"On les attend": la municipalité du Vigan, un bourg gardois de 4.000 habitants, s'apprête à accueillir des familles de réfugiés syriens et irakiens et mettre à leur disposition trois logements communaux vacants, aux termes d'une délibération adoptée à l'unanimité dès juin.
"Il y a un exode, que faisons-nous? De ma place modeste de maire rural, c’était une évidence, ça me paraissait normal, simple, banal", explique Eric Doulcier, maire (SE) du Vigan. "On n’est pas dans l’émotionnel, on est dans une vraie réflexion : on peut agir localement", ajoute-t-il.
Contacté en février par le groupe local d’Amnesty International cherchant des solutions d’hébergement pour les réfugiés, l’édile a proposé à son conseil municipal de mettre à leur disposition trois appartements communaux disponibles.
La délibération a été adoptée à l’unanimité, dès le 25 juin, par les 22 élus de la majorité et les cinq membres de l’opposition (3 PS et 2 Les Républicains).
"Je ne veux pas participer à l’infamie qui serait de ne rien faire. On ne pourra pas dire à nos enfants qu’on ne savait pas, on a des images tous les jours depuis des mois", dit encore M. Doulcier.
Le bourg, qui compte 4.092 habitants, est confronté au chômage mais ne rencontre pas de pénurie de logements, selon lui.
"Il ne s’agit pas de partager des richesses, mais de partager ce que l’on a. La tradition des Cévennes est d’être une terre de refuge. Etre digne de cette histoire-là, c’est précieux", précise M.Doulcier.
- 'projet collectif '-
L’arrivée de familles bénéficiant du statut de réfugiés devrait être fixée lors d’une rencontre courant septembre avec le préfet du Gard. "Ça ne devrait plus tarder, on les attend", indique M.Doulcier.
"Avec trois chambres, celui-là serait parfait pour un couple avec quatre enfants par exemple": Alexandre Cozza, adjoint au maire, arpente un appartement de 65 m2 aux volets bleus, installé au premier étage d’un bâtiment communal, à côté de l’école et des équipements sportifs.
En dédiant un quart de son parc immobilier à des migrants, la municipalité souhaite leur "offrir un lieu sécurisé où prendre le temps de se reconstruire et de réfléchir à l’avenir", avec la possibilité de scolariser les enfants.
Les élus veulent aussi en faire un "projet collectif" en impliquant les associations et la population dans l’intégration des familles, d’un point vue linguistique et professionnel notamment.
"L’avantage c’est qu’on a un tissu associatif fort et beaucoup de gens non occupés professionnellement, des retraités et des sans emploi, avec de la disponibilité en termes de temps", souligne Gérald Gervasoni, élu d’opposition PS.
"Il n’est pas simplement question de les mettre à l’abri", insiste-t-il.
Sur le marché, un samedi matin, Florence, une mère de famille de 35 ans, approuve l’initiative de la ville qui apportera "un peu de répit à ces personnes qui sont en situation de mort dans leur pays".
"Ici non plus ce n’est pas facile, car ils viennent avec rien dans un pays qu’ils ne connaissent pas et dont ils ne parlent pas la langue", observe-t-elle.
Christophe, un enseignant, partage cet avis: "On devrait les accueillir massivement", ajoute-t-il.
"Qu’on loge d’abord les nôtres! Je n’accepte pas le principe qu’il fasse passer des étrangers avant, s’emporte une septuagénaire sous couvert d’anonymat. On les plaint, ce sont des humains comme nous, je ne suis pas contre, mais on est endettés".
Le maire qui dit avoir reçu "cent lettres de soutien et trois lettres de gens pas satisfaits", envisage d’organiser prochainement une réunion publique avec ses administrés.
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