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Étudiante éborgnée par une grenade: un commissaire et un policier condamnés

Étudiante éborgnée par une grenade: un commissaire et un policier condamnés
Des manifestants à Toulouse devant la police le 7 décembre 2018REMY GABALDA
 
 

Un commissaire et un policier ont été jugés coupables lundi de "blessures involontaires" après le tir d'une grenade de désencerclement qui a éborgné une jeune femme en 2007, une décision amenée à faire jurisprudence, selon les avocats.

Le commissaire, à la tête des opérations ce jour-là, a été condamné à 5 mois avec sursis et un policier - dont il n'a pourtant pas été établi qu'il soit le tireur de la grenade incriminée - à trois mois avec sursis. Cette décision ne sera toutefois pas inscrite à leurs casiers judiciaires.

Deux autres policiers également poursuivis ont eux été relaxés.

Dans le contexte actuel, cette décision indique que "chacun est responsable de l'emploi des armes qu'il utilise, du policier jusqu'au commandement", a déclaré Me Hervé Gerbi, au tribunal correctionnel de Lyon.

Les faits remontent au 16 mai 2007, soir de l'investiture de Nicolas Sarkozy. Une manifestation de militants d'ultra-gauche est dispersée par 200 policiers et gendarmes dans le centre de Grenoble.

En fin de soirée, Maud C., étudiante en médecine de 23 ans, traverse avec une amie une place sur laquelle restent quelques contestataires.

Une grenade de désencerclement est lancée, qui la touche à l'oeil. Elle a dû subir une dizaine d'opérations, a perdu un oeil, l'odorat et le goût.

Si le commissaire a été renvoyé dès 2013 en correctionnelle pour "blessures involontaires", les trois autres policiers ont d'abord bénéficié d'un non-lieu, le tireur ne pouvant être identifié.

Puis, saisie par les parties civiles, la Cour de cassation a estimé en juillet 2017 que même sans identifier le tireur, on peut engager la responsabilité de toute personne qui a contribué au dommage avec une commune imprudence.

"C'est intéressant comme décision sur la notion de coaction à des faits involontaires", commente Me Denis Dreyfus, l'avocat du commissaire.

"Dans la plupart des dossiers, ce qu'on vient juger c'est la façon dont les armes sont utilisées, là c'est l'opportunité de la méthode utilisée", analyse de son côté Me Gerbi, spécialisé dans l'aide aux victimes.

A l'unisson d'autres avocats, il réclame l'interdiction des grenades de désencerclement, comme les GLI-F4 accusées d'avoir blessé ou mutilé des manifestants dernièrement.

De six à dix mois de prison avec sursis avaient été requis à l'audience le 8 octobre. Poursuivis pour blessures involontaires, ils encouraient une peine maximale de trois ans d'emprisonnement.

"La décision me semble logique et mesurée par rapport aux réquisitions pour cette situation qui était un échec pour les services de police avec cette victime" d'autant plus qu'il y avait eu des "absences de sommation", a réagi Me Dreyfus, ne sachant pas pour l'heure si son client ferait appel.

En 2007, ces grenades de désencerclement étaient utilisées depuis deux ans seulement, et les fonctionnaires de police avaient reçu une formation "plus que succinte", avait souligné le président à l'audience.


 

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