Pluies diluviennes et tempêtes de neige ont transformé la vallée de la Bekaa au Liban en un immense marécage, invivable pour les dizaines de milliers de réfugiés Syriens qui y sont installés depuis des années.
"C'est le pire des hivers", lâche Thaer Ibrahim Mohammed, un keffieh rouge et blanc lui barrant le visage pour se protéger du froid, dans un des nombreux camps de réfugiés informels qui parsèment la Bekaa, dans l'est du Liban.
Coup sur coup, deux tempêtes ont frappé le pays en l'espace de quelques jours seulement, la dernière déversant pendant plusieurs jours des pluies torrentielles mais aussi de la neige. Le fleuve Litani a débordé, inondant la vallée enserrée entre les majestueux massifs du Liban et de l'Anti-Liban.
"On a passé toute la nuit à sortir l'eau de la tente, mais ça continuait à s'infiltrer", déplore M. Mohammed, dans le camp de réfugiés "Camp 040".
Comme lui, après avoir réparé tant bien que mal leurs tentes endommagées une première fois par l'eau et le vent glacial, les familles du camp ont dû faire face à de nouvelles intempéries, avec de la neige et des inondations.
Les abris du "Camp 040", près du village de Delhamiyeh, témoignent de la misère ambiante. Les bâches en plastique des tentes érigées sur des dalles de ciment protègent mal du vent et du gel.
L'état précaire pourrait faire croire qu'il vient à peine d'être mis en place: en réalité, certains de ses résidents sont issus des premières grandes vagues de réfugiés fuyant l'escalade du conflit en Syrie, débuté en 2011.
- Aide insuffisante -
Abou Ahmad, originaire de la province de Homs en Syrie, en est à son septième hiver. Pour lui, l'aide apportée aux réfugiés est insuffisante.
"Cette année, il y avait beaucoup de pluie. Mais les organisations humanitaires ont réduit leur aide", regrette-t-il, debout sur une brique faisant office de pierre de gué au milieu d'une mare de boue.
"Regardez par vous-même. Vous pensez que ces bâches nous permettent de rester au chaud ou d'empêcher les infiltrations d'eau?", fait-il remarquer avec lassitude. "Ils ne nous ont rien donné. Pas de nouvelles bâches, pas de bois, rien", poursuit le jeune homme.
Chassés par la guerre qui ravage leur pays, environ 1,5 millions de Syriens se sont installés au Liban selon des statistiques officielles et plus de la moitié des réfugiés vivent d'après les Nations unies dans une "extrême pauvreté".
Près de 24.000 personnes sont directement touchées par les conditions climatiques extrêmes, a déclaré le Haut commissariat aux réfugiés de l'ONU (HCR), qui dit distribuer du matériel de réparation, des matelas mais aussi des couvertures.
En plus de détruire les tentes des réfugiés, la tempête a aussi inondé l'autoroute au nord de Beyrouth, entraîné la fermeture des écoles et celle de la route principale menant en Syrie.
- tentes inondées -
Face à un nouvel épisode neigeux, les agences d'aides ont dû relocaliser des familles qui se sont retrouvées encore une fois sans abri.
Parmi eux, Fatima, jeune réfugiée de 20 ans originaire de la grande ville d'Alep dans le nord syrien, a été contrainte d'abandonner avec sa famille la tente qu'ils occupaient. Les voisins leur ont fait une petite place sous la leur.
"La tente était complètement inondée, on ne pouvait plus y vivre. Alors on a pris nos affaires et on est parti. Que pouvons-nous faire d'autre?", soupire-t-elle.
Profitant jeudi d'une éclaircie, les enfants sont sortis jouer, organisant des batailles de boules de neige, avec à leurs pieds des bottes en caoutchouc pour affronter les allées boueuses du camp.
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