Le 19 septembre sera-t-il inscrit au calendrier comme la journée d'hommage national aux victimes du terrorisme? Organisée depuis 1998 par les associations, la cérémonie présidée lundi par François Hollande revêt une symbolique particulière dans une France frappée par les attaques jihadistes.
A huit mois de la présidentielle, la classe politique sait qu'elle ne peut ignorer les attentes des victimes, aussi bien en matière de lutte antiterroriste et d'indemnisation que sur le travail de mémoire.
Lundi, outre François Hollande, dont le discours est très attendu, de nombreux membres du gouvernement et de l'opposition seront présents.
"Le 19 septembre, hommage de François Hollande à toutes les victimes du terrorisme dans les jardins de l'intendant de l'hôtel national des Invalides": le tweet de Juliette Méadel, secrétaire d'État chargée de l'Aide aux victimes, sonnait début septembre comme l'annonce d'une cérémonie inédite.
"Elle va être comme d'habitude, elle existe depuis 18 ans, c'était une initiative associative, à laquelle nous sommes très attachés", réplique Stéphane Gicquel, secrétaire général de la Fédération nationale des victimes d'attentats et d'accidents collectifs (Fenvac).
Le 19 septembre 1989, un avion DC-10 français de la compagnie UTA effectuant la liaison Brazzaville-Paris explosait en vol au-dessus du Niger, tuant 170 personnes, dont 54 Français.
Depuis 1998, l'Association française des victimes du terrorisme (AfVT) et la Fenvac se réunissent à cette date devant la statue-fontaine de "La parole portée" aux Invalides, seul monument parisien dédié aux victimes du terrorisme, pour rendre hommage aux victimes tuées durant l'année écoulée, et invitent des responsables politiques, comme François Hollande en 2012.
Mais, depuis l'an dernier, le pays a basculé dans une nouvelle ère, avec "un nombre inégalé de victimes du terrorisme", souligne Stéphane Gicquel
- Trouver la bonne date -
Les organisateurs, rejoints cette année par l'association "13 novembre: Fraternité et vérité" évoquent ainsi huit attentats "dans lesquels il y a eu des Français tués, du 20 septembre à aujourd'hui".
Le 13 novembre à Paris et Saint-Denis (130 morts), le 15 janvier à Ouagadougou (30 morts dont deux Français), le 13 mars à Grand-Bassam en Côte d'Ivoire (19 morts, quatre Français), le 22 mars à Bruxelles (32 morts, un Français), le 1er juin à Gao au Mali (quatre morts, un Français), le 13 juin un policier et sa compagne assassinés chez eux à Magnanville (Yvelines), le 14 juillet à Nice 86 personnes tuées sur la promenade des Anglais. Enfin, le 26 juillet, un prêtre est égorgé dans son église près de Rouen.
Guillaume Denoix de Saint Marc, directeur général de l'AfVT, a perdu son père dans la catastrophe du DC-10 d'UTA. Il sait la difficulté de choisir une date qui convienne sinon à chacun, du moins au plus grand nombre.
Le 19 septembre est un jour évidemment spécial pour lui. "De façon égoïste, on a envie que ça reste une journée un peu personnelle", reconnaît-il. Tout en militant pour que le 19 septembre devienne une journée d'hommage national, il comprend que les familles des victimes du 13 novembre n'y soient pas favorables.
Plus réservée, la Fenvac insiste sur le fait que "ce sont les associations de victimes qui ont convié le président de la République, et non l'inverse". Inscrire cette journée au calendrier officiel risque, selon Stéphane Gicquel, "de dénaturer l'identité de cet événement: l'hommage gagnerait en solennité peut-être, mais perdrait en liberté de parole".
Même si "les victimes sont très sensibles aux hommages" et que "la prise de parole des hauts responsables est toujours importante pour eux", reconnaît-il.
Et il envisage d'autres initiatives : "Est-ce qu'il faut mettre quelque part le nom des victimes du terrorisme, ou faire figurer l'inscription +victime du terrorisme+ sur le monument aux morts pour un civil tué lors d'un attentat?"
Les attentats demeurent en tout cas un sujet éminemment politique. Nicolas Sarkozy, candidat à la primaire de la droite, s'est rendu samedi à Nice pour rencontrer des victimes de l'attentat du 14 juillet. Il a dit trouver "insupportable de ne pas savoir ce qu'il s'est passé exactement" lors de l'attaque, réactivant ainsi les vives critiques lancées cet été par l'opposition contre le gouvernement.
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