Le chef de l'EI, Abou Bakr al-Baghdadi, aurait été tué par une opération militaire nocturne des Etats-Unis dans le nord-ouest de la Syrie, ont indiqué des médias américains avant une déclaration dimanche annoncée comme "très importante" de Donald Trump.
Le ministère turc de la Défense a affirmé pour sa part sur Twitter avoir été en "coordination" avec les Etats-Unis avant l'opération américaine, menée dans un secteur tout proche de la frontière turque, sans apporter de détail sur la cible.
Un haut responsable turc en a cependant dit un peu plus à l'AFP, sous couvert d'anonymat.
"Selon mes informations, Baghdadi était arrivé à cet endroit 48 heures avant l'opération américaine. Nous étions en coordination étroite avec les parties concernées", a-t-il déclaré.
En tout début de matinée, l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH), qui dispose d'un vaste réseau de sources sur le terrain, avait fait état également d'une opération de commandos américains héliportés et débarqués dans la nuit dans la région d'Idleb (nord-ouest) pour "cibler de hauts dirigeants du groupe Etat islamique."
Mais même si de nombreux médias américains l'annonçaient, aucune information officielle ne confirmait la mort du mort du "calife" autoproclamé en 2014 ayant un temps présidé aux destinées de 7 millions de personnes en Irak et en Syrie.
L'homme le plus recherché du monde, considéré comme responsable de multiples exactions et atrocités en Irak et en Syrie et d'attentats sanglants dans plusieurs pays, avait été plusieurs fois annoncé mort ces dernières années.
Le "califat" territorial de l'EI a été défait en mars dans son dernier réduit en Syrie.
Le président des Etats-Unis Donald Trump doit faire dimanche à 09H00 (13H00 GMT) une annonce "très importante" depuis la Maison Blanche. Dès la soirée, il avait publié un message sibyllin sur Twitter: "quelque chose d'énorme vient de se passer!".
CNN assurait pour sa part que des tests étaient en cours afin de pouvoir confirmer la mort du chef du groupe jihadiste, qui aurait fait exploser sa veste chargée d'explosifs pour se suicider au moment de l'opération.
- Intense activité militaire -
Les tirs de huit hélicoptères ont visé après minuit une maison et une voiture aux abords du village de Baricha, à quelques kilomètres de la frontière turque, a déclaré à l'AFP le directeur de l'OSDH, qui fait état d'au moins neuf morts, dont deux femmes et un enfant, sans pouvoir dire si le chef de l'EI se trouvait dans le secteur.
Abdelhamid, un habitant de Baricha, s'est rendu dans le secteur touché très tôt dimanche matin. "Il y a une maison écroulée, des tentes et une voiture civile endommagées avec deux morts à l'intérieur", a-t-il raconté à l'AFP.
Aux abords de Baricha, un correspondant de l'AFP a pu voir la carcasse d'un minibus carbonisé, touché par des bombardements.
"L'opération a duré au moins jusqu'à 03H30 du matin", a précisé un autre habitant.
Un groupe jidahiste contrôlant la région a bloqué dimanche l'accès au site visé par l'opération américaine, a constaté un journaliste de l'AFP. Il a précisé que des combattants du groupe Hayat Tahrir al-Cham (HTS), jihadistes rivaux de l'EI qui dominent cette région de la Syrie, avaient pris position autour d'une maison en ruines au milieu des oliviers de Baricha.
Quelques journalistes ont pu brièvement s'approcher des ruines de cette maison totalement détruite. Des pelleteuses étaient à l'oeuvre pour déblayer les gravats.
Ce développement intervient dans une période d'intense activité militaire dans le nord de la Syrie, où les forces turques ont lancé le 9 octobre une vaste offensive contre les forces kurdes.
De leur côté, Damas et son allié russe ont accéléré le déploiement de leurs troupes à la frontière turque, tandis que les Américains ont annoncé l'envoi de renforts militaires dans l'est pétrolier de la Syrie.
Sans confirmer nommément la mort d'Abou Bakr al-Baghdadi, les forces kurdes en Syrie ont salué dimanche une "opération historique" menée grâce à un "travail conjoint des renseignements" avec Washington.
- Propagande -
La dernière apparition de Baghdadi, la première en cinq ans, remonte à une vidéo de propagande du 29 avril où il appelle ses partisans à poursuivre le combat.
En septembre, il a appelé dans un enregistrement audio ses partisans à "sauver" les jihadistes détenus dans les prisons et leurs familles vivant dans des camps de déplacés notamment en Syrie et en Irak.
C'est à Mossoul, en Irak, que le chef de l'EI a fait sa seule apparition publique connue, en juillet 2014, à la mosquée al-Nouri.
De son vrai nom Ibrahim Awad al-Badri, le chef de l'EI serait né en 1971 dans une famille pauvre de la région de Bagdad. Passionné de football, il a échoué à devenir avocat puis militaire avant d'étudier la théologie.
C'est lors de l'invasion américaine de l'Irak en 2003 qu'il crée un groupuscule jihadiste sans grand rayonnement avant d'être arrêté et emprisonné dans la gigantesque prison de Bucca.
Libéré faute de preuves, il rejoint un groupe de guérilla sunnite sous tutelle d'Al-Qaïda puis en prend la tête quelques années plus tard. Profitant du chaos de la guerre civile, ses combattants s'installent en Syrie en 2013 avant une offensive fulgurante en Irak.
Le groupe, rebaptisé Etat islamique, supplante Al-Qaïda, tandis que ses succès militaires initiaux et sa propagande soigneusement réalisée attirent des milliers de partisans du monde entier, avant la défaite.
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