" avant l'enlèvement.
"Elle n'a pas dit de but en blanc que Michel Fourniret s'était confié sur le meurtre" mais "elle a déclaré que, pour elle, Michel Fourniret avait bien tué Estelle Mouzin", a expliqué son avocat Me Richard Delgenes, à l'issue de l'audition.
"On a plus avancé aujourd'hui en six heures qu'en dix ans" d'instruction, a ajouté l'avocat, se disant "satisfait des avancées" obtenues par la juge d'instruction dans ce dossier criminel hors norme.
Lors de l'audition, Monique Olivier -en conflit ouvert avec son ex-mari- a invoqué trois raisons pour incriminer l'"Ogre des Ardennes", selon Me Delgenes.
"La première, c'est qu'Estelle Mouzin avait selon elle le +profil type+ des sujets que recherchait Michel Fourniret", déjà condamné pour les meurtres de huit jeunes femmes ou adolescentes entre 1987 et 2001, a souligné l'avocat.
La seconde tient à son absence d'alibi. Le tueur en série a toujours assuré qu'il se trouvait à son domicile de Sart-Custinne, en Belgique, le jour de la disparition d'Estelle Mouzin, survenue le 9 janvier 2003 à Guermantes (Seine-et-Marne).
En guise de preuve, le tueur en série invoquait un appel téléphonique passé à son fils le soir des faits pour son anniversaire. Ce dernier n'avait alors pas décroché mais l'appel avait été attesté par des relevés téléphoniques.
Mais Monique Olivier a mis à mal cette version le 21 novembre, affirmant avoir passé à la place de son ex-mari, et à sa demande, cet appel censé le dédouaner. Des propos réitérés vendredi face à la juge d'instruction, selon Me Delgenes.
La troisième raison incriminant Michel Fourniret, aux yeux de son ex-femme, tient à son emploi du temps. "Elle pense qu'il a effectué des repérages (...) dans les jours ou les semaines ayant précédé la disparition", a expliqué Me Delgenes.
Il faut voir si cela "peut être confirmé" par l'enquête, notamment via des "témoins", a souligné l'avocat. Mais pour elle, il n'est "pas impossible voire fort probable" qu'il se soit rendu sur les lieux de la disparition en amont, a-t-il ajouté.
- "Joueur d'échecs" -
Michel Fourniret a été mis en examen le 27 novembre pour "enlèvement et séquestration suivis de mort" dans l'enquête sur la disparition d'Estelle Mouzin, à l'issue d'une longue audition dans le bureau de la juge Sabine Khéris.
Lors de cette audition, le tueur en série -qui assure souffrir de pertes de la mémoire- n'est toutefois pas passé formellement aux aveux, selon le procès-verbal de son audition dont l'AFP a pris connaissance vendredi.
"Il est fort possible même très probable que j'ai été l'auteur de cette disparition mais je ne sais pas quoi vous dire", a-t-il déclaré, assurant que rien ne faisait "tilt" dans sa tête lorsqu'on le confronte à une photo de la fillette.
"Dans l'impossibilité où je suis de vous dire +oui, je suis responsable de sa disparition+, dans cette impossibilité là, je vous exhorte à me considérer comme coupable", a ajouté le meurtrier en série, tout en assurant être "un joueur d'échecs".
Michel Fourniret, 77 ans, souffrirait selon plusieurs médias d'un début de maladie d'Alzheimer. "Il peut avoir des moments d'absence mais il est parfaitement conscient", estime cependant l'avocat du père d'Estelle Mouzin, Me Didider Seban.
Estelle Mouzin a disparu à l'âge de neuf ans, alors qu'elle rentrait de l'école à Guermantes, village situé à 250 kilomètres de la frontière belge. Son corps n'a jamais été retrouvé et les nombreuses pistes envisagées par les enquêteurs n'ont rien donné.
Déjà visé par des soupçons à l'époque de la disparition, Michel Fourniret avait été mis hors de cause par la police en 2007. Six ans plus tard, l'expertise de milliers de poils et cheveux prélevés dans sa voiture n'avait pas non plus permis de trouver de traces de la jeune fille.
Vos commentaires