Les quatre policiers qui ont interpellé George Floyd à Minneapolis sont dorénavant tous poursuivis par la justice et sa mort a été requalifiée en "meurtre", comme le réclamaient des centaines de milliers d'Américains qui manifestent depuis la semaine dernière, ont annoncé mercredi les autorités.
Les manifestations, qui ont parfois été accompagnées de pillages et d'émeutes ces derniers jours, se sont poursuivies mercredi dans de nombreuses villes, sans qu'aucun débordement majeur n'ait été signalé.
Après les scènes de violence qui avaient émaillé la nuit précédente, le président Donald Trump avait menacé lundi de déployer l'armée "pour régler rapidement le problème", des propos immédiatement dénoncés par l'opposition.
Donald Trump est le premier président qui n'essaye pas de rassembler les Américains
En désaccord apparent avec Donald Trump, le secrétaire américain à la Défense s'est lui-même dit mercredi opposé à l'idée de déployer les soldats dans les grandes villes. "Je ne suis pas favorable au décret de l'état d'insurrection" qui permettrait une telle mesure, a déclaré Mark Esper.
Jim Mattis, l'ex-ministre de la Défense de M. Trump qui avait démissionné, est à son tour monté au créneau pour accuser le président de "diviser" l'Amérique. "De mon vivant, Donald Trump est le premier président qui n'essaye pas de rassembler les Américains, qui ne fait même pas semblant d'essayer", a écrit l'ancien général des Marines.
Le président américain s'est aussitôt déchaîné sur Twitter, qualifiant M. Mattis de "général le plus surestimé du monde" et de "chien fou". "Je suis content qu'il soit parti !", a insisté le locataire de la Maison Blanche.
Derek Chauvin risque 40 ans de prison
Les nouvelles inculpations dans l'enquête sur la mort de George Floyd seront peut-être de nature à calmer la contestation dans les rues.
Derek Chauvin, le policier qui, le 25 mai à Minneapolis, s'est agenouillé sur le cou du quadragénaire pendant plus de huit minutes, provoquant sa mort, avait dans un premier temps été inculpé seulement d'homicide involontaire.
Les chefs d'accusation le visant ont été requalifiés mercredi de "meurtre non prémédité", plus grave, passible de 40 ans de prison.
Les trois autres agents qui l'accompagnaient sont désormais également poursuivis, pour complicité, et placés en détention, à la grande satisfaction de la famille de George Floyd.
Ces poursuites étaient au cœur des demandes des manifestants qui font entendre leur colère partout dans le pays.
"S'attaquer au problème du racisme institutionnalisé"
"Le problème c'est qu'il a fallu que nous descendions dans les rues et que nous coupions littéralement des ponts et des autoroutes pour obtenir justice", déplore Brian Carter, Américain noir de 29 ans rencontré par l'AFP lors d'une des manifestations organisées à New York.
"Si un groupe de quatre hommes noirs avait tué une personne blanche, ils auraient été arrêtés sur place. Ca ne se passe pas comme ça pour nous", souligne-t-il.
Pour le gouverneur du Minnesota, l'inculpation des quatre policiers est une opportunité de "s'attaquer au problème du racisme institutionnalisé et de l'impunité" qui ont abouti à la mort de George Floyd. "C'est probablement notre dernière chance d'y remédier, en tant qu'Etat et nation", a-t-il dit.
L'ex-président Barack Obama a quant à lui salué le "changement de mentalité en cours", qui pourrait selon lui aboutir à des réformes au niveau national. "Rappelez vous que ce pays a été fondé sur un mouvement de protestation. Ca s'appelle la révolution américaine", a lancé M. Obama lors d'une visioconférence avec des militants.
Un dispositif pour boucler l'accès à la Maison Blanche
Dans des dizaines de villes du pays, des milliers de manifestants étaient de nouveau dans les rues mercredi, pour certains bien décidés à braver encore une fois le couvre-feu. Plusieurs dizaines de personnes ont ainsi été interpellées à Brooklyn et Manhattan pour non respect de l'heure légale.
Les horaires du couvre-feu ont toutefois été assouplis à Washington et à Los Angeles, où il devrait être levé dès jeudi si la nuit est calme. C'était déjà le cas à Seattle (nord-ouest) mercredi.
A Los Angeles, le maire Eric Garcetti a accédé à une des principales revendications du mouvement "Black Live Matters" qui organise la contestation: réduire le budget de la police pour investir dans des programmes sociaux et éducatifs à destination des communautés noires. Le maire démocrate a renoncer à augmenter le budget de la police l'an prochain et décidé d'allouer 250 millions de dollars à de tels programmes.
A Washington, un important dispositif policier a été une nouvelle fois déployé pour boucler l'accès à la Maison Blanche, même si les autorités ont dit s'attendre à des rassemblements pacifiques.
Près de 10.000 arrestations
Lundi soir, les abords de la Maison Blanche avaient été évacués manu militari pour permettre à Donald Trump de sortir dans la rue et poser avec un exemplaire de la Bible devant la petite église qui fait face au centre du pouvoir exécutif américain.
Le milliardaire, qui vante les vertus viriles de l'ordre et de la "domination" depuis le début de cette crise, a démenti mercredi les informations selon lesquelles il avait été hâtivement mis à l'abri vendredi soir par le Secret Service dans un bunker sécurisé lors d'une manifestation devant sa résidence officielle.
Au total, la police a procédé ces derniers jours à près de 10.000 arrestations dans tout le pays, selon une estimation reprise par les médias américains.
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